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En SCIC, l’agriculture coopérative en action

De gauche à droite : Claire Corbel (en stage test), Muriel Camous (stage test), Camille Cosson, Nicolas Brulard, Johan Gennesson et Julie Rascle (associés producteurs).

Le modèle coopératif permet aux associés du Courtil de Quincieux (Auvergne-Rhône-Alpes) de diversifier leurs ateliers et mutualiser leurs compétences, tout en générant rapidement du revenu.

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Avoir des idéaux n’interdit pas d’être pragmatique. À l’aube d’une aventure collective, les associés du Courtil de Quincieux ont voulu « écrire le contrat de divorce avant celui de mariage », résume Nicolas Brulard. Il y a quelques années, l’ingénieur agronome spécialiste des modèles économiques innovants décidait de passer à la pratique. Après un parcours d’installation avec la chambre d’agriculture du Rhône, il reprend les clés d’une ferme maraîchère à Quincieux au début de 2023.

Animé par l’envie de travailler en collectif, il rencontre de futurs associés via des réseaux associatifs. « Nous ne nous connaissions pas, retrace-t-il. La première année, le statut d’EARL a permis de les salarier pour commencer à travailler ensemble tout en réfléchissant au projet. Avant de définir un modèle économique, nous devions nous créer une culture commune : Quel est notre rapport à l’argent, au travail ? Comment s’imagine-t-on dans cinq ans ? Que met-on en commun ? »

Multisociétariat

Avec l’appui de la SCIC (1) Les fermes partagées, puis l’Union régionale des Scop et SCIC, le projet se dessine à quatre associés dans un premier temps, avec l’accueil prévu des deux stagiaires actuels. « Nous ne voulions pas tous être à plein temps sur la ferme, et nous voulions pouvoir évoluer en fonction des situations familiales, pose Nicolas. La SCIC facilite les entrées et sorties des associés, car les parts sociales ne sont pas revalorisées : chacun repart avec son apport. L’entrée d’investisseurs extérieurs permet aussi à la ferme de se développer en limitant les emprunts bancaires. Or nous préférons générer du revenu à court terme que constituer un patrimoine à long terme : nous sommes dans une logique d’usage plus que de propriété. » En tant que société commerciale, la SCIC peut aussi facturer des prestations de services.

Les associés ont racheté le matériel présent et investi dans deux bitunnels et dans un réseau d’irrigation goutte à goutte sur 4 000 m² avec l’aide du Feader. (©  Bérengère Lafeuille)

L’ouverture au territoire était un aspect central de ce projet 100 % en vente directe et locale. Le multisociétariat permet à des particuliers, des acteurs économiques locaux et éventuellement des collectivités, d’intégrer la SCIC (le ticket d’entrée étant d’une part sociale à 500 €). Actuellement, 79 % du capital est détenu par les quatre producteurs. « Il est variable au fil des entrées et sorties d’associés, mais la gouvernance et la prise de décision se basent sur des collèges de vote indépendamment du capital détenu, souligne Nicolas Brulard. La majorité des votes revient aux producteurs. »

Des producteurs salariés

Autre singularité, les quatre producteurs sont associés-salariés de la SCIC : ils sont chefs d’entreprise payés en bulletins de salaire. Moyennant davantage de charges, ils bénéficient d’une meilleure protection sociale. L’objet principal de la société est agricole, auquel s’ajoute de l’achat-revente. À l’atelier principal qu’est le maraîchage s’ajoutent l’arboriculture, les PPAM (plantes à parfum, aromatiques et médicinales), l’apiculture et les fleurs coupées. « La diversification répartit les risques, explique Nicolas. En maraîchage, nous avons au moins quarante légumes ou variétés différentes, et l’achat-revente peut pallier une mauvaise récolte. »

Chaque associé se spécialise à la fois sur un atelier de production et une fonction support : mécanique, vente, administratif… (©  Bérengère Lafeuille)

Chaque associé pilote un atelier, mais aide les autres en fonction des besoins et de ses compétences. Le travail est réparti chaque lundi matin et l’hiver est propice pour échanger sur la stratégie. Tous participent à tour de rôle à la vente à la ferme du mardi soir et au marché du samedi. « Être plusieurs permet de mutualiser des compétences, gagner du temps sur le volet commercial, et prendre des vacances en été », apprécie Nicolas. Tout est mutualisé : chacun touche un salaire identique, quelle que soit la rentabilité de son atelier.

Pour l’instant, en phase de développement, la SCIC verse 750 € nets par mois pour un temps plein aux quatre producteurs associés. Quant aux deux stagiaires, ils sont conventionnés et rémunérés dans le cadre du dispositif STIT (stage test installation transmission).

(1) Société coopérative d’intérêt collectif.

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