L’Assemblée nationale achève l’examen de la loi d’orientation
L’Assemblée nationale a achevé dans la nuit de vendredi à samedi l’examen en première lecture du projet de loi d’orientation agricole. Ce texte se veut l’une des réponses de l’exécutif à la colère agricole, dont plusieurs mesures ont été critiquées pour leur potentiel impact environnemental.
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Le texte, sur lequel exécutif et députés ont ferraillé durant deux semaines, sera soumis à un vote solennel mardi, le 28 mai 2024, avec de fortes chances d’être adopté. Le gouvernement espère notamment le soutien d’une droite largement impliquée dans son évolution.
Après 67h de débat, 5599 amendements examinés, l’examen de la LOA s’est achevé ce samedi à 2h00 à @AssembleeNat. Rendez-vous ce mardi 28 mai à 16h30, après les QAG , pour le vote solennel ! #agriculture#formation#installation#transmission@DeputesRE@AN_AfEcopic.twitter.com/KKVFcq0ZQI
— STEPHANE TRAVERT Avec Vous (@StTRAVERT) May 25, 2024
Le caractère « d’intérêt général majeur » de l’agriculture
L’une de ses dispositions phares confère à l’agriculture un caractère « d’intérêt général majeur », sorte de miroir de « l’intérêt général » environnemental déjà existant. Cela concrétise ainsi une promesse d’Emmanuel Macron faite au Salon de l’agriculture en pleine colère paysanne.
Sans remettre en cause le principe constitutionnel de la protection de l’environnement, il s’agira de permettre « lorsque plusieurs dispositions législatives seront en présence, voire seront contradictoires », d’accorder à l’agriculture « une attention spécifique », a expliqué la rapporteure Nicole Le Peih (Renaissance).
Les oppositions ont regretté que le texte fasse l’impasse sur certaines questions, telles que le revenu agricole.
Inquiétudes à gauche pour l’environnement
À gauche, l’inquiétude porte aussi sur les risques de recul pour l’environnement. Le gouvernement a fait adopter un amendement qui « réserve la qualification de délit aux cas dans lesquels les faits ont été commis de manière intentionnelle ».
L’ancienne ministre de l’Écologie, Delphine Batho, a fustigé une adaptation du droit qui s’appliquera, selon elle, à tout type d’infrastructures, bien au-delà des agriculteurs.
« En mettant la notion de caractère intentionnel de la destruction de la nature, (l’amendement) délivre un permis de détruire la nature et d’impunité générale. […] Il n’y a jamais eu de remise en cause aussi brutale et aussi violente de toutes les directives européennes sur la protection des espèces et des habitats protégés », a-t-elle dit, dénonçant l’absence sur les bancs de l’Assemblée du ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu.
Les écologistes ont annoncé qu’ils saisiraient le Conseil constitutionnel en cas d’adoption définitive du texte. « Si vous restez au statu quo, vous avez des gens qui, pour des délits non intentionnels, sont menacés de trois ans d’emprisonnement ou 150 000 € d’amende », a justifié le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau.
Vous trouvez normal qu'on sanctionne un exploitant de bonne foi avec la même sévérité que les délinquants et criminels ?
— Marc Fesneau (@MFesneau) May 24, 2024
Moi pas.
Nous ne revenons sur aucune norme environnementale, mais il faut de la mesure, du bon sens.
Ce que nous voulons, c'est de ne plus voir un seul… pic.twitter.com/qU7EtH5nC9
Simplification des contentieux administratifs
Autre point d’inquiétude, la simplification des contentieux administratifs contre les projets de retenues d’eau ou d’élevages relevant de la réglementation sur les ICPE (installations classées pour la protection de l’environnement).
La gauche a rappelé l’avis négatif du Conseil d’État sur cet article présentant des « risques d’inconstitutionnalité », et de la défenseure des droits, qui a estimé qu’il portait « atteinte au droit au recours ».
« C’est la plus grave régression agroenvironnementale de l’histoire de France », a protesté la députée Aurélie Trouvé (LFI). « On ne vient pas dire qu’il n’y a pas de recours. On vient juste dire qu’il faut que ça aille plus vite », a rétorqué Marc Fesneau.
Le gouvernement s'attaque au droit de l'environnement. Il dédouane les agriculteurs de toute intentionnalité de dommage écologique à priori.
— Aurélie Trouvé (@TrouveAurelie) May 24, 2024
Un danger pour nos écosystèmes !⚠️
Les agriculteurs ont besoin de revenus dignes, pas que certains puissent impunément détruire le vivant. pic.twitter.com/57CMKgLDdR
Le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, et les rapporteurs ont défendu bec et ongles une « brique » législative, « utile ». Marc Fesneau a renvoyé à la rentrée pour des débats sur les produits phytosanitaires ou le revenu des paysans.
On dit qu’il faut plus de projets d’élevage, mais dès qu’il y en a, on les plante !
— Marc Fesneau (@MFesneau) May 25, 2024
On a besoin d’avoir des délais qui soient plus courts, qu’on puisse dire oui ou non dans des délais qui ne sont pas des délais d’épuisement pour les porteurs de projet.
Aucun d’entre nous… pic.twitter.com/crj9rqrnsx
Les députés ont validé certains objectifs à long terme pour l’agriculture, comme le fait de viser 400 000 exploitations et 500 000 agriculteurs d’ici à 2035, des mesures sur la formation (création d’un nouveau diplôme bac + 3), ou encore la mise en place d’un guichet unique départemental pour accompagner les agriculteurs voulant s’installer ou céder leur exploitation.
Les députés ont par ailleurs approuvé un article qui simplifie le régime juridique concernant les haies.
Le camp présidentiel, minoritaire, a en revanche renoncé à réintroduire la création d’un outil de portage du foncier (GFAI), que l’opposition voyait comme une porte trop grande ouverte à la financiarisation de l’agriculture. Il pourrait revenir lors de l’examen au Sénat.
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