Mercosur : la signature de l’accord repoussée après un Conseil sous tension
Sous la pression de plusieurs États et du monde agricole, la Commission européenne repousse la signature du traité de libre-échange. Un report obtenu au terme d’un Conseil européen révélateur des fractures persistantes sur la souveraineté agricole.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
« Après des discussions difficiles, nous avons obtenu le report de cette décision et donc du sommet qui était initialement prévu après-demain », s’est félicité Emmanuel Macron lors d’une conférence de presse dans la nuit du 18 au 19 décembre 2025, à Bruxelles. De sources habituées aux Conseils européens (1), l’édition qui s’achève ce 19 décembre serait l’un des plus âpres de ces dernières années. Et ce sont des dossiers majeurs pour l’agriculture qui cristallisent les tensions entre États membres.
Pression du monde agricole
L’accord commercial entre l’Union européenne et les pays du Mercosur occupe une place centrale dans les échanges. Un an après la conclusion des négociations à Montevideo par la Commission européenne, la France, sous la pression des représentants du monde agricole, maintient sa position. Emmanuel Macron l’a dit à nouveau devant la presse : « Nous considérons que le compte n’y est pas et que cet accord ne peut pas être signé. » La France martèle sa série de garanties essentielles avant toute signature : les clauses de sauvegarde, le renforcement des contrôles, les mesures miroirs. Elle plaide pour un report de la signature de l’accord.
Jusqu’ici prudente, la Première ministre italienne, Giorgia Meloni, a finalement estimé qu’il était trop tôt pour signer, faute de garanties agricoles solides. « On en a beaucoup parlé ces derniers jours, » assure le Président Français. Mais cette évolution n’est certainement pas décorrélée de la mobilisation des agriculteurs italiens, nombreux dans les rangs de la manifestation du 18 décembre. Il s’agit aussi de gagner du temps afin de convaincre un secteur en ébullition. Ce revirement met à mal l’espoir de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, de voir l’accord adopté ce 20 décembre lors du sommet Mercosur.
Un bras de fer entre partisans et opposants
La tension culmine autour de la volonté de certains États membres de « forcer une signature d’ici la fin de la semaine », malgré l’absence de garanties opérationnelles. Les partisans de l’accord estiment que, dans un contexte de rivalités internationales – taxes américaines, tensions avec la Chine –, diversifier les partenaires commerciaux de l’Europe constitue un impératif stratégique. La France partage cet objectif, mais souligne que cette diversification ne doit pas se faire au détriment de la souveraineté agricole et alimentaire européenne. Elle rappelle également que l’accord date d’une génération ancienne – le mandat de négociation remonte à 1999 – et qu’il ne prend pas en compte les enjeux contemporains de transition écologique et de réciprocité des normes.
En début de soirée, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé aux dirigeants des Vingt-Sept le report à début janvier de la signature de l’accord commercial avec le Mercosur. Une victoire d’étape pour Paris, mais qui ne clôt pas le débat. Car la France a beau multiplier les initiatives diplomatiques pour arracher des garanties, un fossé demeure. Pour les syndicats agricoles, les clauses de sauvegarde, aussi robustes soient-elles, ne constituent pas une réponse acceptable. Pour eux, il ne s’agit pas d’encadrer l’accord, mais de le rejeter.
(1) Le Conseil européen est la réunion des chefs d’État ou de gouvernement des 27 pays de l’Union européenne. Il fixe les grandes orientations et priorités politiques de l’Union européenne, tranche sur les dossiers sensibles et coordonne les États membres, mais ne légifère pas directement.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :