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Nouvelles techniques génomiques : où en est-on ?

Le futur règlement européen sur les nouvelles techniques génomiques est suspendu à la position de quelques pays clés, comme l'Allemagne ou la Pologne. Il ne prendra pas effet avant 2027 ou 2028, selon l'AFBV.

Où en sont les discussions européennes sur la future réglementation relative aux nouvelles techniques génomiques (NBT, ou NGT) ? Le point avec l’Association française des biotechnologies végétales (AFBV).

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Depuis plus d’un an, l’Union européenne travaille sur sa future réglementation qui encadrera les nouvelles techniques génomiques (NBT, ou NGT). Le processus est pour l’heure dans l’attente de l’adoption de la position du Conseil de l’Union européenne. Après un premier échec pour se mettre d’accord en décembre 2023, les ministres de l’Union européenne ont voté un nouveau texte de compromis en mars 2024.

Pas de majorité qualifiée pour le moment

Ce texte n’a pas obtenu de majorité qualifiée, qui nécessite l’accord de 15 pays représentant 65 % de la population au minimum. En effet, les 17 pays ayant voté en faveur du texte (France, Italie, Danemark, Espagne, Portugal, Estonie, Pays-Bas…) représentent 58 % de la population.

La Hongrie, l’Autriche, la Pologne, ou encore la Roumanie sont opposées au texte en l’état. Et quelques pays se sont abstenus du fait de compromis de coalition ou d’absence de position nationale : la Belgique, l’Allemagne, et la Bulgarie.

Danemark : une future présidence européenne « enthousiaste » pour les NBT

« Il faut espérer que la communauté scientifique de l’Union européenne va continuer à se mobiliser, tout comme les filières agroalimentaires en Pologne et en Allemagne en 2025 », estime Philippe Dumont, administrateur de l’AFBV et responsable des relations internationales. En effet, pour atteindre les 65 %, l’approbation de l’Allemagne (18,81 % de la population européenne) ou de la Pologne (8,2 %) serait suffisante.

La Pologne prendra la présidence tournante de l’Union européenne au 1er janvier 2025, et l’Allemagne connaîtra des élections fédérales en septembre 2025. Et « il faut préparer la présidence danoise [qui débutera en juillet 2025], car ils sont enthousiastes pour les NBT », juge Philippe Dumont.

Par ailleurs, « il faut répondre aux questions de la Roumanie » relative au protocole de Carthagène (accord international qui donne une définition des OGM). Ce pays voudrait obtenir l’assurance que les plantes NBT-1 ne sont pas considérées comme des OGM par ce texte ratifié par plus de 170 pays. Il craint que l’incertitude sur la question puisse bloquer les exportations agricoles de NBT-1 vers les pays tiers.

Des variétés NBT pas avant 2031

Une fois que le Conseil aura adopté sa position, le processus législatif pourra reprendre, avec des négociations en trilogue entre le Parlement européen, la Commission et le Conseil. Philippe Dumont souligne que la position du Parlement européen n’est pas identique à celle du Conseil. Par exemple, et contrairement à la position de leur État au Conseil, les eurodéputés allemands sont favorables au texte, tout comme les élus belges ou les Roumains. Cette situation est « incroyable », mais « positive », estime l’administrateur de l’AFBV.

Après une éventuelle adoption, « il faudra au moins deux ans avant que les lignes directrices ne soient adoptées ». Selon l’AFBV, le règlement ne prendra probablement pas effet avant 2027 ou 2028. Et les premières variétés NBT-1 pourraient être disponibles aux alentours de « 2031, 2032, 2033 ? », suppose Philippe Dumont.

Stade laboratoire

L’adoption déclenchera le processus d’évaluation des variétés qui prend au minimum deux ans. Et « ce qu’il y a dans les laboratoires actuellement, ce sont des génotypes dans lesquels on a modifié par NGT un certain nombre de gènes, et non pas des variétés qui pourraient directement être utilisées par les agriculteurs », précise Thierry Langin, président de l’AFBV. Il faut ensuite transférer ces innovations dans un fond génétique d’intérêt, puis en évaluer les performances.

Essais détruits en Italie

Il est actuellement possible de réaliser des essais NGT en plein champ dans l’Union européenne, en respectant le protocole des OGM. Cela a par exemple été fait récemment en Italie et en Belgique. En France, « il y a un certain traumatisme lié aux faucheurs volontaires et à la Justice qui ne punit pas très sévèrement ceux qui détruisent les essais », juge Philippe Dumont. En Italie, une parcelle de riz NBT a été détruite en juin 2024.

En attendant la réglementation européenne, il est possible d’évaluer ces variétés dans un autre pays, par exemple aux États-Unis, mais le processus coûte « atrocement cher », indique Thierry Langin. Pour l’heure, les laboratoires « ont arrêté de travailler » sur ces projets car ils ont fait « tout ce qu’ils pouvaient faire ».

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