C’est un défi de taille, qui attend Alexandra Farina, chargée de communication de « La ferme des peupliers » en Normandie. En cet après-midi ensoleillé de fin mai, elle a « une heure et quarante minutes » pour faire découvrir à quarante-sept élèves de CM1 et CM2 ce qui se cache derrière les yaourts qu’ils mangent à la cantine.

La salariée a l’habitude des horaires stricts des sorties scolaires. Il n’empêche, que « c’est très sport », sourit celle qui n'a pas arrêté de répondre aux questions des petits curieux durant la visite, au pas de course. « Comment c’est possible qu’il y ait des bébés alors qu’il n’y a pas de mâles ? » « Comment les vaches fabriquent du lait ? » Ou encore « Que deviennent les vaches après ? »

« Adapter le discours »

Pour répondre à cette pluie de questions, Alexandra Farina a prévu un circuit « bien pensé » : film d’introduction, vue sur l’étable, présentation de la salle de traite, rencontre avec les veaux, observation de l’usinage des produits et dégustation des yaourts de la ferme.

En moins de deux heures, pas question d’assommer les apprentis fermiers avec une tonne d’informations. Alexandra espère déjà que les élèves repartent en sachant « faire le lien entre la vache et le yaourt ». Elle recommande de penser à « adapter le discours » aux enfants.

« Avec certains, on peut rentrer un peu dans les détails », estime-t-elle. Certains sont de fins connaisseurs. « Est-ce que des marques comme Danone achète votre lait ? », questionne, par exemple, un élève de CM2 assis sur le banc offrant une vue imprenable sur la salle de traite rotative.

Quand Alexandra Farina explique la régularité de la traite « à l’heure de [leur] petit déjeuner », une petite, au sweat rose, finit sa phrase, d’un air blasé « … Et à cinq heures le soir ». Elle assiste parfois son grand-père à la traite des vaches alors la ferme n’a pas de secret pour elle. Mais pour d’autres qui n’ont « jamais vu de vaches d’aussi près », c’est une première. « C’est impressionnant, c’est très gros », observe un élève, maillot de foot sur le dos.

Tracé de visite

Sécurité oblige, les élèves n’approcheront pas les vaches. L’exploitation accueille depuis une dizaine d’années du public, alors « le chemin est rodé » et agrémenté de panneaux d’information.

Les quelques bottes aux pieds des écoliers rentreront immaculées. L’un des jeunes précautionneux se justifie : « Ben oui, j’ai prévu, à la ferme, il y a de la boue ! » Pas besoin pourtant, le tracé du parcours est goudronné. Une disposition qui permet « de faciliter l’accès à tous types de public » : personnes en situation de handicap, personnes âgées, poussettes.

Au bord du champ, Alexandra Farina avertit : « Je vous demande juste d’éviter de toucher la clôture ». Lou ne s’y risquerait pas. « Un jour, j’en ai touché une et j’ai eu un coup de jus », se souvient-elle.

« Avant chaque visite, je préviens les salariés, je regarde la propreté des lieux et vérifie s’il y a des outils qui traînent », précise Alexandra Farina. D’avril à septembre, la salariée organise environ une visite par semaine. Des scolaires principalement, mais aussi des adultes en Ehpad ou des familles.

Si les visites « participent à l’image de marque » de la ferme, y compris pour trouver des salariés, « en termes de revenus, cela reste anecdotique », nuance Alexandra Farina. La visite et la dégustation sont facturées 4,50 € par enfant, et 5,50 € pour un adulte.

« Temps calme »

L’ancien atelier de transformation a laissé la place à une salle de réception pour les visites, qui, pour la ferme normande, permet « d’accueillir en tout temps ». Si ce n’est pas obligatoire, des toilettes sont à disposition du public. L’installation, sommaire, est suffisante : des chaises, des panneaux d’information mais surtout un vidéoprojecteur.

La vidéo de présentation de la ferme introduit chacune des visites. C’est un moyen, pour Alexandra Farina, de « faire déjà imprégner des informations » et surtout de canaliser les enfants. « Quand ils arrivent, le niveau d’excitation est élevé, donc un temps calme, c’est pas mal », indique-t-elle.

Allier animaux et groupe d’enfants demande parfois quelques ajustements. Pour reproduire la traite manuelle d’une vache, les enfants peuvent tester sur une vache en résine avec des trayons en silicone. « Pour les enfants, c’est pas mal d’avoir un moment un peu plus ludique », soutient la salariée.

À l’approche des veaux, Alexandra Farina rappelle à l’ordre les troupes dispersées : « attention, des veaux, ce sont des bébés, on reste calme ! »

À la fin de la visite, chaque élève déguste un yaourt au goût de son choix : chocolat, vanille, myrtille… « Il n’y a pas de réelles contraintes réglementaires sur la dégustation », explique Alexandra. Il suffit de « respecter les règles d’hygiène basiques ». De manière générale, « les réglementations de l’accueil de visiteurs quand il n’y a pas d’hébergement sont assez souples », considère-t-elle.

Les plus gourmands ont quand même testé discrètement dans le pot de leurs voisins, histoire de ne rien louper de la dégustation. Pas de panique cependant, les yaourts devraient être encore distribués à la cantine. Même s’ils n’auront peut-être pas la saveur d’être dégustés avec les vaches en paysage.