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Tempêtes : l’agriculture durement touchée

Sur le terrain, les dégâts sont lourds, mais il est encore difficile d’établir un bilan de ces deux tempêtes.

Avec des rafales de vent historiques et des précipitations diluviennes, les dépressions Ciaran et Domingos ont mis à rude épreuve les exploitants agricoles.

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« Pour certains, ça va être très très dur de se relever. » Les mots de ce jeune exploitant à l’adresse d’Emmanuel Macron, lors de son déplacement le 3 novembre 2023 à Plougastel-Daoulas (Finistère), en disent long sur la détresse du monde agricole après le passage de la tempête Ciaran. Et pour cause : dans la nuit du 1er au 2 novembre, cette dernière a secoué le quart nord-ouest de la France. Domingos, le second coup de vent intervenu les 4 et 5 novembre, n’a rien arrangé.

Sur le terrain, les dégâts sont lourds, mais il était encore difficile d’établir un bilan lors du bouclage de cette édition, le 7 novembre. En Bretagne, toutes les productions sont concernées : porcs, volailles, bovins, légumes. De quelques tôles à une partie de toit envolées, les bâtiments ont subi plus ou moins de dommages selon leur exposition. Les éleveurs laitiers ont été particulièrement perturbés par les coupures d’électricité. Les plus grands élevages ou ceux équipés de robots sont le plus souvent équipés de générateurs. En salle de traite, le système D prévaut. L’entraide s’est mise en place pour faire tourner des génératrices entre plusieurs exploitations.

Noter les pertes

Pour autant, cela n’a pas suffi à sauver tout le lait produit (lire aussi le témoignage ci-dessous). D’après Patrick Wecxsteen, directeur du bassin laitier grand ouest chez Sodiaal, environ 1,5 million de litres de lait a été perdu pour le compte de la coopérative en Bretagne. Il conseille aux éleveurs de « noter et enregistrer les volumes de lait jetés, de garder une trace. Au-delà des dispositifs légaux, nous verrons ce qu’il est possible de faire au niveau de la coopérative pour accompagner les producteurs. »

Dans le Finistère, les récoltes de maïs grain n’étaient pas encore terminées. Le restant est à terre ou complètement haché. Les semis de blé à venir s’avèrent aussi compliqués. Les sols sont gorgés d’eau. Philippe Francès, éleveur laitier au Juch, a relevé 269 mm de précipitations entre le 18 octobre et le 5 novembre.

Les serristes ont également payé un lourd tribut. Les tunnels sont les plus endommagés avec des bâches envolées et des arceaux entremêlés. Certaines serres en verre n’ont pas résisté. Chez Saveol, trois quarts des serristes seraient concernés. Même constat à la Sica Saint-Pol-de-Léon. Dans les endroits les plus touchés, les agriculteurs se sentent désemparés. Le préjudice moral est réel.

En Normandie aussi, les difficultés se sont multipliées. D’après Laurent Hédoux, directeur de la production laitière de la coopérative les Maîtres Laitiers du Cotentin, entre 30 000 et 40 000 litres de lait ont été perdus chez les éleveurs. Du côté des producteurs de légumes, les précipitations font craindre le pire. « L’arrachage des carottes est impossible, témoigne Jean-Luc Leblond, maraîcher à Barneville-Carteret (Manche). Nous essayons de curer les parcelles pour que l’évacuation de l’eau se fasse rapidement, sans quoi les légumes pourriront. »

Catastrophe naturelle et calamités

La pluie et le vent sont montés jusque dans les Hauts-de-France. La vigilance rouge « crues et inondations » était encore de vigueur le 6 novembre dans le Pas-de-Calais. De nombreuses serres de maraîchage ont vu leurs bâches arrachées ou ont été inondées. Même chose pour les bâtiments d’élevage. « Une partie de ma stabulation a été remplie d’eau », témoigne Vincent Bertin, agriculteur à Bournonville (Pas-de-Calais). Il avait rentré ses vaches laitières la semaine précédant la tempête. Dans la région, des prairies sont encore inondées ainsi que des parcelles qui doivent être semées en blé. Des maïs pas encore récoltés, n’ont pas résisté au vent.

Le président de la République a promis le déclenchement rapide de l’état de catastrophe naturelle et du régime des calamités agricoles. Le sinistré dispose de dix jours, après publication de l’arrêté portant reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, pour signaler à son assureur la nature et l’importance des dégâts. Le régime des calamités agricoles permet aujourd’hui aux agriculteurs de bénéficier d’une indemnisation pour leurs pertes de fonds. Les pertes de récoltes seront prises en charge au travers du nouveau système d’assurance récolte. Tous les producteurs, y compris les non-assurés, pourront bénéficier de l’indemnité de solidarité nationale à partir d’un certain seuil de pertes. Le dégrèvement de la taxe sur le foncier non-bâti et le report de cotisations sociales seront également activés, assure le ministère de l’Agriculture.

Des dispositifs plus que nécessaires, alors que les agriculteurs ont souvent été les premiers de cordée pour dégager les routes, au nom de l’intérêt général.

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