Sanitaire « L’Europe a plus d’un an d’avance sur le vaccin »
Alors que la piste vaccinale n’est pas à l’ordre du jour aux États-Unis, David Swayne, docteur en pathologies vétérinaires et directeur du laboratoire de recherche en maladies virales aviaires exotiques et émergentes de l’USDA (1), rappelle que la biosécurité reste l’arme principale face à une épidémie de grippe aviaire très différente de la précédente.
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"Comme en 2014-2015, nous sommes confrontés à une épidémie de grande ampleur ici avec plus de 50.3 millions de volailles infectées. À ce rythme, on devrait même dépasser les chiffres de la dernière infection. Mais il y a une des différences importantes. Le nombre d’élevages contaminés est cette fois bien supérieur, notamment dans les petites basses-cours. Et si nous avions 15 États touchés précédemment, ils sont 46 aujourd’hui avec un nombre très élevé d’oiseaux sauvages porteurs. Autre point relevé par nos recherches, contrairement à 2014-2015, le virus est revenu déjà adapté pour contaminer nos poulets et nos dindes. Pour ces dernières, une dose plus faible du virus est même désormais suffisante.
Moins de 24 h pour une confirmation
Nos recherches montrent aussi que les élevages professionnels sont aujourd’hui principalement infectés par l’environnement et pas par les transferts entre élevages. Heureusement, la filière est mieux préparée pour détecter le virus. En moins de 24 heures, nous pouvons dorénavant confirmer une contamination.
À l’heure actuelle, la vaccination contre le virus hautement pathogène n’est pas autorisée aux États-Unis. Sur la recherche, nous n’en sommes d’ailleurs qu’au début. Nous expérimentons plusieurs technologies vaccinales avec les virus H5N1 ou H5N8 inactivés, mais aussi des vaccins vecteurs. Nous avons également plusieurs partenariats avec les laboratoires privés qui fabriqueront des vaccins contre le virus 2.3.4.4b, le 2.3.4.4c ou même le 2.2. Mais nos tests ne commenceront qu’au début de l’année prochaine. Pour comparer, je dirais que l’Europe a une avance d’environ 18 mois sur nous. Mon équipe de recherche est en contact avec nos homologues européens, mais il faut comprendre que le processus de validation des vaccins est très différent d’un pays à l’autre. Nous ne pouvons pas prendre les résultats d’un pays et les implémenter dans un autre comme ça. Notre rôle en attendant, c’est de travailler sur tout ce qui sera utile pour mener le programme vaccinal. Avec nos recherches, nous proposons des réponses scientifiques pour les décisions qui seront appliquées par la suite sur le terrain.
Des problématiques commerciales à résoudre
La question du vaccin implique à la fois le gouvernement, la filière, les laboratoires... Sans parler des problématiques commerciales à résoudre. Nous sommes un exportateur majeur, nous ne voulons pas vacciner nos volailles et voir ensuite nos acheteurs dire : « Vous avez vacciné et nous ne sommes pas sûrs que vos volailles sont saines ! » À l’USDA, nous devons donc développer un programme de surveillance pour prouver scientifiquement à nos partenaires que le virus n’est pas présent dans les troupeaux vaccinés.
Il y a toutefois une chose qui a déjà réalisé beaucoup d’accomplissements : c’est la biosécurité. Si on prend nos chiffres, il y a 262 élevages commerciaux contaminés. C’est terrible et c’est beaucoup ! Mais il y a plus de 230 000 élevages aux États-Unis et des oiseaux sauvages infectés partout. Donc 262 élevages touchés, ce n’est pas si mal, même si le vaccin pourrait nous aider à faire mieux.
Notre urgence aujourd’hui, c’est donc de laisser le virus hors des volières avec des pratiques et des protocoles pour ne pas aider à sa circulation. Les éleveurs sont compétents et audités régulièrement. C’est notre ligne de front."
(1) US Department of Agriculture. Ministère américain de l'Ariculture.
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