L'agriculture veut attirer les personnes éloignées de l’emploi
Face aux difficultés de recrutement du monde agricole, l’Anefa espère dénicher des profils auprès des personnes éloignées de l’emploi. Mais les accompagnateurs de l’emploi doivent encore appronfondir leur connaissance du secteur.
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« Sur l’année 2024, un tiers des employeurs ont rencontré des difficultés de recrutement. » Le constat tiré par l’Anefa (Association nationale paritaire pour l’emploi et la formation en agriculture), au Salon de l’agriculture ce mercredi 26 février 2025, illustre un sentiment déjà présent sur les exploitations. Quand il s’agit de recruter, que ce soit via les canaux institutionnels comme sur la plateforme de l’Anefa, par le bouche-à-oreille ou via les réseaux sociaux, le bilan est le même : l’agriculture peine à attirer de nouveaux talents.
Parfois les moyens manquants sont surtout matériels : certaines personnes éloignées de l’emploi sont sans solution d’hébergement ou moyen de locomotion. C’est là le premier axe d’attaque de l’association durant l'année 2024. Dans le Limousin, neuf cars ont transporté 450 saisonniers pour la cueillette des pommes. Dans les Pyrénées, du covoiturage et de la location de voiture a été mis à la disposition des vendangeurs. Car l’emploi de saisonniers est un véritable « tremplin » pour l’emploi de longue durée. En 2024, un tiers des CDI sont d’anciens salariés de saisonniers, se félicite Dominique Boucherel.
Communiquer auprès des publics éloignés
Pour l’association paritaire, recruter revient aussi, plus largement à faire découvrir le monde agricole aux personnes éloignées de l’emploi et des campagnes. Jeunes dans les quartiers prioritaires de la ville, demandeurs d’emploi, adolescents déscolarisés, réfugiés… L’association multiplie les actions de sensibilisation au métier agricole et à l’alimentation dans les régions.
En Normandie, un projet accueille neuf volontaires de 20 à 36 ans en partenariat avec France Travail et les missions locales. Pendant six mois, les volontaires se lancent dans la mise en place d’un marché éphémère durant l’été avec des agriculteurs. Le projet global englobe tout à la fois l’alimentation, les circuits-courts et la reprise de confiance en soi pour ces personnes en précarité. Mais l’objectif est bien là : « susciter des vocations ultérieures avec la finalité ultime : créer un parcours professionnel en agriculture », espère Nicolas Savary, directeur général de l’Anefa.
En Gironde, des cours de français avec du vocabulaire spécifique au secteur devraient permettre à huit réfugiés de travailler dans des entreprises viticoles. Dans les Pays de la Loire, ce sont des parcours de découverte des métiers agricoles qui sont proposés. Les visites d’exploitation s’organisent et les ateliers sur les gestes professionnels sont mis en place.
« Pour embaucher X personnes, c’est bien souvent le double qu’il faut contacter », affirme Nicolas Savary, bien conscient des difficultés du retour vers l’emploi de ces personnes précarisées.
Faire front commun
Mais comment recruter quand mêmes les institutions tournées vers l’accompagnement à l’emploi « ne connaissent pas » les spécificités du monde agricole, comme le reconnaît Thibaut Guilluy, directeur général de France Travail à l’occasion d’une conférence sur le sujet avec l’Anefa et les autres organismes de l’emploi agricole (Apecita, Vivea et Ocapiat). « Il faut qu’on fasse connaître la diversité des métiers et des opportunités dans le monde agricole. »
Actuellement, les agriculteurs qui ont recours à France Travail pour recruter notent à 73% leur satisfaction avec l’organisme. Un chiffre en hausse de 5 points, mais encore derrière le pourcentage de satisfaction des entreprises générales : 87%. « Il y a encore énormément de gens qui ne passent pas par nous », regrette Thibaut Guilluy, pour qui la connaissance du monde agricole au sein de France Travail doit être « la première des priorités ».
Les pistes de l’Anefa pour fidéliser ses salariés (28/02/2024)
Visites d’exploitation, repas avec les agriculteurs… Déjà, des rencontres sont prévues ici et là sur les territoires entre les accompagnateurs de l’emploi et le monde agricole pour approfondir leur connaissance du secteur.
« Maintenant on ne peut plus faire l’économie de travailler en silo », assure Laurent Paillat, secrétaire général de l’Anefa. L’organisme a d’ailleurs annoncé signer une convention pour unir ses forces avec les autres structures de l’emploi agricole lundi 24 février.
La moitié des salariés bientôt à la retraite
Car il y a urgence. Comme la moitié des agriculteurs arriveront à l’âge légal de la retraite dans les prochaines années, « près de 52% des salariés agricoles en CDI ont plus de 56 ans », observe Dominique Boucherel, président de l’Anefa et salarié agricole en service de remplacement.
L’agriculture souffre d’une image négative de travaux fatigants, se désole Laurent Paillat. « On pense encore qu’on est toute la journée avec une fourche à sortir des brouettes de fumier ! avance le responsable d’une ferme maraîchère mi-amusé, mi-désabusé. Sur mon entreprise, les brouettes de récolte de courgettes avancent à la vitesse des cueilleurs désormais. Aujourd’hui, on a de l’intelligence artificielle, on a de la technologie ! »
Exit les clichés du siècle précédent. Au Salon de l'agriculture, l’emploi agricole a bien décidé de communiquer sur l’agriculture 2.0 pour attirer de nouveaux publics.
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