C’est lors d’une banale discussion autour d’un café que Florent Agnoletti, éleveur bovin dans l’Ain, a découvert ce qui allait se révéler comme « une des meilleures rencontres de [sa] carrière ». Durant l’hiver 2022-2023, il raconte à un ami agriculteur comment il en « peux plus » d’être « à la bourre » dans l’administratif. « Il me dit ‘on a une fille qui vient, c’est formidable, je te donne sa carte !’ », raconte l’éleveur, un matin ensoleillé de début novembre. Sur le carton en question, Laurine Mottaz, consultante administrative indépendante et une phrase « quand la paperasse vous dépasse ».
« J’ai réfléchi deux-trois mois et puis un jour j’en pouvais plus, je me suis dit "l faut que je lui téléphone" », se souvient Florent. Seul sur l’exploitation avec 180 animaux, soit « une ferme trop importante pour une personne, mais pas assez de revenus pour deux », l’administratif finit vite par être la dernière tâche sur une longue liste de choses à faire.
Après un premier contact par téléphone, Laurine vient sur la ferme. « Quand elle a vu la montagne de papiers sur mon bureau, elle a dit ‘d’accord’mais ça ne l’a pas choqué. Je pense qu’elle doit avoir l’habitude » sourit Florent. Il lui trouve rapidement une qualité essentielle. « C’est quelqu’un qui ne juge pas. Je n’ai aucun problème avec ça mais je comprends que quelqu’un ait du mal à ouvrir sa comptabilité ».
« Elle m’a demandé comment je travaillais et on a trié les papiers » avec un système de tri qui lui convenait : « les bannettes ». Il a renouvelé ces rendez-vous quatre à cinq fois par an, pris d’une fois sur l’autre. Pendant ces derniers, ils ouvrent le courrier, font les règlements et vérifient les factures. Ils reconfigurent l’imprimante, mettent à jour tous les espaces personnels : « la MSA, la coopérative… et on note les mots de passe ! » Toutes ces petites tâches du bureau qui peuvent vite prendre des heures… Et la tête avec.
« Je vais apprendre quelque chose »
Même si « ce n’est pas ça qui [lui] a redonné goût aux papiers », « je sais que ce sera une demi-journée productive, observe Florent, Elle a une organisation. On va aux papiers sans stress, il y a moins d’appréhension. »
Surtout quand seul, on est vite dérangé par les visites et les coups de fil. La preuve en est : en une heure d'échanges, le téléphone résonne plusieurs fois ce matin-là. Nouvelles réglementations, conseils sur l’organisation ou aides de l’État… « C’est toujours une discussion constructive et je sais que je vais apprendre quelque chose », se réjouit l’agriculteur. Il a d’ailleurs bénéficié de la prime d’activité après que Laurine lui en a parlé. Avec son expérience sur les autres fermes, elle l’aiguille dans ses projets. Quand il lui en parle, « elle avait toujours un avis ou une réflexion que je ne m’étais pas faite ».
C’est justement grâce à une étude économique menée par Laurine sur sa ferme que Florent a décidé de reprendre un atelier de naisseur, en plus de son activité d’engraisseur. « Moi ce que j’aime, ce sont les vaches », raconte-t-il, emballé à l’idée de se former à la génétique. Dès l’année prochaine, les premiers veaux devraient naître à la descente des alpages.
La consultante administrative étant en congé longue durée et loin de l’exploitation, Florent fait appel à une autre assistante administrative depuis un an. « Mais elle n’est pas spécialisée dans l’agricole », regrette l’éleveur, même s‘il faudrait quand même qu’il « reprenne rendez-vous ». Car sans assistante administrative, « je retombe dans les mêmes schémas. La simplification administrative, on en est encore loin… » glisse-t-il en clin d’œil aux grandes annonces de janvier 2024.
Formation limité
Sur la gestion administrative « je ne sais pas si les agriculteurs sont assez formés », en particulier dans les Maisons Familiales Rurales (MFR), où il y a fait sa formation il y a quinze ans. L’aide administrative, qui lui coûte « environ 30 € par heure », compense ce manque. Un point négatif ? « C’est comme la drogue, on deviendrait vite dépendant ! Après je me reposerai trop dessus », même s’il assume, reconnaissant que Laurine a été « une personne clé de [sa] carrière ».
« J’en ai beaucoup parlé autour de moi », explique l’agriculteur. Pour lui, « quoi qu’on fasse, des travaux, une demande de construction… Il manquera toujours un papier ». Avec une assistante, c’est l’assurance de ne pas être seul pendant ces périodes complexes. Dans les méandres de l’administratif, une consultante comme celle qu’il a eu, « ce n’est pas notre guide spirituel, mais pas loin », plaisante Florent.