Gestion Une nouvelle option fiscale pour les individuels
Les chefs d'exploitation exerçant leur activité à titre individuel dépendent d'un nouveau régime juridique depuis le 15 mai. Une évolution qui leur ouvre aussi une nouvelle possibilité : opter à l'impôt sur les sociétés.
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Depuis le 15 mai, les exploitants à titre individuel relèvent du nouveau régime juridique de l'entrepreneur individuel. Un statut qui sépare leur patrimoine en deux : l'un personnel, l'autre regroupant tout ce qui est utile à leur activité professionnelle.
Ce dernier est réservé aux créanciers professionnels en cas de procédure collective ouverte à la suite de difficultés financières. Une mesure visant à protéger les biens personnels de l'exploitant mais qui n'est pas sans poser nombre de questions (lire notre cas de gestion du 9 septembre 2022 sur le sujet).
L'impôt sur les sociétés
L'autre nouveauté de la réforme se trouve sur le plan fiscal. Par défaut, les bénéfices de l'entreprise agricole sont imposés à l'impôt sur le revenu (IR) dans la catégorie des bénéfices agricoles (BA). Mais désormais, les entrepreneurs individuels peuvent opter à l'impôt sur les sociétés (IS). Une nouvelle corde à leur arc offerte dans la gestion de leur exploitation.
Avec ce régime fiscal, l'exploitant ne sera alors plus taxé au titre de l'impôt sur le revenu sur ses bénéfices mais seulement sur les revenus qu'il aura prélevés. " Dans le cas d'une entreprise individuelle à l'IR BA faisant 100 000 € de bénéfices, que l’exploitant ait prélevé 20 000 €, 10 000 € ou même 150 000 €, il était fiscalisé sur 100 000 €, hors régimes particuliers d’étalement. Dorénavant, l’option à l’IS fera que l’agriculteur ne sera imposé que sur la rémunération qu’il appréhende. Si sur 100 000 €, il ne prélève que 30 000 €, il sera alors fiscalisé que sur 30 000 euros à titre personnel. Et l'entreprise, elle, paiera son impôt sur les sociétés ", explique Geoffrey Marquis, expert-comptable et vice-président de l’Union nationale des experts-comptables agricoles. Il intervenait à l'occasion d'un colloque organisé à l'occasion de l'anniversaire de la plate-forme de documentation juridique Agridroit.
La rémunération de l'entrepreneur individuel sera alors déductible du résultat de l'entreprise et sera imposée à l'impôt sur le revenu au titre des traitements et salaires avec l'application d'un abattement de 10 % plafonné à 12 829 €. C'est sur cette rémunération que l'entrepreneur individuel paiera aussi ses cotisations sociales MSA. Le bénéfice de l'entreprise sera quant à lui taxé au titre de l'impôt sur les sociétés au taux de 15 % jusqu'à 38 120 € et 25 % au-delà (26,5 % pour les exercices ouverts avant le 1er janvier 2022).
Si l'exploitant décide de se distribuer des dividendes (prélèvements exceptionnels) sur les bénéfices qu'il n'a pas prélevés durant l'année de leur réalisation, il aura le choix entre deux solutions : soit leur montant sera imposé selon un prélèvement forfaitaire au taux de 30 % (12,8 % d'IR et 17,2 % de prélèvements sociaux), soit il sera imposé selon le barème progressif de l'IR avec l'application d'un abattement de 40% auquel s'ajouteront 17,2 % de prélèvements sociaux. Sur le plan social, seule la fraction des dividendes dépassant 10 % du bénéfice net imposable de l'entreprise seront soumis à cotisations sociales.
Opter en restant jusqu'au bout
Si l'option à l'IS peut permettre de diminuer le montant des prélèvements obligatoires des revenus annuels, elle sonne aussi comme une renonciation à toutes les spécificités du régime des BA de l'IR (déduction pour investissement réalisée avant le 1er janvier 2019, les déductions pour épargne de précaution, la moyenne triennale et l'étalement sur 7 ans d'un résultat exceptionnel notamment) et des régimes d'exonération des plus-values professionnelles.
" Le choix de basculer à l’IS doit être longuement réfléchi en quantifiant l’économie fiscale à court terme sur les revenus annuels et l'impact, à long terme, de la privation éventuelle d'exonérations des plus-values ", conseille Geoffrey Marquis, tout en avouant "qu'il faut être un peu devin".
Si l'option à l'IS peut être dénoncée dans les cinq premières années, sans possibilité d'y revenir, cela est loin d'être une bonne idée. " Il faut opter en se disant qu'on n’en sort pas car tous les bénéfices mis de côté seront rattrapés fiscalement à ce moment-là. Il faut transmettre son entreprise à l'IS mais pas sortir de ce régime " prévient l'expert-comptable.
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