Les endiviers s’inquiètent pour les prochains semis
Alors que deux herbicides sont d’ores et déjà interdits, la filière de l'endive est dans l’incertitude et demande du temps pour tester les alternatives possibles.
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Les membres de l’Association des producteurs d’endives de France (Apef) organisaient le jeudi 3 octobre 2024, leur premier lancement de campagne en présence de près de 80 opérateurs de la filière (producteurs, distributeurs, grossistes, détaillants, acteurs de la restauration collective…). L’occasion pour Philippe Bréhon, président de l’Apef, de rappeler l’« importance de pérenniser la production d’endives sur le territoire ».
125 000 t en 2024-2025
Pour la campagne de 2024-2025, l’AOP endives anticipe une production de 125 000 tonnes grâce à une augmentation de 7 % des surfaces emblavées cette année par rapport à la campagne précédente (8 884 ha), et des conditions météorologiques favorables pour la croissance des racines. Les semis ont toutefois été très étalés et un retard de maturité est observé.
« Cette hausse de production, qui demande à être confirmée, comblera le manque de racines de report pour le début de la campagne et viendra reconstituer le stock nécessaire pour assurer la jonction de la campagne de 2025-2026 », se félicite l’Apef. Les conditions climatiques et les faibles rendements avaient entraîné une sous-offre d’endives en 2023-2024.
Incertitudes pour 2025
Si les endiviers sont confiants pour cette campagne, ils s’inquiètent des incertitudes qui pèsent sur la prochaine, compte-tenu des retraits des herbicides Bonalan (benfluraline) (Bonalan) et Safari (triflusulfuron-méthyle) pour lutter notamment contre les chénopodes. L’insecticide Movento (spirotétramat), appliqué pour lutter contre les pucerons lanigères, est aussi sur la sellette en 2026, ce qui est « une forte inquiétude pour les producteurs surtout en année sèche », insiste Philippe Bréhon.
Recul de la marge nette
Selon une étude financée par l’Apef et réalisée par l’ARTB (Association de recherche technique betteravière), la suppression du Bonalan engendre une baisse de la marge nette du producteur de racines entre 612 €/ha et 1 264 €/ha (pour une endiverie optimisée qui accepte moins de mauvaises herbes dans le champ). Cet impact négatif est lié au coût des nouveaux investissements, des alternatives mises en place et de la main-d’œuvre supplémentaire.
« L’hypothèse retenue par l’étude suppose de garder un rendement identique, explique Philippe Bréhon. Mais avec un champ envahi de chénopodes, le rendement chutera forcément. » Et d’insister : « Les endiviers doivent pouvoir gagner leur vie afin de stabiliser la production en France. » Il pointe aussi la concurrence dans les assolements des pommes de terre et du lin, plus faciles à produire.
Des pistes mais pas LA solution
L’Apef a ainsi déposé un dossier « désherbage » dans le cadre du Parsada (plan d’anticipation du retrait des substances actives et du développement des alternatives), avec budget de 1,1 million d’euros sur cinq ans. Objectif : étudier des solutions combinatoires avec le désherbage chimique.
Elle a aussi mis en place 46 essais d’alternatives. « Nous avons des pistes mais pas LA solution », assène le président des endiviers. Et de citer par exemple la pendiméthaline, « mais elle manque de sélectivité sur certaines variétés et la molécule est aussi sur la sellette », indique-t-il. Des variétés tolérantes aux sulfonylurées, comme Cursus, pourraient être une solution mais l’efficacité de ces produits est moindre sur chénopodes. Autre limite : ce n’est guère durable en termes d’apparition de résistances des mauvaises herbes. Des matériels de désherbage innovants pourront aussi être complémentaires de la chimie, mais aujourd’hui ils sont encore peu adaptés à l’endive.
« Nous n’avons qu’une année de recul, nous ne savons pas comment vont réagir les endives dans un autre contexte pédoclimatique que cette année », alerte Philippe Bréhon. La filière continue donc ses actions de lobbying auprès du ministère de l’Agriculture afin d’essayer de trouver une solution pour 2025. « Nous aimerions un moratoire, du temps supplémentaire pour refaire des essais l’an prochain et bâtir un itinéraire technique solide », avance-t-il.
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