La justice ne relie pas la malformation d'un enfant au glyphosate
Le tribunal de Vienne a jugé irrecevable, jeudi 31 juillet 2025, la demande des parents de Théo Grataloup, 18 ans, de lier ses malformations congénitales à l’exposition de sa mère, enceinte, au glyphosate.
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La mère de Théo, Sabine Grataloup, estime que le handicap de son fils, né avec l’œsophage et la trachée qui ne se sont pas séparés correctement, trouve sa source en août 2006 quand elle était enceinte et avait utilisé du Glyper, un générique de l’herbicide Roundup de Monsanto, à base de glyphosate, pour désherber une carrière d’équitation.
Convaincus du « lien de causalité » entre le glyphosate et le handicap de leur fils, les parents avaient lancé en 2018 une action au civil pour faire reconnaître ce lien par les tribunaux. L’audience s’est déroulée le 3 avril 2025 devant le tribunal judiciaire de Vienne (Isère).
Pas de preuve suffisante
Dans son jugement rendu en délibéré que l’AFP a pu consulter, le tribunal estime que la famille de Théo n’a pas apporté la preuve suffisante que du glyphosate a bien été utilisé par Mme Grataloup. Les déclarations de Mme Grataloup « ne sont confortées par aucune facture, ou autres pièces, propres à établir l’achat d’un bidon de Glyper au cours de l’été 2005 qui aurait pu être utilisé au cours de l’été 2006 », écrit le tribunal.
Il pointe aussi que les photographies produites par la famille d’un bidon de Glyper, utilisé par la mère de Théo et distribué par la société Novajardin, ne peuvent correspondre au produit acheté en 2005 car distribué par une autre société.
Ces éléments « ne permettent de retenir avec la certitude requise que ce désherbant était du Glyper », a conclu le tribunal, reconnaissant néanmoins que Bayer/Monsanto « pouvait être considéré comme étant le producteur ».
Bayer « prend acte »
« C’est évidemment une grande déception pour la famille Grataloup et pour nous. […] Ce dossier mérite d’être soumis à la cour d’appel », a indiqué le cabinet d’avocats de la famille, dans un communiqué.
De son côté, Bayer « prend acte du jugement […] qui n’a retenu aucune responsabilité à l’encontre du groupe. Cette décision intervient après plus de sept ans de procédure, dans un contexte humain douloureux, que l’entreprise n’a jamais ignoré ».
Dans un communiqué diffusé le 31 juillet, l’association Générations futures estime que cette décision « illustre les limites d’un système judiciaire qui exige une preuve impossible à apporter ». Elle estime que « ce procès, même s’il n’a pas abouti sur le plan judiciaire à ce stade, marque une avancée majeure sur le plan sociétal. »
Le glyphosate, herbicide le plus vendu au monde (800 000 tonnes en 2014), a été classé en 2015 comme un « cancérogène probable » par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L’Efsa, l’Autorité européenne de sécurité des aliments, quant à elle, n’a pas identifié de « préoccupation critique ». La substance active a été réhomologuée pour 10 ans en 2023.
Bayer, exposé à de nombreux litiges coûteux autour de ce produit, a publiquement douté de son avenir commercial au printemps.
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