Qui l’eut cru ? Lorsque le terme d’agriculture de précision apparaît dans les années 1990, elle semble réservée aux grandes plaines américaines et surtout loin d’être techniquement aboutie. Trente ans après, la moitié des tracteurs de plus de 150 ch sont vendus avec une solution de guidage, de nombreuses ensileuses sont équipées d’un laboratoire embarqué qui analyse le fourrage en temps réel et 300 000 hectares sont cultivés avec de la modulation intraparcellaire.
Des cartes de rendement
L’agriculture de précision est née du développement conjoint de deux technologies au milieu des années 1990 : le repérage par GPS et la mesure du rendement en temps réel sur les moissonneuses-batteuses. Les machines équipées d’une antenne GPS, d’un signal de correction dGPS et de capteurs dans l'élévateur étaient ainsi en mesure d’éditer des cartes de rendement.
À l’époque, l’idée d’exploiter directement ces cartes pour moduler les intrants, en particulier le semis et la fertilisation, faisait son chemin. Mais les farmers américains, qui ont été les premiers à tenter de convertir directement les cartes de rendements en cartes de préconisation, ont rapidement constaté qu’elles n’étaient pas assez pertinentes. La technique a rapidement cessé d’intéresser les agriculteurs français.

Démocratisation du guidage
C’est finalement par le biais du guidage que le GPS a conquis les agriculteurs français. L’arrivée de signaux de correction plus précis, notamment avec le RTK, et le développement de l’autoguidage ont apporté une nouvelle façon de travailler aux chauffeurs, qui peuvent désormais se concentrer sur le réglage de l’outil. La grande majorité des tracteurs du marché sont aujourd’hui vendus avec une prédisposition d’usine pour l’autoguidage.
Parallèlement, les fabricants de distributeurs d’engrais, pulvérisateurs et semoirs ont développé des appareils capables de réaliser de la modulation de dose et de la coupure de section automatiquement, grâce à la géolocalisation. Des prélèvements de terre, analyses de conductivité et mesures d’azote, toutes géolocalisées, apportent le chaînon manquant de l’agronomie, qui manquait pour établir des cartes de préconisation fiables.
La modulation intraparcellaire de l’azote mais aussi de la fumure de fonds est désormais bien maîtrisée, celle du semis commence à être adoptée et certains pratiquent déjà l’application ciblée de régulateurs de croissance et de fongicides. Et ce n’est pas fini. L’agriculture de précision dépasse désormais la modulation intraparcellaire. Pour les produits liquides, la nouvelle étape est la pulvérisation ciblée, qui emploie l’intelligence artificielle pour détecter les adventices et les maladies.