L’avenir de Vincent Verschuere, éleveur à Saint-Aubin-en-Bray dans l’Oise, a été scellé hier, le 7 décembre 2023. La Cour de cassation a confirmé sa condamnation, estimant que les bruits et odeurs des vaches laitières « excédaient, par leur nature, leur récurrence et leur intensité, les inconvénients normaux de voisinage ». Une décision de justice que La France Agricole a pu consulter, qui « met un sacré coup au moral » de l’agriculteur.
Pas de mots mais comme vous l'aurez tous compris, de nombreux articles en font état la décision de cassation est tombé et malheureusement elle n'est pas en notre faveur! Cette décision est donc devenu définitive mes voisins pourront bien garder ces 106000€.
— vincent verschuere (@vincentversch21) December 7, 2023
Des travaux à financer et un prêt à rembourser
« Les chances d’une issue favorable étaient limitées, concède Vincent Verschuere ce 8 décembre 2023 au matin. Mais je suis forcément déçu car la procédure de dommages et intérêts est close. » La décision de la troisième chambre civile de la Cour de cassation contraint l’agriculteur à rembourser les 70 000 euros de prêt bancaire personnel qu’il a contractés pour verser 106 000 euros de dommages et intérêts aux plaignants. « C’est un poids supplémentaire », concède-t-il, qui s’ajoute au coût des futurs travaux d’aménagement du bâtiment à l’origine des plaintes.
En 2010, Vincent Verschuere a construit sur son exploitation veille de quatre générations d’agriculteurs, un hangar de 2 800 m² situé entre vingt-et-un et quatre-vingt-seize mètres de vingt-deux habitations. Au premier ou au deuxième trimestre de 2024, le tribunal de grande instance de Beauvais décidera des aménagements à prévoir pour limiter les troubles de voisinage. « J’ai déjà fait des propositions, comme isoler les murs du côté des riverains et installer une ventilation artificielle », explique-t-il.
Le patrimoine sensoriel « balayé » par le juge
Son avocat Timothée Dufour ne cache pas son « immense déception ». Avant le rejet du pourvoi, l’avocat engagé auprès de nombreux agriculteurs expliquait à La France Agricole qu’il voulait « faire de cette affaire isolée, une affaire à enjeu national. Nous voulons sensibiliser la Cour de cassation de l’impact d’une telle décision sur le monde agricole. » Sa stratégie reposait notamment sur la loi du 29 janvier 2021 relative au patrimoine sensoriel des campagnes françaises, que la cour d’appel a finalement « balayée ».
Une stratégie qui n’a donc pas payé pour Vincent Verschuere, mais qui pousse l’avocat à se tourner vers l’avenir. « Cette affaire est un blanc-seing, assure-t-il à La France Agricole ce 8 décembre 2023. Car on a l’illustration concrète qu’il faut faire bouger les lignes. Le législateur doit prendre ses responsabilités et aller encore plus loin » sur les questions de litiges en milieu rural. Selon lui, la proposition de loi (PPL) sur les troubles anormaux de voisinage votée à l’Assemblée nationale le 4 décembre dernier va répondre à cet enjeu en dégageant la responsabilité de l’auteur des nuisances et non plus seulement en déterminant s’il y a nuisances ou non.
Cette PPL « ne me servira malheureusement plus, déplore l’éleveur de 34 ans qui fait partie de la longue liste des agriculteurs accusés de nuisances, mais malgré moi, mon procès pour troubles de voisinage est devenu un symbole. »