« Nous cultivons du maïs population avec douze fermes »
En échange de deux jours de travail par an, les éleveurs du groupe « Autonomie 36 » s’approvisionnent en maïs population grâce à une gestion collective.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
En cette fin de mois de mars, une dizaine de personnes s’affaire pour égrainer, peser et répartir les semences de maïs. Chacun repart avec quelques sacs, en fonction de ses besoins, sans échange d’argent. « Sans le maïs population, nous aurions arrêté le maïs car les semences hybrides sont trop chères. En bio, on frôle les 300 €/t. Là, nous donnons simplement un coup de main », lance Bertrand Joyeux, éleveur à Saint-Plantaire, au sud de l’Indre, avec Charlotte Buisson et Nicolas Calame, au sein du Gaec des Ossons. Ils élèvent trois troupeaux : 210 chèvres laitières, 40 bovins allaitants et 120 brebis limousines, sur 140 ha.
Une douzaine de fermes, réparties à 80 km autour d’Aigurande, cultive ensemble des semences de maïs population pour l’ensilage. L’état d’esprit du groupe est simple : « tu viens travailler, tu auras de la semence ». Un adage possible car les charges de mécanisation sont très faibles.
Une seule variété, la Portuffec
En 2007, Philippe Auvillain, le président de l’époque de la Cuma des Sauzettes, rapporte un kilo de semences du Périgord avec trois variétés : Sirex, Lavergne et Portuffec. Depuis, le groupe, qui s’est structuré en 2019 en groupement d’intérêt économique et environnemental (GIEE) « Autonomie 36 », a testé cinq variétés et en a gardé qu’une seule, Portuffec.
« En bio, les semis de maïs ne sont pas réalisés avant le 10 mai. Lors des années humides, en Sirex et Lavergne, les grains n’étaient pas mûrs. Nous avons donc sélectionné uniquement les meilleures poupées de Portuffec. Après quinze ans de pratique, nous avons une semence précoce, adaptée à notre territoire », explique Nicolas Calame. Le fait de ne retenir qu’une seule variété ouvre les discussions au sein du groupe. « Tout le monde veut préserver la biodiversité, mais personne ne veut produire du Lavergne chez lui », commente l’éleveur, en souriant.
Lors du chantier de récolte, environ 600 poupées (l’équivalent de quatre hectares), les plus belles et plus précoces, sont cueillies à la main par les éleveurs du groupe et mises de côté pour « la semence de la semence ». Le reste est récolté avec le corn-picker (2 500 €) de la Cuma, et réparti pour semer du maïs ensilage. Le maïs est séché en crib, un long couloir grillagé situé en plein vent, juste derrière le bâtiment avec le séparateur. « Avec le carburant, cela nous revient à environ 20 €/ha en mécanisation, calcule Charlotte Buisson. Pour le séchage, pas d’énergie fossile, donc pas de charge. »
La « semence de semence » est produite sur quatre fermes afin de diminuer le risque climatique. Elle est semée à 80 000 pieds/ha. Les éleveurs passent la herse étrille en prélevée, puis deux binages sur le rang. Ici, personne n’irrigue le maïs. Le secteur d’Aigurande bénéficie d’une pluviométrie élevée (1 200 mm en 2023). « La plante a surtout besoin d’eau à la levée et à la floraison. Avec le maïs population, la période de floraison est assez longue, entre trois semaines et un mois, contre une semaine pour les hybrides. Les rendements sont plus homogènes, les mauvaises années, le maïs est moins impacté », ajoute Bertrand Joyeux.
En moyenne, sur les 60 à 100 ha, le rendement à l’ensilage est de 5 à 12 t/ha, et de 3 à 7 t/ha en grain. En plus du coût matériel, il y a le coût du travail. Les éleveurs sont mobilisés une journée en octobre et une journée en mars. « Le groupe apporte une certaine discipline et les chantiers font vivre notre campagne et maintiennent le lien entre les fermes », conclut Nicolas Calame.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :