Louis Mermaz, l'ex-ministre de l'Agriculture, est mort
L’ancien ministre de l’Agriculture de François Mitterrand est mort le 15 août 2024. Durant ses deux ans en poste, il a porté la réforme de la Pac de 1992 et lutté face aux États-Unis dans les négociations des accords du Gatt.
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Député, sénateur, président de l’Assemblée nationale, porte-parole du gouvernement, ministre des Relations avec le Parlement, de l’Équipement, en charge des Transports et maire de Vienne… Louis Mermaz, socialiste proche de François Mitterrand et décédé le 15 août 2024, a multiplié les fonctions de représentants de la Nation, dont celle de ministre de l’Agriculture.
En poste du 3 octobre 1990 au 2 octobre 1992, Louis Mermaz a suivi les gros dossiers internationaux de l’époque : la réforme « Mac Sharry » de la Pac et les négociations du Gatt (Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce) sur le libre-échange.
Réforme de la Pac
« Louis Mermaz fut un acteur majeur au cœur d’une des premières grandes réformes de la Pac, celle de 1992 », saluait le ministère de l’Agriculture dans un hommage à l’homme politique le 16 août 2024.
Alors qu’aujourd’hui, la question du « prix plancher » est plus que jamais sur le devant de la scène, la réforme de la Pac en 1992 abandonnait les « prix garantis » au profit de paiements directs aux producteurs. Les prix garantis permettaient alors aux agriculteurs français d’exporter leurs produits à bas prix à l’étranger.
« La réforme met fin à la garantie des prix illimités et à la surproduction, dont le prix de gestion est devenu trop onéreux et déséquilibre le budget de la Communauté européenne », éclaircit le ministère de l’Agriculture dans un hommage à l’ex-ministre le 16 août 2024.
À cette époque, Louis Mermaz s’inquiète d’une fin abrupte des prix garantis et réclame un mécanisme d’étalement sur cinq ans pour en atténuer les effets. D’autant qu’une compensation pour les agriculteurs français coûterait cher à l’État, écrivaient les journalistes de La France Agricole de l’époque dans le numéro du 13 mars 1992.
Finalement, ce fut une « moisson maigre » avec un « fort rejet des agriculteurs », rapportait un article de La France Agricole en date du 25 septembre 1992. Au remaniement du 2 octobre 1992, Louis Mermaz sera relégué au ministère des Relations avec le Parlement.
Négocier pour les accords du Gatt
Mais l’ex-ministre a, en deux ans, aussi dû gérer les négociations des accords du Gatt intervenant au même moment que la réforme de la Pac, obligeant la Communauté économique européenne (CEE, ancêtre de l’Union européenne) à jouer sur deux tableaux.
« Une majorité de pays souhaite régler le Gatt avant la Pac, alors que la France veut réformer la Pac pour se protéger du Gatt », observaient les journalistes de La France Agricole dans le numéro du 13 mars 1992, rapportant les propos de Louis Mermaz : « L’autruche européenne a le nez dans le sable du Gatt. »
L’ancien ministre de l’Agriculture est aussi intervenu lors des dernières négociations des accords du Gatt fondant l’OMC, Organisation mondiale du commerce, entre 1986 et 1994, sur la question de l’intégration des produits agricoles à la réduction des droits de douane.
À ce moment, le Gatt envisage d’« harmoniser les règles commerciales, notamment dans le secteur agricole, en vue de lever les subventions aux exportations permettant l’accès aux marchés intérieurs », précise le ministère dans son hommage. Le ministre de l’Agriculture, Louis Mermaz, craint une réduction des exportations agricoles de la France si la Commission européenne abaisse ses subventions à l’agriculture, comme le demandent des États-Unis.
« Diplomate de haut vol »
« Il dut batailler, en diplomate de haut vol, pour négocier le volet agricole des accords du Gatt », a salué le 16 août l’Élysée. Mais les journalistes de La France Agricole faisaient état, au début des négociations, d’une certaine « tiédeur » dénoncée par des parlementaires, du gouvernement français d’accepter la baisse des aides européennes. Le tout jeune ministre de l’Agriculture — en poste depuis le 3 octobre — était alors sifflé par les agriculteurs pour avoir affirmé que les agriculteurs « revendiqu [aient] un standard de vie comparable à celui des habitants ».
Mais à quelques mois de l’accord de novembre 1992, qui débloquent les négociations agricoles entre les États-Unis et la CEE, c’est bien une « fermeté » de la part des ministres européens qui est soulignée par La France Agricole, dans son numéro du 25 septembre 1992.
Une chose est sûre, Louis Mermaz a effectivement « joué un rôle politique direct » comme ministre de l’Agriculture dans ces négociations historiques. Une impression qu’il partageait en 2013 au micro de France Culture à la sortie de ses mémoires tout en confiant qu’il avait « beaucoup aimé ce ministère de l’Agriculture ».
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