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Les agriculteurs polonais bloquent plusieurs passages frontaliers vers l’Ukraine

Le changement de gouvernement n'a pas apaisé la situation à la frontière.

Les agriculteurs polonais, qui souffrent depuis le printemps 2023 de la concurrence des céréales ukrainiennes, bloquent désormais plusieurs points de communication avec l’Ukraine.

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La file de camions s’étale sur près de 10 kilomètres dans la commune polonaise de Dorohusk, à quelques kilomètres d’un passage frontalier avec l’Ukraine, ce 14 février. Toutes les heures, les quelques dizaines d’agriculteurs polonais qui entravent la circulation, laissent passer un seul véhicule dans les deux sens. Les transports humanitaires, militaires ou de carburant circulent eux sans restriction. « La situation est devenue intenable à cause des importations ukrainiennes en Pologne », soutient Krzysztof, un agriculteur qui cultive plusieurs hectares de maïs et de colza dans les environs. « On ne peut pas rivaliser face aux holdings agricoles ukrainiennes qui cumulent des milliers hectares, nos terres n’en font que quelques centaines tout au plus », poursuit le sexagénaire.

Chute du marché

« Les prix à la tonne de céréales et d’oléagineux ne cessent de baisser, et nous, nous encaissons les pertes », abonde Michal, qui possède 200 hectares de blé et de colza à quelques dizaines de kilomètres de là. Le quarantenaire sort son téléphone portable en guise de justification. On peut y lire dans un SMS envoyé par un négociant que le 13 avril 2023, la tonne de blé était effectivement achetée 990 zlotys (228 €). Le prix de la même marchandise, le 14 février 2024, était lui fixé à 720 zlotys (165 €). « Dans le même laps de temps, l’énergie ou les produits phytosanitaires coûtent plus cher. Et nous avons des crédits sur le dos pour nos machines agricoles, dont les mensualités [à taux variable] sont à la hausse. Bref, nous sommes au pied du mur », poursuit son collègue, Piotr, 53 ans.

« Les coûts de production sont bien plus élevés chez nous qu’en Ukraine, nous devons respecter des normes européennes qui ne s’appliquent pas du côté ukrainien », souligne encore Michal. En marge d’un conteneur, les revendications des contestataires s’affichent en grand « Stop au pacte vert [européen], aux jachères, au sucre d’Ukraine et aux céréales ukrainiennes ».

Le nouveau gouvernement dans l’impasse

Cette colère a d’ailleurs tourné à l’incident, dimanche 11 février, à Dorohusk, lorsque du blé ukrainien contenu dans un camion a été déversé sur le bitume. Le parquet en Pologne a ouvert une enquête et les condamnations ont fusé en Ukraine.

Les exploitants polonais se plaignent des arrivées de produits agricoles ukrainiens depuis le printemps 2023 et la suppression des droits de douane sur ces marchandises et la mise en place des couloirs de solidarité. Sauf que les cargaisons ukrainiennes qui ne devaient faire que transiter, avant de rejoindre les ports de la Baltique, sont restées en grande partie sur place. La mobilisation a repris de plus bel, cet hiver en Pologne, inspirée par la grogne des agriculteurs allemands ou français.

La coalition proeuropéenne, qui a pris le pouvoir à Varsovie à la mi-décembre 2023, a beau renouer les liens avec l’Ukraine, et solidariser avec les agriculteurs polonais, elle n’a toujours pas réussi à résoudre cet épineux problème. Elle continue officiellement d’interdire les importations de céréales ukrainiennes sur son sol depuis le 15 avril, à rebours de la politique de l’Union européenne.

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