Miser sur la formation pour installer les agricultrices
À travers des dates clés, des retours d’expériences, des ateliers participatifs, le réseau Civam a réuni ses structures locales le temps d’une journée pour sensibiliser à la question du genre dans l’enseignement agricole.
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L’enseignement agricole peut-il favoriser l’installation des agricultrices ? « Oui, et il le doit », scandent des représentantes du réseau Civam, les Centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural, et de la Fadear, Fédération associative pour le développement de l’emploi agricole et rural, réunies le 21 septembre 2023 à Paris. Durant une matinée, La France Agricole a assisté aux échanges et à la formation d’une quarantaine de personnes, très majoritairement des femmes, sur le sujet du genre et de l’installation.
Les femmes deviennent rarement paysannes
Il est 9h00 ce jour-là lorsque les participantes arrivent au compte-gouttes. Étiquette avec leurs nom, prénom et structure, collée sur le tee-shirt, un café à la main, elles se retrouvent ou se rencontrent. Hélène, membre de l’Ardear, vient de la Région Centre pour obtenir des informations sur le fonctionnement d’un groupe non-mixte que sa structure veut créer. Chloé, elle, est membre de l’association SOL-Alternatives agroécologiques et solidaires en Haute-Garonne et va s’installer en maraîchage avec son frère. Elle vient « se sensibiliser aux questions du genre. Ça m’aidera sûrement à trouver ma place », explique-t-elle avant de s’asseoir.
9h30, les présentations officielles débutent. « L’objectif de cette journée est de mutualiser nos savoirs, introduit Sixtine Prioux, coordinatrice du réseau Civam, spécialiste en transmission et femmes. Nous travaillons ensemble sur le rôle que nos structures peuvent avoir dans l’enseignement agricole pour favoriser l’installation des femmes. À travers ces journées interassociatives, des témoignages, des productions et des actions en ressortent. »
L’introduction terminée, les participantes sont debout, divisées en deux groupes. D’un côté, celles qui ont suivi une formation agricole, de l’autre celles qui n’en ont pas suivi. Puis à nouveau en deux groupes, celles qui sont devenues paysannes et celles qui ne le sont pas. Au total, trente-six femmes et trois hommes sont présents. Une large majorité a suivi une formation agricole et deux femmes sont désormais agricultrices. Les trente-quatre autres travaillent dans des structures associatives du monde agricole et rural.
Faciliter l’installation des agricultrices dès la formation
Cette technique de répartition de la salle est une manière d’imager la réalité du secteur agricole. En 2023, le ministère de l’Agriculture recense 45 % de femmes présentes dans l’enseignement agricole. Ensuite, 26 % des exploitants ou coexploitants sont des femmes. Un pourcentage qui stagne depuis près de dix ans, explique Emma Frison, doctorante en sociogéographie sur les espaces d’apprentissage aux métiers agricoles au prisme du genre. Invitée pour faire un bref retour historique sur l’enseignement agricole et en présenter les chiffres clés, Emma Frison expose les mutations que la formation agricole pour les femmes a connues depuis sa création en 1886.
Près de 140 ans plus tard, c’est au travers des questions auxquelles la salle a dû répondre à voix haute ou par groupes, au travers des retours d’expériences de terrain et des prises de paroles spontanées que les structures du réseau Civam sensibilisent à la question du genre dans l’enseignement agricole.
« Notre rôle est d’effriter toutes les certitudes »
« Lorsque nous allons dans des lycées agricoles à la demande du ministère ou de l’établissement, raconte Bertille Fages, animatrice à la Fadear, nous voyons bien qu’il existe encore beaucoup d’idées reçues sur le rôle de la femme dans une exploitation et que les jeunes ne s’en rendent pas toujours compte. Notre rôle est d’effriter les certitudes. Toutes les certitudes. Celles des hommes, mais également celles des femmes », insiste-t-elle.
Au final, « l’enseignement agricole est-il toujours genré ? », interroge Emma Frison sans apporter de réponse. À chacune et chacun de s’interroger, avant d’y réfléchir collectivement cet après-midi au cours d’ateliers participatifs. Il est 12h30, c’est l’heure de la pause-déjeuner.
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