L’Efsa (Autorité européenne de sécurité des aliments) a rendu ses conclusions sur l’évaluation des risques liés au glyphosate, matière active herbicide, ce jeudi 6 juillet 2023. Des résultats qui ont été communiqués à la Commission européenne et aux États membres afin d’éclairer la décision qu’ils prendront sur le maintien ou non du glyphosate dans la liste des substances actives approuvées pour une utilisation dans les pesticides au sein de l’Union européenne.

« L’évaluation des risques et l’examen par les pairs du glyphosate sont le fruit du travail de dizaines de scientifiques de l’Efsa et des États membres dans le cadre d’un processus qui s’est étalé sur plus de trois ans, a déclaré Guilhem de Seze, chef du département de l’Efsa chargé de l’évaluation des risques. Elle repose sur l’analyse de plusieurs milliers d’études et d’articles scientifiques, et intègre également les précieuses contributions recueillies lors de la consultation publique que nous avons organisée. »

Pas de préoccupation critique

L’Agence européenne indique ne pas avoir identifié de domaine de préoccupation critique lors de son examen de l’évaluation des risques associés à la substance active glyphosate en ce qui concerne les risques pour l’homme, pour l’animal ou pour l’environnement. « Une préoccupation est définie comme critique lorsqu’elle affecte toutes les utilisations proposées de la substance active en cours d’évaluation (par exemple utilisation avant les semis, utilisation après la récolte, etc.), empêchant ainsi d’office son autorisation ou le renouvellement de son autorisation », précise l’Efsa.

En 2022, l’Agence européenne des produits chimiques (Echa) avait déjà procédé à une évaluation des dangers du glyphosate et avait conclu que la substance ne présentait pas les critères scientifiques requis pour être classée dans la catégorie des substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction. L’Efsa a utilisé la classification de dangerosité de l’Echa aux fins de l’évaluation des risques du glyphosate par l’Union européenne.

Questions non résolues et en suspens

Parmi les questions non résolues figurent :

  • L’évaluation de l’une des impuretés du glyphosate,
  • L’évaluation du risque alimentaire pour les consommateurs ;
  • L’évaluation des risques pour les plantes aquatiques.

Les questions en suspens comprennent, de leur côté, un défaut d’information concernant la toxicité de l’un des composants présents dans la formulation de pesticides à base de glyphosate qui a fait l’objet de l’évaluation, informations qui sont nécessaires pour conclure l’évaluation des risques liés à la formulation dans le cadre de ses utilisations représentatives. « Pour cette formulation, il n’existe toutefois pas d’indication de toxicité aiguë ou de génotoxicité », souligne l’Efsa.

Biodiversité

En ce qui concerne la biodiversité, les experts ont reconnu que les risques associés aux utilisations représentatives du glyphosate sont complexes et dépendent de facteurs multiples. Ils ont également constaté l’absence de méthodologies harmonisées et d’objectifs de protection spécifiques convenus de commun accord. De façon générale, les informations disponibles ne permettent pas de tirer des conclusions définitives sur cet aspect de l’évaluation des risques et les gestionnaires des risques pourraient envisager des mesures d’atténuation.

En ce qui concerne l’écotoxicologie, le corpus de données disponibles a permis d’adopter une approche prudente en matière d’évaluation des risques, approche qui a mis en évidence un risque élevé à long terme pour les mammifères dans 12 des 23 utilisations proposées du glyphosate. « Les conclusions devraient être publiées avant la fin du mois de juillet 2023 et les documents de référence, qui comptent plusieurs milliers de pages, devraient être publiés entre la fin du mois d’août et la mi-octobre 2023 », stipule l’Agence européenne.

Comme ailleurs dans le monde

La Plateforme Glyphosate France qui représente les principales entreprises commercialisant en France des préparations phytosanitaires à base de glyphosate indique dans un communiqué diffusé ce 6 juillet 2023 avoir pris connaissance des conclusions de l’Efsa.

Selon la plateforme, l’agence « confirme les conclusions des autorités sanitaires du monde entier qui étudient le glyphosate depuis 50 ans ». Elle ajoute : « La conclusion de l’Efsa représente une étape cruciale de la procédure de renouvellement de l’approbation, puisqu’elle marque la fin de la phase scientifique de l’évaluation. La décision finale — attendue pour le dernier trimestre de 2023 — appartient maintenant à la Commission européenne et aux États membres. »

C’est pourquoi la Plateforme Glyphosate France s’en remet à la Commission européenne et aux États membres pour fonder leur décision sur les recommandations scientifiques de l’Efsa, « permettant aux agriculteurs européens de continuer à disposer du glyphosate pour les usages où il n’existe pas d’alternative et pour les pratiques agricoles durables ».

Lettre à la Première ministre

« Une trentaine d’organisations de la société civile (1) mobilisée depuis des années sur ce sujet, avec plus d’un demi-million de citoyens et de citoyennes via leur pétition commune, exigent que la France joue un rôle moteur et sans ambiguïté pour faire interdire en 2023 le glyphosate en Europe, rapporte en revanche Générations Futures dans un communiqué du 6 juillet 2023. Alors que des doutes subsistent sur la position que portera la France au niveau européen, il est urgent d’en finir avec cette substance classée « cancérogène probable » pour l’homme, par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC/ONU). »

Dans une lettre remise le 5 juillet à la Première ministre, ces organisations ont rappelé « tous les effets néfastes avérés de cet herbicide » ainsi que les raisons pour lesquelles la France et plus largement l’Union européenne ne devraient pas autoriser cette substance.

(1) Agir pour l’environnement, Alerte des médecins sur les pesticides, Amis de la Terre, Attac France, Bio Consom’acteurs, Bloom, Cantine sans plastique France, CCFD-Terre Solidaire, Commerce équitable France, Confédération paysanne, Ekō, Fnab, Fondation pour la Nature et l’Homme, Foodwatch France, France Nature Environnement, Générations Futures, Greenpeace France, Ingénieurs sans frontières agriSTA, Institut Veblen, Justice Pesticides, Ligue des droits de l’Homme, Noé, Notre affaire à tous, Réseau Action Climat, Réseau Environnement Santé, Resolis, Secrets toxiques, SOL, Terre & Humanisme, Terre d’abeilles, Union nationale de l’apiculture française, Vrac, WECF France, WeMove Europe.