Les « faiblesses importantes » de la stratégie européenne sur la bio
La Cour des comptes européenne a sorti un rapport sévère sur la stratégie de l’Union européenne pour l’agriculture biologique et donne plusieurs pistes.
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Des « lacunes », des « incohérences », « pas d’objectifs adéquats et quantifiables », un marché de « niche », … Le 23 septembre 2024, la Cour des comptes de l’Union européenne (UE) a passé en revue, dans un rapport, la politique européenne sur l’agriculture biologique et le bilan n’est pas positif. Pour les auditeurs, les milliards d’aide investis n’ont pas été permis de bien développer la filière. L’objectif d’atteindre 25 % des surfaces européennes en agriculture biologique d’ici à 2030 serait d’ores et déjà « hors de portée ».
La filière dans sa globalité
La Cour des comptes européenne ne s’est pas contentée de faire une photographie de la conjoncture, mais a décrypté les principaux facteurs qui ont conduit à la situation actuelle. Keit Pentus-Rosimannus, membre de la Cour qui a conduit cet audit, recommande ainsi de ne pas uniquement orienter les aides vers la production mais de considérer la filière dans sa globalité, y compris par la « stimulation de la demande ».
« Nous ne critiquons pas l’objectif de 25 % des surfaces en bio. Le problème est que la bio n’est pas appréhendée dans son ensemble », plaide-t-elle. « Nous risquons de créer un système déséquilibré entièrement dépendant des fonds de l’Union européenne, plutôt qu’une activité prospère, portée par des consommateurs avertis, ajoute Keit Pentus-Rosimannus La bio ne peut pas fonctionner de façon isolée. Le manque d’outils de transformation est par exemple un problème ».
Des critiques sur les pratiques soutenues
Les auditeurs insistent sur les 12 milliards d’euros de la Pac dépensés entre 2014 et 2022 et les 15 milliards de la Pac jusqu’à 2027 dédiés à la bio. « Nous ne disons pas de dépenser plus ou moins mais avec l’énorme pression financière actuelle, c’est primordial que chaque euro soit le mieux dépensé possible » précise Keit Pentus-Rosimannus. Autre écueil, le manque de visibilité sur le long terme. « Les agriculteurs n’ont pas d’indications sur la suite donnée au plan d’action européen. Ce serait bien qu’ils aient plus de certitude au-delà de 2030 », appuie-t-elle.
Autre observation, les différences de pratiques à travers l’Europe avec des agriculteurs « qui peuvent bénéficier de fonds européens même s’ils n’appliquent pas les normes relatives à la rotation des cultures ou au bien-être animal, qui sont pourtant des principes fondamentaux de l’agriculture biologique » notent les auditeurs. Mihaela Văcărașu, auditrice également, remarque que par endroits, « certains agriculteurs convertissent leurs pâturages à la bio sans convertir leurs animaux faute de débouchés ». Dans le rapport, la Cour des comptes regrette également « qu’il était courant, moyennant l’obtention en toute légalité d’une autorisation, d’utiliser des semences non biologiques pour des plantations biologiques ».
« Les fonds de la Pac ont été utilisés pour accroître la superficie des terres cultivées selon le mode de production biologique, sans tenir suffisamment compte des objectifs environnementaux et de marché fixés dans la politique de l’Union européenne en matière d’agriculture biologique », conclut le rapport.
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