Elle reprend le flambeau de l’élevage de lapins
À 26 ans, Élodie Guillotel s’est installée avec sa mère Claudette en production cunicole et se diversifie en créant un site porcin.
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Élodie Guillotel a réalisé son rêve d’enfance : « S’établir sur l’élevage familial de lapins », à Augan, dans le Morbihan. En octobre 2023, elle a repris un site cunicole, comprenant 30 ha de terres, et l’a fusionné avec celui de sa mère, Claudette, distant de 8 km, pour créer un atelier de 3 420 cages mères. Son père, Alain, travaille sur l’exploitation comme salarié après avoir pris sa retraite en 2020. Habituée très jeune à aider ses parents, Élodie a su très vite qu’elle voulait reprendre le flambeau.
Après des études agricoles (bac STAV, BTS en productions animales, licence métiers du conseil en alternance), elle a commencé sa carrière comme technicienne en élevage porcin chez l’entreprise de nutrition animale Sanders, tout en préparant son installation. « Je visais de démarrer à 25 ans, pour réaliser une transmission progressive avec mes parents sur cinq ou six ans », explique la jeune éleveuse très déterminée.
Ses parents lui ont transmis leur passion de l’élevage de lapins. « Je les ai toujours vus heureux au travail. Contrairement à certains camarades de classe, j’avais la chance de les retrouver en rentrant de l’école et de passer du temps avec eux. » Malgré les crises sanitaires et économiques qui ont secoué la filière, Élodie n’a jamais perçu ce métier comme une contrainte.
Contrats de reprise
Comme dans la course à pied qu’elle pratique en compétition (National 3), Élodie s’est investie à fond avec des objectifs, échelonnés sur cinq ans. Dès le départ, elle a souhaité spécialiser la production de lapins en affectant un site au naissage et deux autres à l’engraissement. En tant que jeune agricultrice, elle bénéficie d’un engagement de reprise sur 10 ans (de 50 à 100 % des volumes, selon les sites). Et comme tous les producteurs, ses contrats sont indexés sur le prix de l’aliment afin de prendre en compte la variation du coût des matières premières.
« C’est un atout majeur pour sécuriser mon installation et rassurer les financeurs », assure la productrice. Elle a aussi pris l’initiative de faire découvrir son élevage à ses banquiers, le lapin restant encore méconnu, et de partager ses chiffres en toute transparence : « Une vraie force » pour entretenir des relations de confiance.
Diversification en porc
L’autre projet d’Élodie a consisté à diversifier l’exploitation en porc avec un atelier de post-sevrage (780 places) et d’engraissement (1 530 places) en restructurant le bâtiment d’engraissement de lapins du site d’Augan réservé désormais au naissage (2 300 cages mères). L’EARL a aussi pris des parts dans une maternité collective afin de s’approvisionner en porcelets. La construction d’un bâtiment de stockage équipé de panneaux solaires est en cours.
S’agissant d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE), le dossier s’est avéré complexe, long et coûteux. La jeune éleveuse a mal vécu la demande de voisins du hameau de justifier son projet. « Les gens mangent du cochon, mais personne ne veut de porcherie à côté de chez lui ! Finalement, je me rends compte que tout ce travail m’a fait grandir », relativise Élodie, qui espère un démarrage de la production porcine à la fin de 2025. Les investissements atteignent près de 1,5 million d’euros (en porc, lapin et photovoltaïque). Lucide, Élodie sait qu’elle n’a pas le droit à l’erreur et qu'« il faudra sortir des résultats ».
C’est la question du foncier qui a été la plus difficile et la plus énergivore. « Une jeune femme de couleur qui s’installe en élevage de lapins, cela ne plaît pas à certains propriétaires. Sans parler de la pression foncière entre agriculteurs », confie-t-elle. Au final, sur les 130 ha d’origine de l’exploitation reprise, elle n’a pu racheter que 15 ha, propriété du cédant, louer 13 ha, les 2 ha restant nécessitant l’intervention de la Safer. « Je ne comprends pas qu’on mette des bâtons dans les roues à un jeune alors que toute une génération d’agriculteurs va partir à la retraite. »
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