Vin : quand la Commission se plante Vin : quand la Commission se plante
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C’est un beau loupé. Une fronde contre la Commission, qui l’a fait reculer vite fait bien fait. Le point de départ : un avant-projet de réforme de la réglementation viticole. Sujet ultrasensible dans tous les pays viticoles. N’ont-ils pas déjà fait plier la Commission sur la réforme des droits de plantation ?
Le sujet portait cette fois sur la réglementation viticole, c’est-à-dire les normes de commercialisation, l’étiquetage, les appellations d’origine, les indications géographiques, etc. Le vin est le seul produit transformé dont la réglementation européenne va du plant de vigne jusqu’à l’étiquette sur la bouteille. Il faut revoir la réglementation parce qu’il y a de nouvelles procédures et puis, surtout, il faut simplifier, disait la Commission. La simplification, c’est la nouvelle tarte à la crème des institutions européennes. Une tarte sucrée avec, parfois, des cailloux cachés dans la pâte. Car, à y regarder de près, la simplification cachait, en fait, de bien mauvaises surprises.
Le régime actuel est comme une construction gothique. Il y a les piliers, les contreforts, les clefs de voûte… Tout se tient. On ne peut parler d’étiquetage sans évoquer les labels de qualité. On ne peut parler de vins à indication géographique sans traiter, par contraste, le régime des vins sans appellation géographique. Il y a une cohérence d’ensemble et séparer les réglementations est une fausse bonne idée.
La Commission devait sentir que le dossier était un peu sensible, car au lieu de présenter un projet de réglementation, comme elle le fait souvent, elle a commencé par diffuser un document préparatoire, en anglais, non signé, sans en-tête, sans cote ni référence. En pratique administrative, cela s’appelle un « non-paper », un « non-papier », un document qui n’existe pas, que l’on ne peut imputer à personne et qui est juste fait pour donner des pistes.
Aussitôt celui-ci connu, la fronde se mit en branle. Tous les professionnels étaient vent debout. Les États aussi. Les parlementaires aussi. Députés, sénateurs, députés européens se sont mobilisés, tous à l’unisson, pour évoquer les risques de déstabilisation du secteur. Fin février, le représentant de la direction générale de l’agriculture de la Commission est pris à partie par les eurodéputés italiens, espagnols et, surtout, français, qui dénoncent la libéralisation incontrôlée et dogmatique. Il annonce qu’il va proposer au commissaire de retirer son texte, afin de recommencer un processus de discussion. Quelques jours après, Phil Hogan se présente devant le groupe d’étude du vin du Parlement européen et annonce le report du texte au moins jusqu’en septembre. C’était apparemment la première fois qu’un commissaire européen était entendu par un groupe d’étude (même pas une vraie commission). Cela sentait le brûlé et la Commission savait qu’elle sortirait écharpée par ce front d’oppositions. Quand il s’agit de vin, les députés voient rouge.
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