Les semences, point faible du géant agricole russe
Un rapport publié en janvier 2025 dresse un état des lieux des dépendances de la Russie en matière de semences. Le pays s'approvisionne notamment chez des entreprises semencières européennes en maïs et tournesol.
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Sébastien Abis, chercheur à l'Iris, Arthur Portier, analyste chez Argus Media, et Thierry Pouch, économiste aux Chambres d'agriculture France, ont publié en janvier 2025 une étude sur les enjeux, pour les entreprises semencières européennes et françaises, de la guerre entre la Russie et l'Ukraine.
Les auteurs y rappellent notamment que la Russie et l'Ukraine sont devenues, ces dernières années, « des terrains majeurs aux entreprises semencières européennes, à la fois sur le plan de la recherche scientifique et du commerce ». Malgré leur montée en puissance agricole, les deux pays « présentent encore des vulnérabilités importantes en matière semencière ». Le point sur la Russie.
La Russie, excédentaire en semences de blé, déficitaire en maïs
En blé, production agricole phare de la Russie, « les semences sont considérées comme un secteur stratégique à part entière, explique le rapport. Le pays a investi dans cette industrie afin d’adapter les variétés aux conditions pédoclimatiques locales ». La balance commerciale russe de semences de blé est ainsi passée de déficitaire avant 2017 à largement excédentaire en volume.
En maïs, la Russie reste dépendante de l'extérieur pour les semences : en 2023, 55 % des semences de maïs utilisées étaient importées. La France est son deuxième fournisseur, derrière la Hongrie et devant la Roumanie. « Le marché russe pourrait être en danger en cas d’arrêt des exportations de semences européennes », estime le rapport. Néanmoins, « au regard du poids de la Russie dans les échanges, cela ne déstabiliserait pas véritablement le marché ». Par ailleurs, « les importations de semences chinoises (NBT) pourraient se substituer à une partie de semences européennes actuelles ».
La Russie est le deuxième producteur mondial d'orge et le quatrième exportateur mondial. Les semences d'orges ne sont « pas un point d'attention majeur pour le Kremlin », la Russie en produisant suffisamment pour en exporter. Le pays importe toutefois 100 % des semences d'orge brassicoles.
Objectif de réduction des importations de semences de tournesol
En tournesol, « l’ultradomination russe reste soumise aux importations de semences étrangères. À ce jour, l’objectif est de réduire la part de dépendance aux importations de semences de tournesol de 75 % à 25 % d’ici à 2030 ». La Russie a fortement augmenté ses capacité de trituration pour conserver la valeur ajoutée dans le pays. « Dans ce contexte et au regard des investissements réalisés, seule la dépendance aux semences de tournesol apparait à ce jour comme un frein au développement du secteur. »
Les Etats-Unis, la Turquie, la France et l'Espagne font partie des principaux fournisseurs de semences de tournesols. « À l’inverse d’autres marchés, la Russie pourrait se fournir hors de l’UE », indique le rapport. Par ailleurs, « le résultat de l’élection américaine est un point majeur de surveillance compte tenu de la place des États-Unis dans la fourniture de semences. »
En colza, contrairement au tournesol, « la Russie s’appuie sur une filière des semences globalement structurée, se payant même le luxe d’exporter selon les années. » Le rapport précise que pour renouveler certaines espèces et assurer une pureté variétale, le pays doit toutefois importer des semences de colza selon les années. « Le marché du colza est en forte progression en Russie et si des enjeux de production de semences supplémentaires seront à signaler à moyen terme, le pays semble armé pour réussir son pari », juge le rapport.
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