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« Le non-labour appliqué à la monocultur « Le non-labour appliqué à la monoculture de maïs semence »

Jean-François Naudi a arrêté de labourer il y a quatorze ans. La situation de son exploitation ne lui permettant pas de faire des rotations, il s'adapte.

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Lorsqu'il a pris la suite de son père, en 1999, sur l'exploitation d'Arvigna, en Ariège, Jean-François Naudi est tout de suite passé au non-labour. Doté d'un BTS de biochimie et d'un Deug de biologie, ce passionné d'agroécologie avait décidé de rompre avec les pratiques de ses prédécesseurs. En deux ans, ses 150 hectares étaient passés sous ce nouveau régime. « Mon père labourait de façon traditionnelle et le sol, sablo-argileux, possédait une épaisse semelle de labour, qui empêchait l'air et l'eau de passer, raconte-t-il. Mais attention, je ne me suis pas lancé les yeux fermés, je me suis bien documenté. Lorsqu'on aborde la conservation des sols, il faut avoir de bons conseillers, adhérer à un groupe d'agriculteurs qui utilisent ces méthodes et, surtout, avancer parcelle par parcelle, avec le matériel que l'on possède déjà à la ferme. Inutile d'investir dès le départ dans un semoir coûteux. »

Jean-François cultive 100 ha de maïs semence, sur lesquels il ne peut faire aucune rotation s'il veut conserver cette importante surface, mais aussi eu égard aux contraintes d'isolement. Il cultive également 15 ha de blé dur, 10 ha de blé tendre, 10 ha de tournesol semence, 5 ha de colza semence et le reste est en prairie. Depuis huit ans, il pratique les couverts végétaux sur l'ensemble de ses champs. « Si on ne laboure plus les sols, il faut absolument utiliser des couverts, notamment de légumineuses, pour capter l'azote, poursuit-il. Les couverts augmentent l'activité des sols, ce qui permet de réduire le problème des résidus de matière en surface. »

MAÎTRISER LES COUVERTS

En septembre, Jean-François effectue un très léger déchaumage sur 3 cm, puis ameublit la terre avec une dent (Guilbard) et sème le couvert végétal à la volée avec ses épandeurs d'engrais et d'antilimace. Celui-ci se compose d'avoine (60 kg/ha), de vesce (20 kg/ha) et de phacélie (3 kg/ha). Il fait ensuite un passage supplémentaire pour rappuyer le sol. « Au départ, il ne faut pas vouloir trop de biomasse, car le sol peut ne pas être prêt à la «digérer», précise-t-il. J'ai commencé avec de l'avoine, et petit à petit, j'ai rajouté différentes espèces. Aujourd'hui, le couvert représente 5 t/ha de matière sèche, que je détruis le plus tard possible, mais pas après le 15 mars pour les cultures de maïs sur maïs. Pour cela, j'utilise du glyphosate, à raison de 0,5 à 1 l/ha, soit 10 à 20 % de la dose normale, mélangé à de l'eau de pluie récupérée, et je n'en remets pas dans l'année. Puis, je laisse mon couvert tel quel jusqu'à la veille des semis, où je passe la herse rotative. J'implante ensuite directement avec un semoir monograine classique.

Pour le maïs semence, je dois alterner les rangs mâles et femelles. L'utilisation du glyphosate ne me satisfait pas, j'aimerais le supprimer totalement. Mais à cette date-là, détruire mécaniquement n'est pas possible, la biomasse est trop abondante et le maïs risquerait de souffrir par la suite. Je n'ai pas beaucoup d'autres solutions. »

Depuis trois ans, Jean-François teste des mélanges de couverts en différentes proportions : féverole, trèfle blanc, trèfle incarnat, avoine brésilienne, sarrasin... pour voir s'ils sont faciles à implanter et à détruire, et ce qu'ils peuvent apporter aux cultures. Il a également essayé des espèces gélives. Une bonne solution, sauf qu'on ne maîtrise pas la date du gel... La pratique du non-labour exige que l'on observe ses parcelles de près. « C'est la première étape de la lutte antilimaces, poursuit l'agriculteur. Les cinq premières années ont été un peu compliquées et j'ai dû garder un traitement molluscicide. Puis, j'ai fait baisser la pression en utilisant un produit bio. Aujourd'hui, en cas d'attaque, j'apporte un produit à base de fer, de type Sluxx, qui s'utilise en agriculture biologique et n'a pas d'impact sur les auxiliaires. Mais ce traitement n'est pas systématique, sauf en tournesol, où les limaces sont difficiles à stopper. Je n'ai pas plus d'attaques que mes voisins. L'important est de préserver les auxiliaires qui se nourrissent de limaces. »

Jean-François n'applique plus d'insecticide au sol depuis sept ans. Il utilise par ailleurs des trichogrammes pour lutter contre la pyrale. « Il ne faut pas arrêter totalement les produits chimiques, mais les utiliser à bon escient », souligne-t-il.

Quant aux adventices, Jean-François rencontre peu de problèmes. A l'automne, il effectue un désherbage à moitié de dose avec un produit de type Aubaine et obtient des parcelles très propres, ne nécessitant pas de rattrapage par la suite. Le sol étant couvert en permanence et peu travaillé, les autres graines ne germent pas. 80 à 90 % sont consommées par les insectes du sol. Par ailleurs, il utilise dans ses couverts des plantes aux propriétés allélopathiques qui, par émission de substances, empêchent les autres de germer.

UN IFT TRÈS BAS

« En maïs semence, les variétés poussent lentement, elles ont moins de feuillage et laissent passer la lumière, poursuit l'agriculteur. Comme ce sont des cultures irriguées, l'herbe y pousse facilement. De plus, après la floraison, on coupe 30 % des plantes femelles lors de la castration, ce qui redonne de la lumière au sol et fait repartir l'herbe. Du coup, juste après le semis, j'applique un herbicide racinaire de type Camix, à 3 l/ha, puis j'adapte le programme en fonction de chaque parcelle. J'ai étudié, avec Agriconseil, la meilleure façon de réduire les doses. En un an, je suis passé de 100 l/ha de bouillie à 50 l/ha. J'ai changé mes buses et je traite le matin. L'été, entre 4 heures et 8 heures, s'il n'y a pas de vent et j'avance à la bonne vitesse. Je dois parfois faire des rattrapages avec l'enjambeur de castration, équipé de pendillards, pour finir de me débarrasser de l'herbe. Mais cela ne concerne que 10 à 20 % de la sole. Mon IFT (1) est quasi-nul en insecticides et en fongicides, mais je pourrais améliorer celui des herbicides. » Lorsqu'il livre ses semences, Jean-François n'a pas de problème de pureté. Aucun lot n'a été exclu parce qu'il comportait trop d'herbes ou d'autres graines. Aujourd'hui, son sol est prêt pour passer en semis direct complet et il envisage d'investir dans un semoir adapté.

(1) Indicateur de fréquence de traitements phyto.

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