Les ONG « peu confiantes » face à la proposition de révision du plan Ecophyto
« 15 ans de travail à la poubelle » : les ONG environnementales s’opposent à la proposition de révision du plan Ecophyto 2030 que le gouvernement a mis en consultation dans une tentative de satisfaire les principaux syndicats agricoles d’ici au Salon de l’agriculture qui ouvrira ses portes le samedi 24 février 2024.
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« On craint que cette consultation ne soit que cosmétique. On ne veut pas faire de procès d’intention, mais on ne veut pas non plus se faire avoir », a déclaré à l’AFP François Veillerette, porte-parole de l’association Générations Futures.
Le gouvernement, qui a mis sur pause ce plan national de réduction des pesticides, a mis en débat le lundi 12 février 2024 un changement de l’indicateur de référence dans la feuille de route soumise au comité d’orientation stratégique et de suivi (Cos).
Ses membres — représentants agricoles, syndicaux, administratifs, élus et ONG — ont jusqu’au vendredi 23 février à minuit pour donner leur avis, avant une décision finale de l’exécutif attendue d’ici à l’ouverture du salon le 24 février.
Opposition sur le Nodu
La FNSEA, premier syndicat agricole, se satisfait de la proposition d’intégrer un indicateur européen, le HRI1, comme nouvel outil de référence, à côté ou à la place de l’indicateur français Nodu, accusé de ne pas refléter les efforts de réduction des agriculteurs mais soutenu par les ONG.
Le « maintien du Nodu agricole », l’indicateur français de mesure de l’utilisation des pesticides, n’est pas clairement écarté à ce stade, mais les associations environnementales dénoncent une consultation « biaisée ».
Selon François Veillerette de Générations futures, « changer le Nodu » reviendrait à « changer la nature du plan » Ecophyto puisqu’abandonner cet outil de mesure ne permettrait plus d’évaluer de façon cohérente la trajectoire de réduction des pesticides, censés diminuer de moitié d’ici à 2030 par rapport à 2015-2017.
Le Nodu « nous permet d’avoir un historique de 15 ans et il nous permet d’aborder l’avenir », abonde Thomas Uthayakumar, de la Fondation pour la Nature et l’Homme, joint par l’AFP. « Changer le thermomètre, ça n’a pas sens dans un moment où l’on travaille depuis 15 ans sur la réduction des pesticides ».
« Ce n’est pas un choix qu’on change du jour au lendemain, là c’est 15 ans de travail qu’on met à la poubelle d’un coup ! », déplore encore François Veillerette auprès de l’AFP. « Aujourd’hui, on est très peu confiants. »
Dialogue inter ONG
« Le Cos, c’est une série de réunions dans lesquelles on a déjà donné nos recommandations : on a joué le jeu et on a partagé notre contribution », rappelle Thomas Uthayakumar.
Les ONG ont l’intention de « se coordonner en interassociations pour répondre au formulaire » qui leur a été donné, ajoute-t-il.
Elles comptent « continuer le dialogue », selon Jean Burkard, directeur du plaidoyer chez WWF France, pour qui il ne faut pas perdre de vue avant tout « l’effet » des pesticides.
« On a toujours besoin de continuer à expliquer pourquoi les pesticides sont dangereux et pourquoi il faut en réduire l’usage », a-t-il déclaré. « La question n’est pas tellement le pesticide en lui-même, mais ce sont ses effets sur les sols, sur la population, etc. »
Le HRI1, récent outil européen, est « un très mauvais indicateur » car il « suit la dangerosité des substances actives estimée “a priori” » et « ne documente pas du tout les effets de cette substance une fois qu’elle est sous forme de pesticide mise dans la nature », justifie Jean Burkard.
De son côté, la Confédération paysanne « refuse de participer à la consultation », a indiqué à l’AFP Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération paysanne.
Pour elle, les modifications d’indicateurs vont « à l’inverse du principe de simplification » et visent à réduire « artificiellement » l’usage des pesticides, sans « changement de pratiques » agricoles, vers le modèle agroécologique soutenu par la Confédération.
Contacté par l’AFP, le cabinet du ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, n’avait pas donné suite le vendredi 16 février 2024 au soir.
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