Multiplier par deux les surfaces de chanvre en cinq ans

Le premier forum mondial du chanvre s’est tenu les 19 et 20 novembre 2024 à Troyes (Aube), berceau historique de la production de cette plante aux multiples débouchés. Sur le podium des producteurs mondiaux et leader européen, la France, qui rassemble 38 % de la surface communautaire, compte bien poursuivre sa croissance. « En dix ans, les surfaces de chanvre dans l’Hexagone ont été multipliées par trois. Pour répondre aux demandes, notamment dans le secteur du textile et de la construction, nous devons multiplier par deux les surfaces en cinq ans », explique Franck Barbier, président de l’interprofession InterChanvre.

Les chanvrières investissent

Forte de ses 1 550 producteurs, la filière française souhaite donc élargir ses rangs et les sept chanvrières existantes investissent dans des outils industriels qui devront, à l’avenir, absorber cette production supplémentaire. « Le coût industriel est très important. Pour transformer 2 500 hectares, on a besoin d’une unité à 15 millions d’euros », illustre Franck Barbier.

Au-delà de ces investissements, la filière a aussi besoin de semences variées, nouvelles et en quantité suffisante pour répondre au défi de sa croissance annoncée. Bonne nouvelle ! La France est le premier pays producteur de semences de chanvre dans le monde.

Semences françaises

Acteur incontournable dans la production de semences de chanvre industriel certifiées, la coopérative Hemp-it, basée à Beaufort-en-Anjou (Maine-et-Loire), ne cesse d’innover. Détenue par des agriculteurs semenciers et des agriculteurs producteurs de chanvre, l’entreprise fournit aujourd’hui de nombreux pays.

« La recherche et développement (R&D) et l’innovation ont énormément accéléré ces dernières années », analyse Christophe Février, directeur général de Hemp-it. « Nous arrivons à mettre une nouvelle variété sur le marché en huit ans, c’est un progrès colossal. On travaille notamment sur la précocité des variétés, leur potentiel de rendement de la matière utile et sur la teneur en THC. »

L’enjeu de la rémunération

Conscient que le chanvre est une filière de niche mais mondialisée, Christophe Février alerte cependant sur la capacité qu’ont d’autres pays à lever d’importants capitaux en R&D et qui pourraient distancer les Français dans la course à l’innovation. « Si les surfaces augmentent en France mais aussi dans le monde, sommes-nous prêts à changer de dimension et à aller chercher des moyens plus importants pour répondre à la demande ? » questionne-t-il.

Pour atteindre l’objectif d’une augmentation significative des surfaces de chanvre à court terme, la filière doit également répondre à un défi majeur : séduire de nouveaux producteurs et cela passe par une rémunération attrayante. « Nous souhaitons faire rémunérer les services environnementaux rendus par le chanvre que sont, son impact positif sur le carbone, la préservation de l’eau et de la biodiversité. L’interprofession a mis en place une PSE (prestation pour services environnementaux), qui sera financée par le secteur privé », indique Franck Barbier. Avec à la clef une rentabilité plus importante pour la culture.

En chiffres

Leader européen, la France comptait 23 600 ha de chanvre en 2024, suivi par l’Allemagne et l’Estonie qui en recensent près de7 000 ha chacun. La Lituanie et l’Italie en comptent un peu plus de 5 000.

En 2022, la production mondiale représentait 185 248 ha, dont plus de 65 000 ha en Chine et 24 000 ha au Canada. « L’Afrique du Sud et l’Australie comptent parmi les pays qui augmentent le plus leur production », estime Rachele Invernizzi, membre du conseil d’administration de la Fédération internationale des organisations de chanvre (FIHO).