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Marché des grains Les cours des céréales stagnent

Entre les fortes disponibilités de cette fin de campagne et les incertitudes géopolitiques en mer Noire, les prix des céréales ont peu évolué.

Tallage, cabinet d’études spécialisé dans les marchés des céréales, oléagineux et protéagineux, nous livre son analyse hebdomadaire.

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Les prix des céréales ont peu évolué durant la semaine du 1er au 5 mai 2023, tiraillés entre les disponibilités abondantes sur cette fin de campagne et les incertitudes géopolitiques en mer Noire. Les cours des oléagineux continuent de reculer, sous la pression du marché pétrolier et d’une demande morose en huiles et en tourteaux.

Les prix des blés français stoppent leur baisse

Une fois n’est pas coutume, les prix des blés français n’ont pas baissé cette semaine. Pourtant, ils se sont repliés en début de semaine avant de se raffermir ces derniers jours. Le blé rendu Rouen s’affiche ainsi à 230,5 €/t et celui rendu La Pallice s’élève à 231,5 €/t. Les prix sur le rapproché avaient subi, jusqu’à il y a peu, la pression des fortes exportations russes et d’une demande mondiale assez faible. Cependant, ils marquent un léger rebond en cette fin de semaine, rattrapés par le risque géopolitique.

En effet, la question du renouvellement du corridor maritime ukrainien, prenant fin le 18 mai, est toujours en cours de négociations, tandis que la tension est encore montée d’un cran dans le conflit entre l’Ukraine et la Russie. Une bonne partie des stocks mondiaux étant concentrés en Russie, l’évolution de la situation géopolitique reste un facteur déterminant pour le marché céréalier. En outre, la Commission européenne a validé l’interdiction des importations de céréales de l’Ukraine vers ses pays limitrophes jusqu’au 5 juin, autorisant uniquement le transit.

Sur la nouvelle récolte, le rendu Rouen s’affiche à 236 €/t (plus cher que la récolte de 2022), mettant en relief les importants stocks de blé en Europe et dans le monde sur cette fin de campagne, alors que les inquiétudes géopolitiques pèsent davantage sur la nouvelle campagne. Étant devenus un peu moins chers par rapport aux blés russes à la fin du mois dernier, les prix français stoppent leur baisse. Les blés russes affichent même une baisse de 12 $/t sur une semaine, à 254 $/t Fob (pour 11,5 % de protéines), tandis que le blé Fob Rouen remonte légèrement à 269 $/t.

Les marchés traversent donc une période de flottement qui pourrait être plus ou moins longue. Ils sont tiraillés entre des stocks abondants sur cette fin de campagne et les incertitudes géopolitiques en mer Noire.

Les perspectives des récoltes de blé sont mitigées

Les perspectives des récoltes de blé restent bonnes dans la majeure partie de l’Europe ainsi que dans l’ouest de la Russie. L’Afrique du Nord et l’Espagne sont en revanche toujours en proie à une sécheresse importante. En Amérique du Nord, les potentiels de rendements des blés d’hiver sont toujours amoindris, tandis que les semis de printemps ont été retardés par les pluies excessives.

À l’inverse, les conditions de semis des blés de printemps dans le centre de la Russie et au Kazakhstan sont très sèches. Ainsi, le marché est en attente d’une clarification des perspectives de production. Si la récolte mondiale peut toujours atteindre un niveau élevé, les perspectives de bons rendements sont moins évidentes qu’il y a encore quelques mois.

Les orges françaises marquent aussi une pause

Cette semaine, l’orge fourragère rendue Rouen a peu évolué et se situe à 210 €/t. L’orge Fob Rouen a, quant à elle, gagné 1 $/t, à 246 $/t (base : juillet). Les prix des orges évoluent en sympathie avec ceux du blé. L’origine australienne diminue en revanche de 5 $/t, à 263 $/t, et regagne en compétitivité par rapport aux orges françaises.

L’écart entre ces deux origines s’était creusé en raison du regain d’optimisme du marché lié à la possible levée des taxes chinoises sur les importations d’orge australienne. Cependant, les informations au sujet de ces discussions se font rares depuis trois semaines. Les orges russes ont également baissé de 5 $/t, à 228 $/t. À noter que, comme pour le blé, les cotations de la nouvelle récolte sont plus élevées que sur l’ancienne (218 €/t rendu Rouen pour la récolte de 2023).

Du côté des affaires, comme c’est le cas depuis plusieurs semaines, il y a peu d’activité. À noter, un seul achat de 60 000 tonnes d’orge fourragère de la Jordanie le 3 mai, à la suite d’un appel d’offres pour 120 000 tonnes. Le 4 mai, la Tunisie et la Jordanie ont émis un appel d’offres d’orge fourragère, de respectivement 75 000 tonnes et 120 000 tonnes.

Sur le segment brassicole, il n’y a pas de cotation pour la récolte de 2022 cette semaine. Pour la récolte de 2023, les orges brassicoles d’hiver et de printemps baissent de 7 €/t, à respectivement 240 et 260 €/t.

Le colza sous la pression du pétrole

Depuis la semaine dernière, le prix du colza français a cédé du terrain sur le marché physique et à terme. Rendu Rouen, la graine française a diminué de 2 €/t, à 430 €/t sur les contrats de juillet-septembre. Sur Euronext, le prix du colza nouvelle récolte recule également de 2 €/t, à 438 €/t (base : août).

Plusieurs éléments ont tiré le cours du colza vers le bas, à commencer par la tendance baissière du marché du pétrole. Le baril de l’or noir se négocie désormais sous la barre des 70 dollars américains, en recul de 8 % sur une semaine. Depuis la mi-avril, le pétrole a perdu plus de 20 % de sa valeur. Cela s’explique principalement par le contexte macroéconomique morose et les risques accrus de ralentissement économique aux États-Unis et en Chine. La dépréciation du pétrole a été également renforcée par le sursaut des inquiétudes sur les marchés financiers à la suite de la chute de la « First Republic Bank » aux États-Unis.

Dans les champs, les conditions de culture sont pour le moment favorables aux colzas chez les principaux producteurs européens. La récolte européenne, et française, reste pour le moment prévue au plus haut niveau par rapport aux cinq dernières campagnes. En outre, les stocks de colza (ancienne récolte), ainsi que ceux de l’huile de colza toujours conséquents, continuent de peser sur les prix. Leur baisse était toutefois limitée par les incertitudes toujours présentes quant à la prolongation de l’accord sur les exportations des produits agricoles ukrainiens au-delà du 18 mai.

L’expédition des bateaux au départ de l’Ukraine est déjà fortement perturbée par le retard dans leurs inspections. Une fermeture du corridor devrait en effet entraîner une baisse significative des disponibilités en huile de tournesol sur le marché mondial et doperait par conséquent la demande en huile de colza.

Signalons également que le 2 mai, la Commission européenne a décidé l’interdiction jusqu’au 5 juin d’importer des produits agricoles ukrainiens (blé, maïs, colza et tournesol) dans cinq pays européens frontaliers de l’Ukraine. Cette mesure ne devrait pas impacter le marché du colza pour la campagne en cours, les achats étant en grande partie déjà réalisés. Cependant, en cas d’une prolongation de cette interdiction sur la nouvelle campagne, les achats de l’Union européenne pourraient être nettement réduits.

Au Canada, le temps trop humide retarde les semis de canola. Les pluies attendues au mois de mai devraient limiter davantage les travaux sur les prochaines semaines. D’autre part, la demande en graines de l’ancienne récolte reste relativement importante alors que les stocks des agriculteurs s’amenuisent. Ces éléments ont soutenu les prix du canola en ancienne et en nouvelle récoltes, qui remontent de 5 $/t et 8 $/t respectivement.

Léger repli des cours du tourteau de soja

Les cours mondiaux du tourteau de soja ont légèrement reculé cette semaine. Les bonnes perspectives de l’offre mondiale et une consommation plutôt atone font toujours pression sur ces cours. Ainsi, le prix à Montoir-de-Bretagne a perdu 9 €/t sur le rapproché, pour s’afficher à 481 €/t. Dans l’Union européenne, la demande de tourteaux de soja reste faible du fait de sa perte d’attractivité dans les rations animales, face aux céréales et aux tourteaux concurrents plus compétitifs. La chute des effectifs dans les élevages de volailles et de porcs pèse également sur la consommation totale du secteur animal.

D’autre part, une production record de soja est toujours attendue au Brésil, principalement dans la région du Mato Grosso, qui représente le plus grand bassin de production du pays. Les bonnes précipitations dans cet État ont en effet permis un bon développement des plantes, contribuant à d’excellents rendements. Cela devrait largement compenser la mauvaise récolte prévue au Rio Grande do Sul, où les cultures ont subi un fort déficit hydrique.

Par ailleurs, un climat d’incertitude plane sur la demande mondiale, provoqué par les craintes de ralentissement économique aux États-Unis et en Europe, ainsi qu’en Chine désormais. Le cours du porc chinois poursuit sa baisse depuis le mois de mars, mettant à mal la rentabilité des élevages.

Le prix US a lui reculé de façon plus mesurée cette semaine, perdant 1 $/t sur le rapproché à 471 $/t. La progression des semis de soja aux États-Unis fait toujours pression sur les cours de la fève et par ricochet sur celui du tourteau. Près de 19 % des surfaces ont été ensemencées au 30 avril, contre une moyenne quinquennale de 11 %, à la même période. Les conditions météorologiques ont été favorables à l’avancement des travaux dans plusieurs États, notamment dans le sud et le centre du pays. La tendance baissière a toutefois été limitée par le rythme de trituration qui s’avère toujours très dynamique. En mars, la trituration américaine a progressé de 12 % sur un mois, et de 2,6 % sur un an.

À suivre : corridor maritime en Ukraine, restrictions d’importations dans l’est de l’Union européenne, climat en Amérique du Nord (semis de blé de printemps, de maïs, de soja et de canola), en Europe (toutes cultures), conditions de croissance du maïs au Brésil, prix du pétrole, parité euro/dollar américain, situation économique mondiale, situation des marchés financiers.

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