Question au Dr Françoise Millet-Bartoli, « Partager son savoir et son expérience donne du sens à ce qu’on a fait avant »
Depuis quelque temps, je trouve que notre fils Éric, 45 ans, est triste. Il parle avec nostalgie de sa jeunesse. Pensez-vous qu’il traverse cette crise du milieu de vie, dont on parle tant désormais ? Comment le soutenir et peut-il rebondir ?
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«Votre fils ne vit pas forcément une crise, mais il peut ressentir un changement. Peut-être prend-il conscience du temps qui est passé et de ce qui lui reste à vivre, ou de la finitude de l’existence. Il a accompli certaines choses mais pas tous ses projets. S’il vous a suivi dans vos ambitions pour la ferme, ou si au contraire il n’a pas abouti, s’il a des difficultés financières et voit son avenir bouché, il peut avoir un sentiment d’échec de sa vie. Il se questionne peut-être sur le sens de celle-ci. Il ressent au minimum une morosité nostalgique. Mais chez certaines personnes, cette période de doute peut se transformer en une véritable dépression, de légère à majeure, si elles n’ont pas suivi la voie qu’elles espéraient.
Restez attentifs et à l’écoute, même si vous ne comprenez pas ses sautes d’humeur, son repli sur lui et ses colères, difficiles à supporter. Une aide médicamenteuse sera prescrite si la dépression est caractérisée. Quand elle est sévère, elle peut conduire à l’alcoolisme ou au suicide. Évitez de répéter à votre fils « Secoue-toi ! » Suggérez-lui plutôt des portes de sortie.
Heureusement, ce moment de questionnement peut se révéler salutaire, servir à explorer ce à quoi il avait rêvé. Il pourra puiser dans des ressources qu’il n’avait pas encore exploitées. Proposez-lui des activités sportives ou de prendre part à une association. Toutes les idées sont bonnes pour trouver un second scénario.
À cette période de la vie, il est intéressant de commencer à transmettre à des plus jeunes. Former, partager son savoir et son expérience permet de se sentir utile et de donner du sens à ce qu’on a fait précédemment.
Ayant dépassé sa nostalgie, la personne s’investit à nouveau ou décide de changer de lieu de vie, de profession, si les aspects matériels et financiers le permettent.
Il faut beaucoup d’énergie pour sortir de son isolement. Aller vers autre chose n’est pas si facile. Mais pourquoi pas, quand se dessine un bout de deuxième vie, assez épanoui. »
Propos recueillis par Alexie Valois
(1) À lire : La crise du milieu de vie. Une deuxième chance, Françoise Millet-Bartoli, Éditions Odile Jacob.
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