L’acarien destructeur de l’abeille peut encore être vaincu
Des chercheurs de l’Inrae étudient des abeilles résistantes au parasite dévastateur, le varroa, capables de détecter des cocons de larves infectés.
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Changement climatique, virus, produits phytosanitaires, frelon asiatique… Chaque année, les apiculteurs subissent en moyenne entre 20 et 30 % de pertes au sein des colonies d’abeilles. Avec ceci s’ajoute la présence d’un ennemi redoutable venu d’Asie sur le territoire depuis 40 ans : le varroa destructeur, une espèce d’acariens parasites de l’abeille adulte. Une colonie non traitée peut s’effondrer en l’espace de quelques mois.
« Nous travaillons sur la sélection d’abeilles résistantes au varroa, capables de développer naturellement des stratégies pour maintenir la population de parasite sous contrôle ou de moins souffrir des effets du parasitisme. Un des critères majeurs de la résistance des abeilles est le comportement hygiénique », déclare Fanny Mondet, chercheuse dans l’unité abeilles et environnement sur le site Inrae (1) d’Avignon (Vaucluse) lors d’un point avec la presse tenu par l’Inrae ce mercredi 26 juin 2024.
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Le comportement hygiénique
En observant des ruchers abandonnés, les chercheurs ont fait la découverte d’une conduite inattendue : le « comportement hygiénique ». C’est-à-dire ? Des abeilles adultes vont être capables de détecter que quelque chose ne va pas dans le couvain (cocon des larves). Elles vont alors le détruire et le nettoyer pour réduire la propagation du parasite. En clair, elles font « le ménage ». « Il y a une certaine hérédité, ce qui en fait un critère sélectionnable par les apiculteurs », se réjouit la chercheuse de l’unité.
Actuellement, le varroa est considéré comme le principal bioagresseur en France et dans le monde. Redouté par les apiculteurs, ce « poux d’insecte » est associé à un certain nombre de virus chez l’abeille. « En se nourrissant directement sur l’insecte pollinisateur, il va transmettre des virus. Il peut aussi affaiblir le système immunitaire des abeilles et les rendre plus vulnérables aux infections virales », détaille Fanny Mondet.
La lutte médicamenteuse au cours l’hiver et en fin de récolte est la méthode la plus employée par les apiculteurs. Le problème ? L’arsenal de médicaments disponibles sur le marché reste restreint, sans compter l’adaptation progressive du varroa à certaines molécules. De plus, cette méthode reste incompatible avec l’agriculture biologique.
Une sélection difficile
Il ne faut pas sauter de joie trop vite, selon la scientifique. « Le problème c’est qu’il faut mesurer ce comportement hygiénique pour l’exploiter. Or, il n’existe pas d’outils dont les apiculteurs puissent s’emparer facilement pour les mettre en pratique », souligne-t-elle.
Une des premières pistes de recherche serait les phéromones. Ces substances chimiques constituent un moyen de communication entre les abeilles pour échanger des informations. Sur ce sujet, Fanny Mondet a fait une trouvaille. Certains cocons parasités émettent des phéromones pouvant être détectés par les abeilles et qui les incitent à les nettoyer. En caractérisant ces substances spécifiques et en les donnant aux abeilles, ces dernières peuvent se débarrasser d’elles-mêmes des couvains infectés.
Toutefois, l’application de ces substances chimiques sur le terrain a des effets différents entre les colonies. Celles connues pour être « très hygiéniques », vont beaucoup répondre aux phéromones tandis que celles considérées comme « peu hygiéniques » auront une réaction moindre.
« On fait des travaux pour développer une méthode d’application de ces substances mobilisables par les apiculteurs pour identifier les colonies avec du potentiel de résistance face au varroa et qui seraient en mesure de mieux survivre. Tout cela en complément de la lutte médicamenteuse », conclut-elle.
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