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Le droit aux semences, un combat sans fin pour la Confédération paysanne

Fête des droits paysans par la Confédération paysanne nationale, régionale et départementale en Isère, à Saint-Georges-d'Espéranche, 17 avril 2024.

La Confédération paysanne fêtait les « droits paysans » le 17 avril 2024, journée mondiale des luttes paysannes. L'occasion de faire le point sur son combat de trente ans pour le « droit aux semences ».

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C'était il y a un peu plus de cinq ans, le 17 décembre 2018. La France et la plupart des pays européens s'étaient abstenus. Mais la « déclaration des Nations unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales » (UNDROP) avait été adoptée à l'ONU. C'est cette « belle victoire », arrachée par les mouvements paysans après des années de plaidoyer, que célébrait la Confédération paysanne le 17 avril 2024.

Une déclaration non contraignante

Cette date a été proclamée « journée mondiale des luttes paysannes » par la Via Campesina, un mouvement international de défense des paysans qui dit rassembler plus de 180 organisations agricoles à travers le monde. La Confédération paysanne, qui en est membre, a choisi d'organiser sa « fête des droits paysans » à Saint-Georges-d'Espéranche, en Isère, lieu symbolique du premier fauchage d'OGM suivi par un procès, en 1997.

« La déclaration des Nations unies est une grande avancée pour les paysans mais n'est pas contraignante pour les Etats, rappelle Olivier Keller, du bureau national de la Conf.  On doit maintenant rendre ce droit international prescriptif au niveau national. » Pour cela, il invite à « nommer cette déclaration devant les juridictions à chaque occasion possible, afin de créer de la jurisprudence ». Dans certains pays, déjà, « des tribunaux fondent leurs décisions sur différents articles de l'UNDROP », affirme Coline Hubert, juriste, citant une décision au Honduras, une jurisprudence au Canada et une procédure en cours au Kenya.

Parmi les 28 articles de la déclaration, la Conf' a choisi de focaliser sa journée sur le droit aux semences. « La France voulait faire remplacer le terme “droit” par “accès”. Or tout le monde y a accès s'il a du fric. Avoir le droit, c'est autre chose, fulmine Gérard Boinon, ancien secrétaire du syndicat et consultant au Conseil des droits de l'homme de l'ONU. Les paysans du Sud ont besoin que l'on continue de lutter pour ce droit ! »

Les  « nouveaux OGM sont des OGM tout court »

Vent debout contre les OGM et les NGT, au nom de la souveraineté alimentaire pour tous les peuples, le syndicat dénonce la volonté de « mainmise des multinationale » sur les semences à travers la brevetabilité du vivant. Annick Bossu, présidente de l'association Inf'OGM et « Amie de la Conf' », enchaîne sur l'opacité sur les méthodes d'obtention des « nouveaux OGM qui sont des OGM tout court ». Elle rappelle que l'Anses a pointé les irrégularités scientifiques du projet de texte de Bruxelles visant à déréguler les plantes issues de NGT.

« Dans certaines zones de l'Isère, on ne cultive plus que ces VrTH associées à de l'imazamox en postlevée, à cause de l'ambroisie, ajoute Jean-Luc Juthier, paysan référent sur le sujet. Quelle que soit leur méthode d'obtention, c'est une fuite en avant problématique. Cela va mener à des impasses, avec le développement des résistances. »

Peut-on s'en passer ? Certains paysans bio de l'Isère admettent avoir arrêté la culture du tournesol à cause de l'ambroisie. Vincent Gay est de ceux-là, mais il a décidé cette année d'en remettre, en semant un couvert de sarrasin après le tournesol pour empêcher l'ambroisie de croître. Un collègue, Rémy Terry, se lance aussi : « Avec des rotations longues, des faux-semis, du hersage et du binage, et peut-être un couvert de trèfle, on pense pouvoir gérer. » Affaire à suivre. « De toutes façons, nous, paysans bio, on passe notre temps à tester de nouvelles choses agronomiquement », concluent ils. Pour eux, la lutte continue aussi au champ.

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