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Repli généralisé des cours des céréales et oléagineux

Le cours du blé rendu Rouen tombe à son plus bas depuis le 11 décembre 2024.

Cette semaine a été marquée par un repli généralisé des marchés agricoles, après s’être approchés de plus hauts niveaux ces derniers mois en blé, maïs et colza.

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L’arrivée imminente de Donald Trump à la Maison Blanche reste une source majeure de volatilité pour les marchés agricoles. Le blé français se heurte à l’arrivée des récoltes argentine et australienne, quand les potentiels de production du maïs et soja sont encore incertains entre le sec en Argentine et les pluies importantes au Brésil. La correction a été forte en oléagineux, entre les annonces peu favorables aux utilisations de canola en Amérique du Nord mais aussi la volonté indonésienne de geler l’évolution des incorporations de biocarburants.

Le blé en quête de compétitivité à l’export

Le marché du blé meunier n’a pas été exempt de volatilité. En effet, les cours ont été empreints de fermeté sur le début de semaine, avec un rebond à 229 €/t rendu Rouen, dans le sillage d’un rapport USDA (ministère américain de l’Agriculture) haussier en maïs. Pour autant, l’office américain n’a pas apporté d’éléments propres au blé pour alimenter ce rebond. Au contraire, les stocks américains au 1er décembre étaient conformes aux attentes, quand les surfaces en blés d’hiver américains pour la récolte 2025 sont ressorties dans le haut de la fourchette des attentes, à 34 millions d’acres, contre 33,4 millions l’année précédente.

Finalement, le blé meunier cède -3 €/t sur la semaine et tombe à 222 €/t rendu Rouen, au plus bas depuis le 11 décembre dernier. Il faut dire que les opérateurs européens scrutent avec attention la dynamique export du Vieux continent. FranceAgriMer souligne d’ailleurs les mauvaises performances françaises, en maintenant à 3,5 millions de tonnes l’objectif export vers pays tiers, ce qui est inférieur aux 4 millions de tonnes projetées en octobre, et surtout bien moins que les 10 millions de tonnes de moyenne de ces dernières années. Si la désastreuse récolte hexagonale joue un rôle majeur dans ce repli, c’est également en raison du ralentissement des achats chinois depuis quelques mois, mais aussi de l’exclusion de l’origine française des appels d’offres algériens.

La céréale française peut néanmoins s’appuyer sur une consommation domestique et des exportations au sein de l’Union européenne dynamiques et en ligne avec les volumes de la dernière campagne. C’est ainsi que les stocks de report sont estimés à 2,9 millions de tonnes, en baisse par rapport aux 3,2 millions de tonnes de l’an passé, mais en hausse par rapport aux 2,8 millions de tonnes de moyenne ces dernières années. La céréale française est donc en quête de compétitivité, malgré les incertitudes déjà portées sur la prochaine récolte.

Actuellement, c’est l’Australie qui semble gagner de nouvelles affaires à l’export, profitant du ralentissement hivernal des exportations russes. Celles-ci sont pénalisées par des conditions maritimes compliquées mais habituelles sur la mer Noire en cette saison, tout comme par la récente hausse des taxes à l’export.

Baisse surprise de la production de maïs aux États-Unis

Contrairement au blé, le maïs enregistre une légère hausse hebdomadaire de + 1 €/t, à 205 €/t rendu Bordeaux, même si tous les gains en cours de semaine n’ont pu être conservés. D’ailleurs, ce ne sont plus que 15-20 €/t qui séparent les deux céréales à Rouen et Bordeaux, contre près de 30 €/t sur la fin du mois de décembre. Il faut dire que de nouveaux éléments de tension sont récemment apparus sur ce marché du maïs.

Déjà, c’est d’outre-Atlantique qu’est venue la principale surprise. L’USDA a drastiquement coupé la production américaine de -7 millions de tonnes, à près de 378 millions de tonnes, après avoir abaissé d’un peu plus de 2 quintaux/ha, à 112,5 q/ha le rendement moyen américain. Bénéficiant jusqu’à présent d’une demande toujours soutenue que ce soit localement pour la production d’éthanol ou à l’international, le bilan américain devient ainsi une source de soutien pour l’ensemble du complexe céréalier, quand il était encore un poids l’été dernier.

Dans le même temps, les conditions de culture se sont dégradées en Argentine ces dernières semaines. Tandis que les semis se terminent, un temps chaud et sec s’est installé, diminuant la part des maïs en bon ou excellent état à 39 %, contre 48 % deux semaines plus tôt selon la Bourse de Buenos Aires. Si un retour salvateur des précipitations est attendu ce week-end, la Bourse de Rosario a néanmoins diminué à 48 millions de tonnes son estimation de production, contre plus de 50 millions de tonnes précédemment.

Pour autant, le regain de fermeté du maïs français est limité par ses difficultés à stimuler la demande. Bien que compétitif sur le papier, la question de la qualité soulève encore quelques interrogations. FranceAgriMer réduit justement la consommation du maïs français en alimentation animale mais aussi les exportations vers les autres pays de l’Union européenne. Dans ce contexte, le stock de report de maïs en France est désormais estimé à 2,8 millions de tonnes, soit une hausse importante de 40 % par rapport à l’an passé.

Repli du colza dans le sillage du canola et de l’huile de palme

Le marché du colza reste marqué par une forte volatilité. Après avoir atteint un plus haut hebdomadaire à 544 €/t en début de semaine, les cours se sont repliés de l’ordre de -20 €/t pour revenir à 524 €/t FOB Moselle. Il faut dire que de nombreuses informations viennent semer le trouble sur le complexe oléagineux. Déclarations, rumeurs, contre-déclarations : les décisions réglementaires sont contrastées et apportent de nombreuses incertitudes sur le complexe oléagineux.

En Indonésie, le rationnement de la demande d’huile de palme est acté et le gouvernement pourrait désormais geler l’évolution des incorporations d’huile dans les biocarburants. Le marché à Kuala Lumpur a fortement corrigé de l’ordre de -14 % par rapport aux plus hauts du mois de décembre.

Dans le même temps, de nouvelles mesures sur les biocarburants ont été annoncées aux États-Unis et semblent plus favorables aux incorporations de soja plutôt que de canola. Cela s’ajoute à la mise en place possible de taxes américaines sur les importations canadiennes, pouvant réduire automatiquement les flux de canola vers les États-Unis. Dans ce contexte, le marché canadien a fortement corrigé la semaine dernière, revenant sur un plus bas depuis près d’un mois.

Enfin, du côté des fondamentaux propres au colza, la situation reste sous tension. Les besoins d’importation restent importants en Europe et des flux seront à sécuriser en provenance du Canada et de l’Australie tout au long de la seconde partie de campagne. À ce titre, le ministère américain de l’Agriculture (USDA) a rehaussé ses perspectives d’exportations canadiennes de canola de 500 000 tonnes, à 7,25 millions de tonnes. À cela s’ajoute une trituration toujours dynamique et les stocks de report ont logiquement été revus en baisse.

Une situation contrastée pour les tourteaux de soja

La situation est contrastée sur les prix du complexe soja. Tout d’abord, le marché de la graine a retrouvé des couleurs la semaine dernière suite à la publication mensuelle de l’USDA. L’office américain a revu en baisse la production américaine en 2024, passant de 121,4 à 118,8 millions de tonnes. Sans ajustements de la demande, les stocks de report sont logiquement révisés mais l’activité de trituration reste très dynamique, avec un nouveau record mensuel de trituration réalisé en décembre à 5,6 millions de tonnes, contre 5 millions de tonnes habituellement à cette période. La situation se tend ainsi sur le marché de la graine mais offre davantage de disponibilités de tourteaux de soja.

La situation est similaire du côté de l’Amérique du Sud. L’activité de trituration continue sur un rythme record mais de plus en plus de craintes font leur apparition sur les potentiels de production. En Argentine, le temps sec et chaud a entraîné la dégradation des conditions de culture de soja. Les semis sont terminés et seulement 32 % des surfaces sont notées en bonnes ou excellentes conditions, soit une baisse importante de 17 points en l’espace d’une semaine. Le retour des pluies est attendu dans les prochains jours mais devra se confirmer pour rassurer les opérateurs.

La situation est différente du côté du Brésil, où les pluies sur la zone de production ne permettent pas la progression des récoltes. Les retours de rendement des producteurs seront à suivre, à l’heure où les potentiels de production s’affichent jusqu’à maintenant sur des niveaux records.

Entre le regain de tensions sur le marché de la graine et les bonnes disponibilités de tourteaux à l’échelle mondiale, la situation est contrastée mais les prix des tourteaux de soja reviennent tester le niveau de support de 370 €/t en spot délivré Montoir, proche des plus bas testés il y a un mois. Le potentiel de baisse pourrait tout de même être limité par la faiblesse de la parité eurodollar, désormais en dessous de 1,03.

(1) Argus Media, société spécialisée dans le suivi des marchés des matières premières, nous livre son analyse agricole hebdomadaire.

À suivre : Rapport mensuel de l’USDA du 10 janvier ; Arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche ; Évolution de la parité eurodollar ; Compétitivité du blé français en seconde partie de campagne ; Évolution de la demande mondiale de blé ; Baisse des températures en Russie et aux États-Unis ; Conditions de culture du blé et du colza en Europe ; Flux d’importations de colza en Europe ; Potentiels de production de maïs et de soja en Amérique du Sud ; Évolution de la trituration de soja aux États-Unis et de colza en Europe ; Réglementations sur les incorporations d’huiles dans les biocarburants aux États-Unis.

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