Émissions des élevages : des eurodéputés veulent revoir les seuils
Des eurodéputés veulent restreindre le nombre d’élevages soumis aux plafonds d’émissions polluantes de l’Union européenne lors d’un vote prévu le mardi 12 mars 2024, quitte à faire dérailler l’accord déjà trouvé avec les États membres et très critiqué par le secteur agricole, qui manifestera le même jour à Strasbourg.
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La Commission européenne avait proposé en 2022 d’étendre considérablement l’application d’un texte sur les « émissions industrielles » qui impose aux usines et aux élevages porcins et de volailles d’une certaine taille, des normes de rejets (oxyde d’azote, méthane, ammoniac via le lisier…).
Des seuils remis en question
Après d’âpres tractations, les négociateurs des États membres et du Parlement européen s’étaient mis d’accord à la fin de novembre pour continuer d’exempter les élevages bovins, contrairement à ce que réclamait Bruxelles. Ils avaient entériné un abaissement des seuils pour cibler davantage d’élevages :
- Les installations porcines dès 350 UGB, soit environ 1 200 places à l’engraissement ou 700 truies contre respectivement 2 000 et 750 places actuellement ;
- Les élevages de poules pondeuses dès 300 UGB, soit environ 21 500 poules, contre 40 000 actuellement, et de poulets de chair de plus de 280 UGB (40 000 places, comme actuellement).
Ces nouveaux seuils, qui s’appliqueraient progressivement à partir de 2030, sont très en deçà des propositions initiales de Bruxelles qui voulait viser des élevages deux fois plus petits (dès 150 UGB).
L’accord trouvé avec les États membres doit être entériné formellement demain par le Parlement européen réuni à Strasbourg. De façon inhabituelle à ce stade, un groupe d’élus majoritairement PPE (droite) a soumis des amendements pour le réviser, au risque donc de rouvrir les négociations. Les amendements rétablissent l’exact statu quo des normes actuelles, qui s’appliquent à partir de 2 000 porcs et 40 000 poules.
Un sujet qui alimente la colère agricole
Le maintien du statu quo est réclamé par le Copa-Cogeca, fédération des syndicats agricoles majoritaires européens, inquiet de « coûts supplémentaires », et le sujet a alimenté la récente colère du secteur. Le texte « mettrait à mal les structures familiales françaises qui n’auront pas les moyens de se payer ces mises aux normes. La production européenne continuerait de diminuer et serait substituée par des importations », s’alarment dans un communiqué la FNSEA et Jeunes Agriculteurs (JA), appelant à manifester mardi devant le Parlement à Strasbourg.
Le ministre français de l’Agriculture, Marc Fesneau, s’était lui-même dit à la fin de février intéressé par des « amendements parlementaires » pour « aboutir au statu quo sur les volailles et porcs » et « ne pas alourdir les procédures ».
Les ONG refusent
Alarmées, les ONG environnementales appellent les eurodéputés à valider l’accord de novembre, rappelant qu’il offre déjà de « vastes concessions » aux agriculteurs et que le rouvrir « mettrait en péril » les avancées visant les sites industriels.
Pascal Canfin, président (Renew, centristes et libéraux) de la commission parlementaire de l'environnement, a évoqué la possibilité d’entériner l’accord, mais en réclamant « une déclaration politique » pour clarifier sa mise en œuvre.
Bruxelles serait tenu d’y détailler des mesures de « simplification » et « l’ingénierie financière » pour accompagner les élevages d’ici à l’application en 2030, tout en imposant les mêmes conditions aux produits importés.
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