Biomasse et légumineuses comme fertilisants en bio sans élevage
Olivier et Florentin Chaloche, céréaliers bio dans le Loiret, préfèrent « investir dans le végétal que dans le métal ». Ils construisent un système fondé sur la production de biomasse et de légumineuses.
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Depuis 35 ans, Olivier Chaloche, céréalier, cultive 120 ha en bio, en prenant soin de son sol. En 2019, son fils Florentin le rejoint sur la ferme, à Cortrat, dans l’est du Loiret. Lors de son installation, celui-ci récupère 80 ha, qu’il convertit en agriculture biologique.
« On voit clairement la différence de robustesse entre les deux sols », souligne Olivier Chaloche. Les anciennes parcelles affichent des rendements de plus 10 q/ha par rapport aux nouvelles terres, à 35 q/ha de moyenne en orges brassicoles. Elles absorbent beaucoup mieux les aléas climatiques. Selon le laboratoire Célestat Lab, le comportement microbien des sols « anciens » est bien développé (473 mg/kg de sol sec) et est constitué de nombreux éléments. Cette biomasse microbienne apporte une forte activité et minéralise l’azote de la matière organique. Autrement dit, ce sol vivant fonctionne et peut générer environ 86 unités d’azote par hectare grâce à son activité biologique.
Comme les unités d’azote organique coûtent cinq à dix fois plus chers que celles de synthèse, et sans élevage sur l’exploitation, Olivier et Florentin misent sur la fertilité de leur sol pour nourrir leurs plantes. « Ce n’est pas la peine d’aller chercher de l’engrais en Russie, on en a sous nos pieds ! », s’exclame Olivier.
De 30 à 40 % de légumineuses
Les agriculteurs ont mis en place une rotation complexe avec une dizaine de cultures. « Notre assolement est très porté sur les légumineuses, de 30 à 40 % de la SAU, pour aller chercher les 79 % de l’azote disponible dans l’air », note Olivier. La tête de rotation est la luzerne (20 %), puis des légumes et des semences (haricots verts, pomme de terre, oignon), des légumineuses (pois semence, lentille, soja…), des céréales associées à des légumineuses et du maïs. « Je défends le maïs ou le sorgho en bio car c’est nécessaire pour la biomasse », précise le céréalier, membre de la Fédération nationale d’agriculture biologique (Fnab).
Les engrais verts sont stratégiques dans l’assolement. « Une tonne de matière sèche apporte 250 kg d’humus stable. Nous visons entre 3 à 5 tonnes MS/ha », indique Florentin. En 2024, les Chaloche ont obtenu 3,4 tonnes de MS/ha, soit 23 unités d’azote pour la culture suivante.
Après plusieurs essais, ils ont supprimé le radis noir qui attire les sangliers et opté pour une variété de vesce de printemps pour éviter l’invasion. Leur mélange (350 pieds par m²) est fondé sur de la phacélie, du lin, de l’avoine, de la féverole avec un petit PMG (nanaux)… et varie en fonction de la culture suivante. Les producteurs moissonnent la culture en place, déchaument, puis sèment entre le 10 et 25 août, avec leurs propres semences. « Avec nos autres cultures, l’été n’est pas un moment de repos… Avant 2019, nous n’avions pas assez de main-d’œuvre pour semer les engrais verts après la moisson. Aujourd’hui, nous embauchons une personne supplémentaire », indique Olivier.
Les céréaliers font également attention à la structure du sol (aucune benne ne rentre dans les champs) et à la biodiversité. Ils ont déjà planté 1,3 km de haie et prévoient le triple pour les prochaines années.
Apport de déchets verts
Malgré ce sol très vivant et l’augmentation d’un point de matière organique en 30 ans, à 2,8 %, les analyses de sol pointent un manque de carbone pour ces sols argilo-calcaires. « Nous donnons assez à manger au sol pour ne pas le dégrader, et même pour l’améliorer, mais pas assez pour les besoins des cultures à venir », précise Florentin.
Pour compenser ce manque de biomasse, les céréaliers ont décidé de restituer la première coupe de luzerne au sol. Elle était auparavant valorisée en usine de déshydratation, avec laquelle ils ont donc arrêté leur contrat (80 €/t). En 2024, ils l’ont ensilé en mai, avant que les vulpins ne montent à graines. La deuxième et troisième coupe sont destinées à des éleveurs voisins. En 2025, Olivier et Florentin vont également apporter 10 tonnes de déchets verts par hectare, mélangés à de la fiente de poule et à la première coupe de luzerne. Ils espèrent ainsi atteindre 3,5 % de matière organique en cinq ans.
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