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Du lentillon champenois bio

« L’itinéraire cultural du lentillons champenois nécessite très peu d’interventions », indique Vincent Gauvain qui en produit 8 hectares chaque année.

Dans le nord de la Marne, l’assolement très diversifié de la Ferme de la Noue Saint-Rémy comporte une légumineuse d’automne typique de la Champagne crayeuse, vendue en direct par Vincent Gauvain.

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L’exploitation familiale ayant été reprise par son frère, Vincent Gauvain, qui a toujours voulu être agriculteur, a d’abord suivi une autre voie. « J’ai obtenu un BTS en gestion et comptabilité, puis j’ai travaillé en tant que comptable auprès d’exploitants et d’une quinzaine de Cuma pendant treize ans », se remémore-t-il. En parallèle, Vincent suit une formation et obtient un BPREA (1).

C’est en 2007 qu’il rencontre son futur cédant lors de la visite d’une plateforme d’essais. « Il cherchait à céder sa structure de 57 hectares à un jeune qui poursuivrait sa conduite en agriculture biologique, explique-t-il. Un projet en cohérence avec mes aspirations. » Installé hors cadre familial depuis 2011 sur la commune de Beine-Nauroy (Marne), l’agriculteur de 42 ans est aujourd’hui à la tête de la Ferme de la Noue Saint-Rémy, d’une surface de 129 hectares, après la reprise d’une structure située dans le même village en 2016.

Éviter le salissement des parcelles

Implantée en Champagne crayeuse, sa ferme dénote dans la plaine. « Nous sommes peu d’agriculteurs bio dans le secteur et je produis jusqu’à quatorze cultures selon les années. Je m’apprête à implanter 2 000 mètres linéaires de haies, ce qui m’a donné l’occasion de redécouper mon parcellaire. L’exploitation en compte désormais seize, de huit hectares, analyse-t-il. Le but est d’alterner une culture de printemps et une culture d’automne pour éviter le salissement des parcelles. »

Luzerne, orge d’hiver, orge de printemps, avoine de printemps, chanvre, seigle, mélange pois et triticale fourrager, épeautre, betteraves sucrières, blé de printemps ou encore sarrasin, composent son assolement. Si le blé d’hiver trouve habituellement sa place sur la ferme, l’agriculteur a décidé ne pas en semer cet automne, par manque de débouché. « Le marché du bio est actuellement très compliqué », rappelle-t-il.

Lorsque Vincent a repris la ferme, une culture atypique faisait déjà partie de l’assolement : le lentillon champenois. Une légumineuse dont la production dans le secteur est ancestrale. « Elle a été quasiment abandonnée et relancée dans les années 1980 par un agriculteur du sud de la Marne », relate-t-il. Une culture à laquelle il est attaché et qui compte de nombreux avantages. « C’est la seule variété de lentille qui se sème à l’automne car elle ne craint pas le gel. Le lentillon se plaît dans des sols pauvres et non gorgés d’eau comme les nôtres. Je l’implante à 80-90 kg par hectare, en association avec du seigle semé à 35 kg », précise-t-il.

La céréale sert de tuteur pour éviter la verse. Une fois le semis réalisé, l’agriculteur n’intervient quasi plus dans la parcelle avant la récolte, à la fin de juillet. « Un désherbage mécanique est envisageable, mais le risque est de blesser la plante. J’évite donc de le faire et j’essaye de respecter une rotation de 9 à 10 ans », argumente-t-il. Une fois récoltés, la « petite perle de Champagne », dont les rendements sont en moyenne de 8 à 9 quintaux par hectare, et le seigle sont acheminés à une soixantaine de kilomètres pour être triés par une Cuma qui a investi 160 000 euros il y a dix ans. « Plusieurs étapes de tri sont nécessaires. La dernière consiste à passer les lentillons au trieur optique », précise Vincent.

Une production bio épargnée

Contrairement aux autres productions de la ferme, la légumineuse est commercialisée en vente directe. « Je propose cinq formats, allant du sachet de 500 grammes au sac de 25 kg. Mes clients sont des particuliers, des professionnels tels que des magasins à la ferme, des restaurateurs ou des cantines scolaires. J’écoule sept à huit tonnes de marchandise par an, ce qui représente ma production annuelle à laquelle s’ajoute, au besoin, des lentillons provenant de la récolte de collègues », détaille l’agriculteur. Vendus de 2,20 à 6,00 euros le kilo selon le conditionnement, les lentillons de Vincent trouvent facilement preneur, à proximité de la ferme, dans d’autres régions et parfois à l’étranger.

La ferme de la Noue Saint-Rémy commercialise entre 5 000 et 6 000 sachets de 500 grammes et un kilo par an de lentillons champenois auprès de particuliers ou de professionnels. (©  Bertille Quantinet)

« Je n’ai plus besoin de démarcher », reconnaît-il. Si les productions de la Ferme de la Noue Saint-Rémy subissent de plein fouet la crise actuelle du bio, le lentillon champenois est épargné. « Il n’est pas impacté par l’augmentation des charges que nous pouvons connaître par ailleurs. La production régionale, qui occupe une centaine d’hectares, est conduite quasi entièrement en agriculture bio. Il n’existe pas de concurrence avec les produits conventionnels et la demande augmente. Ces atouts ont poussé la vingtaine de producteurs actuels à demander une IGP (indication géographique protégée) pour valoriser la légumineuse et donner envie à d’autres de se lancer.

(1) Brevet professionnel de responsable d’exploitation agricole.

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