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AllemagneLa liberté de s’agrandir a un p AllemagneLa liberté de s’agrandir a un prix

Ni contrôle des structures, ni Safer, pas davantage de statut du fermage. Un rêve pour les entrepreneurs ? Beaucoup d’incertitudes aussi.

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Martin Beck a grandi à l’Ouest. Aujourd’hui, il est installé à l’Est. En 1992, l’exploitation reprise comptait 180 hectares, dont 45 ha en propriété. En 2015, Martin détient, en individuel, 740 ha en propriété (il en loue une partie à un autre agriculteur) et 456 ha en location. « À chaque fois qu’une terre se libère, j’essaie de l’acheter », explique-t-il.

Pression foncière

En moyenne, dans sa petite région agricole, les prix s’établissent autour de 18 500 €/ha, contre 8 000 €/ha en 2009. Ils sont fixés en fonction d’un système simplifié de cadastre, établi en 1936 et jamais réformé depuis, qui classe chaque parcelle en fonction de sa productivité (critères géologiques, argileux, sableux, limoneux…), de 0 à 100 points. « Sur l’exploitation, je suis autour de 75 à 80 points, précise Martin. Mais les prix diminuent, du fait de l’embargo russe, qui fait perdre de la compétitivité à nos fermes. »

A quarante-six ans, jamais il n’a rencontré d’obstacle à son agrandissement. Ni contrôle des structures, ni Safer, pas davantage de statut du fermage ne freinent sa liberté d’entreprendre. « Pour acheter librement deux hectares ou plus, il suffit d’avoir la qualité d’agriculteur, et peu importe la nationalité », affirme-t-il. La seule limite, c’est de trouver du foncier : « Chaque année, beaucoup de terres se vendent ou se louent, mais la pression est très forte. Pour chaque parcelle qui se libère, vingt ou trente agriculteurs sont sur les rangs. »

Des propriétaires impliqués

C’est le plus offrant qui l’emporte. Et si les terres sont occupées, nul besoin de prévenir le fermier en place, il ne dispose d’aucun droit de préemption. Toutefois, le prix des terres en est diminué. La durée du bail a également une influence. Mais pour le repreneur, c’est une aubaine, car il suffit d’attendre la fin du bail pour disposer librement des terres, ou… se doter de bons avocats. « Remettre en cause les baux est une pratique répandue », reconnaît Martin Beck, qui s’offre lui-même les services de plusieurs avocats. Le relationnel entre le fermier et le bailleur est néanmoins important, assure l’exploitant. « Chaque année, j’informe mes propriétaires de mes rendements, de la vie de l’exploitation ou de l’arrivée de nouveaux salariés, affirme-t-il. Ce n’est pas une obligation. C’est ma philosophie. »

C’est également indispensable pour garder les terres et s’assurer d’un fermage raisonnable. « C’est du travail », souligne Martin, car il a cent cinquante propriétaires, qui détiennent au plus 5 hectares chacun. Mais, il a ainsi pu négocier des baux d’une durée de dix à douze ans, et à bon prix : 300 et 350 €/ha.

L’exploitant reconnaît cependant que ce libéralisme pose des problèmes. « C’est la loi du propriétaire, confirme-t-il. Le fermier n’a aucune sécurité. » La durée des baux est laissée à leur discrétion, cinq ou six ans en moyenne, et ils peuvent reprendre le bien à échéance, sans motif. Ils sont aussi relativement libres de fixer le montant du fermage. « Il faudrait un système entre celui de la France et le nôtre », estime-t-il.

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