Loi Duplomb : la réintroduction de néonicotinoïdes joue son match retour
La proposition de loi pour réintroduire des néonicotinoïdes en France poursuit son examen en commission des affaires économiques à l’Assemblée nationale ce mardi 13 mai 2025. Les députés du bloc central, partagés entre revendications des syndicats agricoles et opposition des défenseurs de l’environnement, devraient continuer d’y étaler leur division.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
Proposé par le sénateur Laurent Duplomb (LR), ce texte entend « lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur ». Il prévoit notamment de réintroduire par dérogation et pour certaines filières (noisette, betterave), l’acétamipride, un produit phytosanitaire de la famille des néonicotinoïdes, interdits en France depuis 2018, mais autorisés en Europe jusqu’en 2033.
Les députés macronistes tiraillés
La semaine dernière, devant la commission du développement durable de l’Assemblée, consultée pour avis sur la plupart des mesures, ce texte a subi un important revers. Sa présidente, la députée macroniste Sandrine Le Feur, a proposé de supprimer ses dispositions les plus controversées, s’inquiétant d’un texte qui servirait « de cheval de Troie pour affaiblir nos exigences environnementales au nom d’une fausse urgence ».
A contrario, sa consœur, la députée macroniste Anne-Sophie Ronceret, y défendait, à sa suite, un texte qui « répond à un cri du terrain » et « n’oppose pas agriculture et écologie ». Des positions divergentes au sein d’un même groupe, qui a choisi de laisser à ses députés une liberté de vote sur ce texte, à l’instar de celui sur la fin de vie, actuellement débattu dans l’Hémicycle.
Au sein du bloc central, le groupe MoDem est traversé par les mêmes tiraillements. Une réunion est prévue dans la matinée pour trouver une position commune avant l’ouverture des débats en commission des affaires économiques vers 16h15, indique à l’AFP son président de groupe Marc Fesneau.
« Je porte la voix d’un compromis, il faut voter le texte, mais il faut l’aménager pour qu’il puisse être acceptable par le plus grand nombre à l’Assemblée », plaide l’ancien ministre de l’Agriculture. Sur la mesure la plus sensible, la réintroduction dérogatoire de l’acétamipride, « je ne suis pas pour une suppression pure et simple », mais « pousse un amendement pour clarifier ce qui est une filière en impasse », explique Marc Fesneau.
La mise en garde des syndicats agricoles
Au sein de l’exécutif, qui a décidé d’inscrire le texte à l’agenda de l’Assemblée nationale, et garde en tête le mouvement de colère du monde agricole du début de 2024, les inquiétudes sont fortes, selon plusieurs sources. Les débats y seront regardés avec attention. D’autant que la FNSEA et Jeunes Agriculteurs (JA), après le revers essuyé sur le texte en commission du développement durable, se sont fendus d’un communiqué pour partager leur « déception immense » menaçant d’une « réaction » à « la hauteur » de la « trahison » des députés.
Dans la foulée, le Rassemblement national affirmait défendre « seul contre tous » les agriculteurs. « Sur la loi Duplomb, les agriculteurs l’attendent, et chez nous, on en a besoin pour dégager le RN », s’inquiète une députée des LR.
Un rapport de force plus favorable
Le rapport de force devrait être plus favorable au soutien du texte mardi : « Il y a la commission du développement durable, où certains se croient les gardiens du temple d’une forme d’écologie. Et après, il y a la commission des affaires économiques, pour qui l’agriculture est quand même un sujet sur le fond, qui, elle, regardera les choses de manière pragmatique et scientifique », croit le député Henri Alfandari (Horizons).
« Tout va dépendre » de la position du bloc central, selon l’écologiste Charles Fournier dont le groupe a déposé des centaines d’amendements pour tenter de modifier ce texte qu’il estime dangereux. Ce sont eux qui feront la bascule. » L’élu s’inquiète d’une « offensive à leur droite, et à l’extrême droite qui sera plus forte », et à laquelle s’ajoutent « les coups de semonce » de syndicats agricoles.
« Les menaces de réaction, on ne sait pas lesquelles elles seront, mais on peut s’attendre à du fumier devant un certain nombre de permanences », ajoute Charles Fournier. À l’inverse, plusieurs ONG de défense de l’environnement, à l’image de Générations Futures, ont appelé les députés « à se montrer dignes des alertes scientifiques, citoyennes et paysannes », et à « montrer qu’une autre voie pour l’agriculture est possible ».
L’examen du texte dans l’Hémicycle est prévu à la fin de mai. Avec un vote, probable durant le week-end de l’ascension, où la mobilisation des différents camps est difficilement prévisible.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :