Le contrat entre éleveurs et vétérinaires, un gage de « sérénité »
Lors d’une journée consacrée au maillage des vétérinaires ruraux, praticiens et éleveurs de ruminants ont loué les avantages du forfait de soins et de suivi du troupeau. Une démarche encore peu répandue, qui implique un changement de paradigme dans la relation entre les vétérinaires ruraux et leurs clients.
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« Les relations entre éleveurs et vétérinaires sont à réinventer », assure Matthieu Mourou, président du conseil régional de l’Ordre des vétérinaires de la Nouvelle-Aquitaine, lors d’une journée sur le maillage vétérinaire et le forfait de soins et de suivi des ruminants, organisée dans les locaux de Chambres d’agriculture France le mercredi 17 avril 2024, à Paris. Pour le praticien, « les maillages des vétérinaires et des éleveurs sont en souffrance. Des seuils d’alerte sont tous les jours dépassés. »
En individuel ou en conventionnement
Afin d’y remédier, la piste de la contractualisation entre les deux parties est regardée de près. « Il faut distinguer la contractualisation individuelle du conventionnement », insiste Matthieu Mourou. La première consiste en un contrat différent entre une clinique vétérinaire et chacun de ses clients éleveurs. Le second est un contrat unique entre une association d’éleveurs et une clinique vétérinaire.
Les deux formules induisent l’existence d’un forfait, qui s’apparente à un abonnement. « Cela sous-entend un engagement bilatéral, un paiement échelonné sur l’année et un service parfois partiellement préformaté comme le suivi de reproduction », expose le président du conseil régional de l’Ordre des vétérinaires de la Nouvelle-Aquitaine.
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« Je passais à côté de quelque chose »
Vétérinaire rural dans le Finistère, Frédéric Arzur a opté pour la contractualisation individuelle avec une partie de sa clientèle, dans laquelle il inclut le suivi de reproduction, l’insémination et le parage. « Le déclic est venu d’une garde que j’ai effectué un 15 août. Le lendemain, je suis intervenu sur une vache qu’un éleveur avait fait vêler la veille. Il n’avait pas appelé pour éviter le tarif de garde. Le veau était mort et le pronostic était sombre pour la mère. Au final, ça lui a coûté beaucoup plus cher, et j’ai vraiment eu le sentiment que nous passions à côté de quelque chose. »
À la différence de la plupart des contrats en conventionnement, Frédéric Arzur ne se base pas sur un effectif mais sur un nombre de vêlages. « L’essentiel du travail se situe en péri-partum », observe-t-il. Financièrement, le praticien s’y retrouve. Concernant la vente de médicaments, « même en forfait, on doit rester dans le marché et avoir des marges cohérentes », insiste Olivier Crenn, vétérinaire rural dans la Mayenne ayant lui aussi établi des contrats avec ses clients.
Un investissement et non un coût
Du côté des éleveurs, le bilan est aussi positif. « Le vétérinaire vient une fois par mois, mais je peux l’appeler quand j’en ai besoin, témoigne Sébastien Landais, à la tête de 100 vaches laitières dans la Mayenne. J’ai largement gagné en sérénité. Dire « à bientôt » à mon vétérinaire ne me dérange plus ! ». Pour Julien Le Tual, vétérinaire en Ille-et-Vilaine, « le vétérinaire n’est ainsi plus perçu comme un coût mais comme un investissement. On aide à réduire les pertes et à faire progresser les résultats zootechniques. »
Nathalie Bareille, enseignante-chercheuse à l’école vétérinaire de Nantes (Oniris), a réalisé un travail de modélisation de l’impact économique du forfait de soin en élevage. « Le seuil de rentabilité est atteint au plus tard en trois ans », affirme-t-elle. Pour Frédéric Arzur, « cela crée aussi un plus grand climat de confiance entre éleveurs et vétérinaires. C’est agréable au quotidien ».
La contractualisation sera-t-elle la planche de salut pour l’activité rurale en médecine vétérinaire ? « Pour l’heure, aucun lien scientifique n’a été fait entre l’existence de contrats et un meilleur maillage de vétérinaires ruraux, constate Florence Beaugrand, maître de conférences à Oniris. Mais cela permet aux praticiens de retrouver du sens à leur travail. »
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