Les chemins ruraux, un casse-tête pour les maires
Au Congrès des maires, certains admettent se retrouver face à un imbroglio quand ils abordent la question de la gestion de leurs chemins ruraux.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
« On vient de finir le recensement. Nous avons 400 kilomètres de chemins et autant de problèmes », explique un maire recherchant des réponses sur la gestion des chemins ruraux. Un sujet abordé le 20 novembre 2024 au Salon des maires. Il poursuit : « Depuis le remembrement de 1995, des chemins n’existent plus. Des agriculteurs les ont entièrement mangés. » Une situation partagée par d’autres élus au micro.
Un chemin susceptible d’acquisition
Dans les campagnes, le chemin rural tient une place particulière. La France en compterait 800 000 kilomètres aujourd’hui, après que « 200 000 kilomètres ont été perdus en moins de 40 ans », selon Louise Larcher, conseillère technique sur les chemins ruraux à l’Association des maires de France.
Faisant partie du domaine privé des communes, ils sont affectés à l’usage du public. Ils doivent être distingués des voies communales destinées à la circulation et classées comme tel par le conseil municipal, et des chemins d’exploitations qui servent exclusivement à relier plusieurs fonds.
Si la commune peut décider de céder ses chemins ruraux à condition qu’ils ne soient plus du tout utilisés comme voie de passage, ils sont également susceptibles d’être acquis par les agriculteurs grâce à la prescription trentenaire, c’est-à-dire après plus de trente ans de possession.
Plusieurs conditions restent à remplir et à prouver car la prescription n’est pas automatique. Il faut la demander au juge judiciaire. Et ce n’est pas parce que le chemin est indiqué comme un chemin rural sur le cadastre qu’il en est un. Il ne constitue pas en soi une preuve de propriété. Pour faire simple, il faut que l’agriculteur se soit comporté comme le véritable propriétaire aux yeux de tous pendant au moins trente ans.
Des communes invitées à inventorier leurs chemins
La commune pourra se défendre en démontrant que la surface est un chemin rural. Pour les aider à conserver leurs chemins ruraux, la loi 3DS du 21 février 2022 offre la possibilité aux communes de réaliser l’inventaire de leurs chemins ruraux pendant un délai de deux ans. Durant la réalisation de ce recensement, le délai de prescription de 30 ans est suspendu. C’est également cette loi qui offre la possibilité aux communes d’échanger une parcelle contre une autre pour déplacer un chemin.
Au-delà du cas du chemin cultivé, l’agriculteur ne peut pas entraver l’accès à un chemin rural. Une maire s’interrogeait sur le cas d’un agriculteur de sa commune qui avait posé une barrière pour le passage de ses vaches. C’est « un accaparement du chemin qui est interdit », explique Louise Larcher. Doté d’un pouvoir de police, le maire a même le devoir d’agir pour rétablir l’accès.
L’élu peut également prendre un arrêté de circulation pour limiter le tonnage. Un intérêt « lorsqu’on sait que les engins agricoles deviennent de plus en plus gros », précise Louise Larcher aux maires présents.
Les randonneurs et chasseurs invités à entretenir les chemins
Le maire n’a en revanche aucune obligation d’entretenir les chemins ruraux de sa commune. En cas d’accident par un riverain causé en raison de l’état du chemin, la responsabilité du maire ne pourra pas être mise en cause. Une exception demeure lorsque la commune a décidé de viabiliser le chemin en le bitumant par exemple. Dans ce cas, la jurisprudence admet que la personne accidentée puisse engager la responsabilité du maire pour défaut d’entretien normal.
La question de l’entretien des chemins peut être un casse-tête pour des petites communes au linéaire important et au budget limité. Elle peut décider d’une contribution spéciale. Une telle contribution peut être mise à la charge de « l’agriculteur qui fait du débardage du bois et abîme le chemin », prend pour exemple Louise Larcher.
Les riverains du chemin peuvent également intervenir pour l’entretenir et ce ne sont pas les seuls. La loi 3DS permet désormais au conseil municipal d’autoriser par convention une association « loi 1901 » à restaurer ou entretenir un chemin rural. Une possibilité conseillée aux maires par Louise Larcher. « Contactez les associations de randonneurs, de VTTistes et de chasseurs. Ils ont intérêt à voir les chemins entretenus. »
Pour accéder à l'ensembles nos offres :