Onze ONG réclament des objectifs chiffrés pour la consommation de viande
Dans une lettre ouverte adressée le 27 mars 2025 au Premier ministre François Bayrou et aux ministres concernés, onze organisations de la société civile dénoncent ce qu’elles considèrent comme un recul majeur dans la stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (Snanc), s'inquiétant de la possible disparition d'objectifs chiffrés de réduction de la consommation de viande.
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Une dizaine d’organisations non gouvernementales, parmi lesquelles le Réseau Action Climat (RAC), CIWF France, la Fondation pour la Nature et l’Homme, WWF-France et France Nature Environnement (FNE), ont adressé le 27 mars 2025 une lettre ouverte au gouvernement. Elles y expriment leur « vive inquiétude » face à la possible disparition d’objectifs chiffrés de réduction de la consommation de viande dans la future Snanc, un plan d’action mis en place pour améliorer l’alimentation des citoyens, tout en tenant compte des enjeux de santé publique et d’environnement.
Cette stratégie, prévue par la loi Climat et Résilience de 2021 et attendue depuis juillet 2023, constitue selon ces organisations un levier essentiel pour accompagner la transition vers un modèle alimentaire plus durable. « Un tel arbitrage ne nous semblerait pas acceptable », tranchent-elles dans leur missive, assurant que la réduction de la consommation de produits d’origine animale fait l’objet d’un large consensus scientifique.
22 % de l’empreinte carbone française
Les signataires s’appuient sur plusieurs études pour justifier la nécessité d’une baisse de la consommation de viande. Selon le Haut-Conseil pour le climat, le système alimentaire représente 22 % de l’empreinte carbone globale de la France, dont 61 % sont attribuables aux produits d’origine animale. Une réduction serait donc « une condition sine qua non pour respecter les engagements internationaux de la France en matière de climat et de biodiversité », estiment-ils.
Concernant les données de consommation, 33 % des adultes consomment plus que la quantité maximale recommandée de charcuterie (150 g par semaine) et 66 % dépassent la limite pour la viande rouge (500 g par semaine), selon Santé publique France. Selon The Lancet Countdown on Health and Climate Change — un projet de recherche international qui suit l’impact du changement climatique sur la santé humaine et évalue les réponses institutionnelles — 28 000 décès sont imputés chaque année en France à une consommation excessive de viande rouge et de produits laitiers, et 57 000 à une consommation insuffisante d’aliments d’origine végétale.
« Moins et mieux »
Le collectif souligne aussi que 30 % de la viande consommée en France est importée, dont plus de la moitié en raison de l’explosion de la consommation de viande de poulet. Près de la moitié du poulet consommé en France n’est pas produite sur le territoire. « Les importations de poulet ont augmenté de 36,9 % en cinq ans », précise la lettre. Une situation qui fragilise la souveraineté alimentaire du pays, d’autant que la production animale dépend largement d’intrants importés comme le soja ou les engrais de synthèse.
Pour les éleveurs français, cette pression conduit à « augmenter leur volume de production en intensifiant leurs systèmes pour essayer de rester compétitifs », une stratégie que le collectif juge « vouée à l’échec » et « socialement coûteuse ». À l’inverse, une baisse de la consommation pourrait permettre de réduire cette pression et de valoriser une production de qualité, affirment les ONG. Ces dernières insistent donc sur la nécessité pour les politiques publiques de s’emparer de la Snanc afin d’analyser et de réduire les importations de viande, notamment celles concentrées dans la restauration commerciale et les plats préparés et à emporter, en mobilisant toutes les parties prenantes autour d’une stratégie « moins et mieux ».
Demande citoyenne
Le collectif s’appuie sur un sondage Harris Interactive réalisé pour le RAC, selon lequel 79 % des Français se disent prêts à limiter leur consommation de viande si cela permettait d’acheter une viande de meilleure qualité, mieux rémunérant les éleveurs. Plus de la moitié affirme avoir déjà réduit sa consommation ces trois dernières années, et 85 % se déclarent favorables à des politiques publiques encourageant une alimentation plus durable.
Les organisations signataires réclament donc l’intégration dans la Snanc d'« objectifs chiffrés de baisse de la consommation de viande rouge et de volaille correspondant, a minima, à ceux de la stratégie nationale bas carbone ». Elles soulignent qu’il ne s’agit pas de prôner un arrêt de la consommation de produits animaux, mais un « rééquilibrage entre la consommation de protéines animales et de protéines végétales ».
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