Login

Du courage pour prendre un deuxième départ

Florence Bitauld valorise des parcours avec ses chèvres, qui ont bien débroussaillé et réouvert le milieu.

Après avoir perdu ses bâtiments dans un incendie, Florence Bitauld a reconstruit et relancé sa production de fromages fermiers.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Florence Bitauld n’est pas près d’oublier le 4 juillet 2017. Ce jour-là, un incendie accidentel détruit la bergerie, la fromagerie ainsi que son logement situé au-dessus. Le troupeau de brebis laitières, au pâturage, est préservé, de même que le stock de foin et la cave d’affinage. Dans l’urgence, Florence doit traire à la main avec l’aide de ses amis et voisins et tarir rapidement ses brebis. Puis, il faut prendre des décisions. « Je ne me voyais pas partir en laissant des ruines derrière moi, témoigne la jeune éleveuse de Rouffiac-des-Corbières, dans l’Aude. Après avoir démarré à zéro ici en 2010 sur des terres en friche, j’avais trouvé ma place. J’ai fait face et choisi de reconstruire. »

Florence Bitauld fabrique des crottins, des tommes et des fromages à pâte molle. (©  Frédérique Ehrhard)

À la fin de 2017, elle se sépare de son compagnon. Continuer seule avec trois jeunes enfants n’est pas un mince défi ! Pour reconstruire, il faut du temps. Heureusement, Florence est bien assurée. Les indemnités lui permettent de solder les prêts en cours et de vivre jusqu’à ce qu’elle produise à nouveau. Une bergerie tunnel abrite provisoirement le troupeau. « Durant cette période, nous avons logé dans un mobil-home. Dans deux autres, j’ai accueilli des woofers. Sans leur aide, je n’aurais pas réussi à m’en sortir. »

Un nouveau départ

Avec 250 000 € d’indemnités, 160 000 € de nouveaux prêts et 90 000 € de subventions, Florence finance le remplacement des brebis par des chèvres, la construction de la chèvrerie, de la fromagerie et de son habitation. « Il m’a fallu deux ans pour monter les dossiers. Les travaux, en plein Covid, ont ensuite pris quatre mois », raconte-t-elle.

Au début de 2021, la jeune éleveuse recommence enfin à traire et à fabriquer des fromages. Pour faire face à tout le travail, elle doit embaucher un salarié à temps partiel, tout en cherchant un associé. Après plusieurs essais infructueux, c’est finalement son nouveau compagnon, Sébastien Sola, qui vient l’épauler après avoir quitté son emploi dans un mas viticole. « Nous sommes deux à regarder dans la même direction », apprécie Florence.

Son compagnon Sébastien Sola l'a rejoint sur la ferme, et en 2024 ils vont créer un Gaec ensemble. (©  Frédérique Ehrhard)

Aujourd’hui, elle élève en bio une centaine de chèvres conduites en lactation longue afin d’avoir du lait toute l’année. « Cela m’a aidé à reconstituer une clientèle après trois ans et demi d’arrêt », note-t-elle. La gamme s’élargit et comprend plus de fromages frais. « Avec les brebis, je produisais surtout de la tomme, moins bien valorisée. Avec les chèvres, le chiffre d’affaires a progressé de 50 % », observe la jeune femme. Pour gagner du temps, elle arrête les marchés et étoffe son réseau de revendeurs, ne gardant que quelques ventes à la ferme.

Des tâches partagées

Sébastien, formé à la mécanique agricole, prend en charge les travaux des champs et l’entretien du matériel. « Je peux me concentrer sur l’élevage, la transformation et la vente », explique Florence. Un salarié à temps partiel et deux apprentis les aident. Il faut encore garder le troupeau de temps en temps sur les parcours. Sébastien entreprend d’installer des parcs avec des clôtures fixes, ce qui va faciliter la gestion du pâturage.

Il remet également en culture des terres en fond de vallée afin de produire des céréales. « Nous allons pouvoir faire une rotation avec les prairies de sainfoin et de luzerne que Florence avait déjà mis en place », précise-t-il. L’autonomie fourragère va ainsi s’accroître. « Nous n’avons plus besoin d’acheter de céréales.

Cela représente déjà 8 000 € d’économie », souligne Florence, qui compte par ailleurs améliorer la productivité de ses chèvres. L’an prochain, Sébastien va s’installer officiellement en Gaec avec elle, ce qui va amener une part d’ICHN en plus. « Il y aura de quoi dégager deux revenus », estime la jeune femme, rassurée de voir l’équilibre économique de la ferme s’améliorer.

La charge de travail reste importante. « Notre prochain défi est d’améliorer notre organisation afin de libérer du temps le week-end. À deux, nous avons cinq enfants que nous avons envie de voir grandir », relève Florence, qui a également besoin de lever le pied. « À 44 ans, après deux installations successives en dix ans, il est temps de souffler un peu ! », lance-t-elle.

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement