Un ciné-débat sans tabou
Des agriculteurs se prêtent au jeu des questions-réponses face aux habitants de leur territoire.
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S’exprimer en public n’est pas l’exercice préféré d’Aline Dimier, productrice de volailles en Savoie. Mais ce 12 décembre 2024, au cinéma Megarama d’Annecy, elle a pris le micro devant 200 personnes plus ou moins profanes en agriculture. En présentant son élevage en plein air avec des mots simples, elle est applaudie. Trois autres éleveurs sont sur scène avec elle. La salle a le droit de leur poser toutes les questions.
Ils ont une consigne : parler vrai. Quand surgit le sujet du loup, Bernard Marchand, éleveur caprin en Haute-Savoie, explique la nécessité d’acquérir de plus en plus de chiens de protection, causant des soucis avec les promeneurs et leurs chiens. « Cela contrarie notre tradition d’accueil », regrette-t-il. Cédric Laboret, éleveur bovin, essaie de faire passer un message : « les prairies ne sont pas considérées comme des cultures, mais c’est l’assiette de nos vaches qui est piétinée et souillée par les déjections canines ! »
Certains membres du public sont intimidés par le micro, mais les langues se délient autour du buffet. « J’ai eu peur de plomber l’ambiance en posant une question sur le suicide », avoue une dame en aparté à Karine Longeray. L’éleveuse, élue à la chambre d’agriculture Savoie-Mont Blanc, la rassure : « rien n’est tabou ».
Afflux de néoruraux
Cela fait trois ans que la chambre organise des soirées ciné-débat gratuites partout sur son territoire, pour recréer des liens entre agriculteurs et habitants des Savoies. Car la cohabitation y est difficile du fait de l’afflux de néoruraux. La projection d’un film est suivie d’un débat, puis d’un buffet de produits locaux. Chaque fois, trois ou quatre agriculteurs du coin acceptent de se prêter au jeu des questions-réponses. On y parle phytos, bien-être animal, changement climatique, revenu agricole… « Nous ne savons jamais quel sera le public, sourit Karine Longeray. Les questions peuvent être basiques : comment nourrit-on les veaux ou pourquoi écorne-t-on les vaches. Et d’autres sont plus pointues sur la Pac ou le Mercosur. » À en juger par les applaudissements qui ont retenti au cinéma d’Annecy, l’exercice de transparence a porté ses fruits.
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