Réduire ses charges en repensant la mécanisation et l’alimentation de ses limousines
David Deneuve a mis en place un système de pâturage tournant en couloir et des prairies multi-espèces afin de diminuer le coût de l’alimentation de ses bovins allaitants.
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« La réduction des charges est plus efficace pour augmenter le revenu que l’accroissement du chiffre d’affaires », lance David Deneuve, installé à La Guerche-sur-l’Aubois (Cher). Il est passé d’une ferme céréalière de 160 hectares, peu rentable, à une ferme d’élevage en bio avec 60 mères limousines. « Au départ, je brassais de l’argent, mais, entre le matériel, les banques, les marchands de fioul et la coopérative, il m’en restait très peu à la fin ! », avoue-t-il.
Au fil de sa transition vers l’élevage bio, il travaille donc sur la diminution des charges, en particulier la mécanisation et l’alimentation, deux postes prépondérants en élevage allaitant. « J’ai compris qu’à chaque fois que je monte sur mon tracteur, ça me coûte de l’argent, raconte-t-il. Je raisonne le dimensionnement de parc matériel. Pour la distribution de fourrages en hiver, un minichargeur de 40 chevaux, qui consomme 2 l/h, suffit. »
Pour l’alimentation, il a conscience qu’une unité fourragère (UF) pâturée coûte quatre fois moins chère qu’une UF récoltée (1). Il optimise son système de pâturage avec un double objectif : allonger la durée du pâturage de toutes les catégories d’animaux et engraisser à l’herbe les animaux de réforme. Après avoir expérimenté le pâturage tournant plusieurs années, il met en place du pâturage tournant dynamique sur la majorité des parcelles. Chaque lot reste de 24 à 48 heures sur un même paddock pour disposer d’une herbe toujours au bon stade, sans pénaliser les repousses. Le chargement moyen au printemps est de 2,5 UGB/ha, ce qui est assez élevé pour une production sans azote de synthèse.
Un pâturage bien organisé
Comme le pâturage tournant dynamique est chronophage, David l’optimise. Les grandes parcelles rectangulaires, héritage de la céréaliculture, sont découpées en couloir de 100 m, avec un fil électrique fixe. Avec un fil amovible, David découpe les couloirs en portion pouvant descendre jusqu’à 0,5 ha. L’investissement total du dispositif a coûté 150 €/ha en 2019. L’un des avantages est de pouvoir moduler facilement la taille de la pâture en fonction de la pousse de l’herbe. Les bouses sont également bien réparties.
L’agriculteur y voit également un autre atout pour l’entretien des parcelles : « Par rapport aux paddocks, les couloirs permettent de travailler mécaniquement, pour le topping ou le broyage de refus, sur des bandes en 3 à 5 ha ». En moyenne, David estime la durée de déplacement des animaux à 5 h supplémentaires par semaine par rapport à un pâturage classique.
Des prairies adaptées aux saisons
Les résultats sont au rendez-vous. L’herbe est broutée ou récoltée au bon stade. Les vaches de réforme et les veaux prennent en moyenne 1 100 à 1 200 g par jour au printemps, sans complémentation, soit 200 à 300 g de plus qu’un pâturage libre. En 2024, David a produit 55 tonnes de viande vive, un très bon résultat par rapport à la moyenne régionale de 22 t/an par exploitation. Néanmoins, les aléas climatiques, en particulier les sécheresses qui arrivent trois années sur quatre, pénalisent la finition des bêtes de réforme à l’herbe, et obligent de terminer l’engraissement à l’auge. La ration est alors fondée sur la luzerne et les céréales produites sur l’exploitation.
En moyenne, le pâturage est interrompu l’été pendant trois mois. David a pour objectif de réduire ce délai à un mois et demi. Il a testé des flores prairiales spécifiques pour la saison sèche à base de chicorée, luzerne, trèfle, fétuque… Il a ainsi réussi à allonger le pâturage de quelques semaines. Pour aller plus loin, il travaille depuis trois ans avec l’Inrae de Toulouse et l’ingénieur Vladimir Goutiers, sur les prairies Capflor, un mélange de 15 à 20 espèces adaptées au lieu d’implantation, au type de sol (pH, humidité du sol, etc.), à la fertilité du sol et à l’objectif de production.
« C’est plutôt prometteur. La composition devrait diminuer la quantité de concentrés consommés », conclut David, qui réfléchit toujours à faire évoluer son système. Il a à cœur de transmettre une exploitation résiliente, s’appuyant sur un revenu décent, un temps de travail raisonnable et la prise en compte du bien-être animal et de la pérennité des sols.
(1) Chambre d’agriculture du Cantal et le réseau Entraide limousin.
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