Volailles : de plus en plus de difficultés à l'installation
Lors d'une table-ronde organisée le 11 octobre à l'occasion de l'assemblée générale la Confédération française d’aviculture, éleveurs et représentants politiques ont évoqué la multiplicité des difficultés à l’installation des producturs de volailles.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
« Alors que la volaille française est plébiscitée par plus de 90 % de la population, nous nous heurtons constamment et de plus en plus à de nombreuses difficultés de construction de poulaillers », déclare Jean-Michel Schaeffer, président de la Confédération française de l’aviculture (CFA).
Une table-ronde organisée lors de l’assemblée générale du syndicat le 11 septembre 2023 à Paris vient poser la question de la place des élevages avicoles dans notre société et des difficultés à l’installation rencontrées par les éleveurs.
La complexité de monter des projets
Tristan, éleveur de volailles de chair, témoigne des vents contraires rencontrés lors de son installation hors cadre familial. Après avoir acquis des parcelles dans un petit village du Maine-et-Loire et obtenu son autorisation d’exploiter en 2013, il suit la règlementation et ouvre un dossier d’enquête publique. Au 364e jour d’ouverture de l’enquête publique, veille de sa clôture, des voisins ayant pour projet une résidence secondaire à proximité de l’élevage contestent le projet. Envisager de perdre son autorisation d’exploiter alors que les investissements ont été faits, « c’est très très éprouvant psychologiquement », raconte l’éleveur.
Aujourd’hui, la situation est loin de s’améliorer. De plus en plus souvent, les banques n'acceptent de financer la construction d'un bâtiment que si le projet ne fait pas l’objet d’un recours. « Ce qui était compliqué il y a dix ans est à peu près à la limite du possible aujourd’hui », ajoute Tristan. Les éleveurs présents dans la salle sollicitent des solutions face à la complexité de monter des projets de construction. « Le tunnel est de plus en plus long » complète l’éleveur de volailles, et « ça fait peur à beaucoup de jeunes qui veulent s’installer ».
Le défi de l’attractivité de la filière
Le sujet de l’installation est un point essentiel pour assurer la pérennité de la filière, et répondre aux enjeux de souveraineté alimentaire. Pour le président de la CFA, « à l’arrivée à la retraite d’un grand nombre d’éleveurs dans les prochaines années, si nous empêchons les jeunes éleveurs de reprendre les exploitations agricoles existantes et de réaliser de nouveaux projets de construction, alors c’est toute une filière d’élevages que l’on va fragiliser, ainsi que notre sécurité alimentaire ».
Selon Matthieu, éleveur de volailles sous label, sur les métiers de la filière « on manque d’attractivité, parce qu’on a un croisement entre la contrainte technique, la contrainte du temps et l’astreinte qu’il faut y mettre, qui ne sont pas en corrélation avec la rémunération permise ». Depuis une dizaine d’années, « la rémunération n’a pas évolué par rapport à l’inflation », souligne-t-il. Par ailleurs, les crises successives d’influenza aviaire viennent rajouter des obstacles aux potentiels futurs éleveurs. Installé dans les Landes, il explique que très peu de jeunes s’installent, « tout simplement parce qu’en termes de levier pour lutter contre ce fléau les éleveurs sont un peu démunis ». Il estime que la vaccination pourrait permettre de franchir ce cap, et encourager d’autres jeunes à venir s’installer.
Top départ à la vaccination contre la grippe aviaire (02/10/2023)
Mieux communiquer sur l’élevage et limiter les recours abusifs
Autre levier pour favoriser les installations, celui de simplifier les procédures et de limiter les recours juridiques aux autorisations d’exploiter. Celles-ci sont longues à obtenir et sont parfois sujettes à des remises en cause. « Il faut trouver les voies et moyens de protéger juridiquement les projets de construction de bâtiments. Il n’est pas acceptable que lorsqu’un projet est dans les clous avec le tampon du préfet qu’il y ait encore des possibilités incessantes de recours », affirme Jean-Michel Schaeffer.
Yves-Marie Beaudet, président de l’interprofession des œufs (CNPO), tient à adresser une demande aux députés présents lors de la table-ronde : « On attend de vous, en tant que parlementaires, d’être à l’écriture de textes et d’amendements pour sécuriser un peu plus nos autorisations d’exploiter qui font tout un parcours dans l’Administration, et qu’elles ne puissent pas être remises en cause pour des questions environnementales. »
Pour Pascal Lavergne, député de la Gironde et coprésident du groupe de suivi du pacte et loi d’orientation et d’avenir agricoles (PLOA), la « demande est légitime : aujourd’hui, les procédures sont longues, compliquées et souvent sujettes à attaques, à interprétation sur des détails ». Il reconnaît la nécessité de « simplifier les choses », afin de répondre aux enjeux de la filière et de souveraineté alimentaire, et encourage les professionnels à transmettre leurs sollicitations, ayant besoin de leur pression pour les relayer.
Autre point à ne pas négliger, la communication positive sur l’agriculture, afin d’informer les citoyens, et surtout d’éviter les contre-vérités sur l’élevage. Les pouvoirs publics ont un rôle à jouer, alors que le député de la Gironde constate entendre trop souvent « des détracteurs de l’agriculture ». Or les citoyens ont besoin d’informations positives, il faut qu’ils « comprennent que pour manger, il faut des agriculteurs qui produisent pas loin de chez eux ». Alors que plus d’un poulet sur deux consommé en France est importé, l’enjeu de souveraineté alimentaire de la France nécessite de « reconstruire la vraie image de l’élevage pour nous-mêmes mais également pour nos concitoyens », complète Jean-Michel Schaeffer, « pour mieux faire accepter l’élevage ».
Pour accéder à l'ensembles nos offres :