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Météo capricieuse Le potentiel de rendement des cultures entamé

Le déficit hydrique des dernières semaines sur la moitié nord de la France abaisse le potentiel de rendement des céréales et du colza, déjà malmenés par les pluies hivernales incessantes. Quant aux cultures de printemps, dont la sole a progressé, elles sont très hétérogènes.

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Les récoltes sont parties pour être précoces cette année. Les céréales d’hiver mûrissent à vue d’œil et comptent entre 8 et 15 jours d’avance hormis dans le Sud-Ouest où c’est plutôt en retard. Les premières coupes sont attendues d’ici trois semaines. « Les orges d’hiver ont déjà commencé à décolorer, c’est inédit », assure un technicien de coopérative en Bretagne. Pour les blés, le remplissage des grains est souvent bien entamé. La météo des prochains jours sera cruciale pour le poids de mille grains.

 

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Climat de tous les excès

Le déficit pluviométrique observé depuis mi-mars sur une grande moitié nord de la France a, en effet, entraîné une accélération du cycle des cultures et aussi une baisse du potentiel de rendement. D’autant plus que cette sécheresse a été précédée par des conditions automnales et hivernales très humides, entraînant des retards de semis. Ce qui avait, dès le départ, amputé le nombre de pieds par mètre carré du fait d’un mauvais enracinement lié à l’asphyxie racinaire. Les températures anormalement douces de l’hiver ont également accéléré le développement végétatif des cultures.

 

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Même s’il a plu récemment ça et là, le mal est souvent déjà fait et nombre de parcelles sont claires, avec une densité d’épis peu élevée, qui ne sera pas compensée par une bonne fertilité. Les opérateurs tablent sur des rendements très hétérogènes, avec une perte de 10 à 20 % à la moisson dans les orges d’hiver et les blés, notamment dans les sols argilo-calcaires superficiels.

 

« Les apports d’azote sur blé n’ont pas tous été faits, ce qui a entraîné un déficit de tallage, développe, par ailleurs, un opérateur en Bourgogne. Surtout dans les parcelles où les semis ont été décalés pour faire face à des problématiques de salissement. » Les orges d’hiver semblent les plus touchées, non seulement par le sec mais aussi par les attaques de pucerons à l’automne. Des pucerons également très présents ce printemps (lire ci-contre).

 

Toutefois, en Alsace, « les pluies sont arrivées juste avant la floraison du blé. Elles ont été providentielles car on était limite », se réjouit un conseiller de coopérative. Son collègue de Lorraine se veut également confiant : « Dans certaines zones où il y a eu de l’eau, la moisson ne devrait pas être si catastrophique, même s’il faut rester prudent. »

 

Plus au sud, la situation est meilleure pour les céréales d’hiver, malgré une implantation d’automne « pas terrible », surtout au mois d’octobre : « On a eu l’eau qu’il fallait, les maladies ont été contrôlées, et pour l’instant tout va bien, assure un opérateur dans le Lot-et-Garonne. » « La fin de cycle ne se déroule pas trop mal même si sur les terrains filtrants, ce sera un peu plus dur à la fin », détaille-t-on en Rhône-Alpes.

 

Dans ce contexte, la pression des maladies est plutôt faible et a été plutôt bien gérée. Les Hauts-de-France sont toutefois confrontés à une recrudescence de rouille jaune sur blé et de rouille naine sur orge, qui ont pourtant été contrôlées. La couverture des maladies de fin de cycle en orge (grillure pollinique, helminthosporiose) n’a pas toujours été bonne, comme dans la Vienne.

Colzas pénalisés

Mêmes causes, mêmes effets. Le rendement des colzas devrait être très moyen cette année, avec des catastrophes annoncées dans certaines situations. Les épisodes de gel en avril ont affecté des colzas affaiblis par les sols humides. « Dans des zones historiquement très bonnes chez nous, on voit encore les dégâts liés aux excès d’eau », confirme un opérateur du Nord-Ouest.

 

À cela s’ajoutent des problèmes de grosses altises, récurrents ces dernières années. La floraison a été très précoce mais les siliques sont peu nombreuses dans beaucoup de parcelles. Toutefois, en Vendée et dans la Vienne par exemple, les colzas semés tôt sont plutôt beaux, avec pas mal de siliques, bien remplies. Les levées précoces ont permis d’esquiver les attaques d’altises.

 

Les protéagineux d’hiver et de printemps ne sont pas très beaux non plus. « Du jamais vu », observe-t-on, par exemple, en Bourgogne. La situation est un peu meilleure au sud-ouest du territoire ou dans les Hauts-de-France.

Hausse de la sole d’orge de printemps

Les problèmes rencontrés à l’automne pour les céréales d’hiver et le colza ont amené certains agriculteurs à retourner des parcelles ou à se tourner vers des cultures de printemps. C’est ainsi que les emblavements en orge de printemps ont fortement progressé cette année (+ 12 % comparés à 2019, selon Agreste au 1er mai 2020). Les stades sont également très en avance et le potentiel des parcelles est très hétérogène, selon les dates de semis. Celles semées dans de mauvaises conditions sont à la peine. C’est mieux pour les autres, notamment en Bretagne.

Levées hétérogènes des maïs et tournesols

De même, les surfaces de maïs et de tournesol progressent (respectivement + 10 % et + 14 %). Mais là encore, la sécheresse et les mauvaises structures de sol après l’hiver ont joué des tours. Les levées des tournesols sont très hétérogènes, tout comme celles des maïs, dans la zone nord. C’est mieux plus au sud à la faveur des pluies, qui ont toutefois fait sortir les limaces.

 

Tous les semis de maïs ne sont pas encore terminés. Les opérateurs bretons craignent une forte pression de pyrale et de sésamie qui sont arrivées très précocement. De nombreux dégâts de corbeaux sont, par ailleurs, signalés. Jugés « catastrophiques », ils ont engendré le ressemis de nombreux hectares de maïs et de tournesol.

Isabelle Escoffier, Céline Fricotté, Hélène Parisot

 

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