Comment les fortes chaleurs impactent les vaches laitières ?
De récents travaux scientifiques permettent d’estimer les effets du stress thermique sur les performances techniques des vaches en production.
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Avec le changement climatique, les troupeaux sont confrontés plus fréquemment à des vagues de chaleur estivales ainsi qu’à de fortes amplitudes thermiques. Or ces évolutions altèrent les fonctions physiologiques des bovins et affectent leurs capacités de production et de reproduction. Sera-t-il possible d’adapter les troupeaux aux conditions climatiques futures ?
Dans le cadre des projets APIS-GENE CAICalor et H2020 Rumigen, menés en France par les équipes de l’UMT eBIS (1), les performances de millions de vaches françaises ayant eu un premier vêlage entre 2010 et 2020 ont été analysées : production, santé de la mamelle (taux cellulaire), reproduction (taux de réussite à la première IA). Ce travail a porté sur les races prim’holstein, montbéliarde et normande. Il a été possible grâce à l’utilisation des données disponibles dans les bases du Système national d’information génétique, et aux informations compilées dans la base Safran de Météo-France.
Pour caractériser le stress thermique, les chercheurs se sont appuyés sur le THI, un indicateur climatique qui combine température et humidité. « Le THI optimum pour la production laitière est de 45 à 55, pointe Roxane Vallée, du département de génétique de l’Institut de l’élevage (Idele). Il correspond en France aux conditions climatiques moyennes du printemps et de l’automne. Au-delà de 70, les conditions deviennent inconfortables pour les bovins. »
Sélection génétique possible
Les résultats des études menées sont sans équivoque. Quelle que soit la race, la production laitière diminue quand le THI augmente : une baisse de 5 à 14 % de la production en première et deuxième lactation est ainsi observée entre un THI optimum de 50 et un THI supérieur à 70 (fortes chaleurs). En proportion, la baisse est équivalente pour toutes les races.
Les performances de reproduction se dégradent lorsque le THI dépasse 60, avec une diminution moyenne de la réussite en première IA et en première lactation de 2 % en normande, 3 % en montbéliarde et 8 % en race prim'holstein. Cette dernière part notamment d’un niveau de réussite en première IA plus bas, de 44 % en moyenne sur la période d’étude.
Des constats similaires sur l’évolution des résultats de production et de reproduction sont dressés dans les pays européens avec quelques nuances, liées aux conduites alimentaires et aux systèmes d’élevage (des animaux plus souvent en bâtiment en Espagne et aux Pays-Bas et davantage de pâturages et de transitions alimentaires en France).
Si le potentiel de production et de reproduction des vaches diminue globalement en condition de stress thermique, les animaux sont plus ou moins impactés individuellement. Identifier et sélectionner des animaux plus résistants à la chaleur est possible techniquement. L’Australie le fait depuis 2017. « L’intérêt, pointe Roxane Vallée, serait de disposer non pas d’un seul, mais de plusieurs index tenant compte de la variation du potentiel de production suivant les conditions climatiques. Deux animaux à l’index + 500 kg en lait à un THI de 50, pourraient avoir en conditions thermiques stressantes (THI supérieur à 70), l’un un index de + 300 kg, l’autre un index de + 100 kg. »
Les organismes de sélection jugeront-ils utile d’estimer une valeur génétique variant selon les conditions de température et d’humidité ? Le choix leur appartient. À court terme, en élevage, certaines pratiques tendent à limiter les effets du stress thermique : éviter d’inséminer lorsqu’il fait chaud, garantir nombre suffisant de places à l’abreuvoir et de l’ombre au pré, ou encore étaler la distribution de l’alimentation en cours de journée.
(1) L’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), l’Institut de l’élevage (Idele) et Eliance.
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