Un besoin pressant de simplifier l’entretien des cours d'eau et fossés
Après une fin d’été et un début d’automne très pluvieux, les agriculteurs s’inquiètent des risques d’inondations. Ils veulent agir et sortir des impasses administratives. Témoignages.
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« Avec un excédent pluviométrique de près de 60 % par rapport aux normales 1991-2020 (119 mm), septembre 2024 devient le mois de septembre le plus arrosé depuis 25 ans », a annoncé Météo-France le 30 septembre. De quoi inquiéter les agriculteurs des risques d’inondations dans les mois à venir.
Dans la Région des Hauts-de-France, de nombreuses actions syndicales lancées par les FDSEA et JA se sont ainsi déroulées la semaine dernière pour dénoncer la réglementation actuelle qui, selon les syndicats, constitue un frein à l’entretien des fossés, cours d’eau et canaux. Jean-Louis Bouthors, éleveur à Daours dans la Somme, a reçu le 25 septembre des acteurs locaux dans un marais communal situé le long de l’Hallue. « Ces prairies ont été inondées durant neuf mois cette année après les fortes pluies, raconte-t-il. Mes pertes d’exploitation atteignent près de 7 000 €. Cela est dû au manque d’entretien régulier des fossés et des berges. Tout le monde se renvoie la balle. »
Le même jour à Rambaud dans les Hautes-Alpes, des agriculteurs de la FDSEA ont dénoncé l’absence d’entretien en procédant au nettoyage d’un fossé longeant 15 hectares de parcelles agricoles appartenant à trois propriétaires différents. Non curé depuis dix ans, ce fossé ne permettait plus l’écoulement des eaux de pluie et de ruissellement. Résultat, des « lacs » formés au printemps et restés en eau jusqu’à quasiment la mi-juin empêchant la croissance des céréales et la récolte des prairies.
Une déclaration préalable simplifiée
À Brécey dans la Manche, Jean-Pierre Yvon, éleveur, a accueilli une démonstration pédagogique d’entretien sur une de ses parcelles le 25 septembre. Dans ce département normand, des discussions sont engagées depuis la fin de 2023 entre la profession et la DDTM afin de le simplifier et le sécuriser. Aboutissement de celles-ci, un document baptisé « porter à connaissance » est espéré d’ici à la fin de l’année. Il permettrait de solliciter un accord en amont des opérations. Malgré tout, Jean-Pierre Yvon s’inquiète du risque de contravention et d’une productivité dégradée de terrains trop difficiles à exploiter.
Au-delà des revendications exprimées sur le terrain, la question de l’entretien des cours d’eau et fossés a aussi alimenté les discussions au sein du gouvernement. Le 19 juillet, un rapport commandé par le ministère de l’Agriculture et le ministère de la Transition écologique à leurs inspections proposait plusieurs pistes de simplification du régime juridique d’entretien des cours d’eau et l’amélioration de la capacité d’action des préfets. Il relativisait aussi la responsabilité d’un mauvais entretien du réseau hydraulique dans les inondations qui ont touché les Hauts-de-France.
Ce « rapport dit que l’État a fait son travail dans sa compétence. Mais dans les situations d’urgence, il y avait des choses qui n’ont pas été faites. L’entretien des cours d’eau est une nécessité », a insisté le sénateur du Pas-de-Calais, Jean-François Rapin (LR), lors de la présentation de son rapport parlementaire, le 25 septembre. Agriculteurs et élus locaux se heurtent à un véritable « maquis réglementaire » et craignent de commettre des infractions liées à la police de l’eau, selon le document. « Aujourd’hui pour enlever un embâcle dans un cours d’eau, un élu ne sait pas s’il peut le faire de peur d’être verbalisé ou d’être rattrapé par la patrouille », a illustré l’élu. Aux côtés de son collège corapporteur RDSE des Alpes-de-Haute-Provence, Jean-Yves Roux, il a rappelé « le besoin de clarification ».
« Il faudra discuter avec les agriculteurs »
Interrogé sur l’impact de l’agriculture dans les causes des inondations, Jean-François Rapin s’est contenté d’affirmer que « probablement, il faudra des discussions avec les agriculteurs ». Il a ensuite cité « l’exigence d’utiliser des méthodes douces et plus naturelles » en évoquant les zones d’expansion de crue. « Il faudra en discuter pas seulement avec les agriculteurs mais aussi avec les propriétaires fonciers proches de rivières qui n’utilisent plus leurs terres. » Une proposition de loi est prévue par les sénateurs.
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