Limiter les graminées dans le blé passe par plusieurs leviers
Dans les parcelles les plus sales en ray-grass et vulpin, repousser d’une dizaine de jours la date de semis du blé se révèle efficace.
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Le désherbage chimique ne peut pas, à lui seul, tout résoudre. La pression des graminées adventices augmente, vulpin et ray-grass en tête, avec de plus en plus de cas de résistance. C’est en combinant plusieurs leviers que l’on pourra réduire la pression des mauvaises herbes. Le premier d’entre eux est de retarder la date de semis, de dix à quinze jours par rapport à la date préconisée. Arvalis le conseille aujourd’hui pour son efficacité sur graminées (1), prouvée sur plusieurs campagnes et plusieurs sites.
À titre d’exemple, sur une parcelle expérimentale à très forte pression de vulpins, « l’effet du décalage de la date de semis est très significatif sur la pression adventices », souligne Céline Drillaud, de l’institut technique, lors d’un webinaire le 20 septembre. Le nombre de vulpins y diminuait de 40 % en moyenne sur cinq ans, en décalant le semis de vingt jours. Et la perte de rendement liée aux vulpins se limitait à 6,2 q/ha alors qu’elle s’élèvait à 11,3 q/ha avec un semis aux dates préconisées du fait d’une présence accrue d’adventices.
D’autres essais montrent que le potentiel de rendement est maintenu avec un décalage du semis de deux semaines, ce qui sécurise la pratique. Au-delà, « il faut vraiment étudier le bénéfice sur risque », met en garde Céline Drillaud. En revanche, « il n’y a aucun intérêt à précocifier la date de semis », ni en termes de rendement, et surtout pas de maîtrise du salissement.
Cibler les parcelles
Il est difficile de communiquer sur la date de semis après la campagne passée. Pourtant, rappelle Céline Drillaud, « ce n’est pas tout de pouvoir semer le blé, il faut ensuite gérer la culture sur tout l’itinéraire face à la pression des adventices, mais aussi des maladies ou des pucerons. »
« Le message n’est pas de décaler à tout-va. Mais de cibler les parcelles les plus sales en vulpin et ray-grass », ajoute-t-elle. Car décaler le semis de toute la sole en blé constituerait dans bien des cas un trop grand risque, par rapport aux conditions pédoclimatiques. Dans le cas d'un semis tardif, il faudra par ailleurs privilégier une intervention en prélevée pour sécuriser le désherbage.
Le labour occasionnel en rattrapage
« Aucun levier ne peut avoir à lui seul 100 % d’efficacité », souligne Anne-Monique Bodilis, ingénieure d’Arvalis. Le décalage de la date de semis peut donc être réfléchi en complément du travail du sol (labour occasionnel) et de la rotation (alternance des cultures). Utile en cas d’échec de désherbage, le labour est en effet efficace sur ray-grass, vulpin ou brome, à condition d’attendre quatre ans avant de labourer à nouveau la parcelle. Un temps nécessaire pour que les graines de ces graminées perdent leur capacité germinative. Autre point de vigilance que relève Anne-Monique Bodilis : « Le nettoyage de la moissonneuse peut aussi être salvateur dans certaines situations. »
Quant au désherbage chimique, il se complique avec le développement des résistances d’adventices, d’une part, et le contexte réglementaire, d’autre part. Le flufénacet notamment, molécule active très présente au travers de nombreuses spécialités commerciales, ne devrait plus être approuvé par l’Union européenne au printemps 2025. Pendiméthaline, triallate, prosulfocarbe, DFF, chlortoluron : « Chacune de ces substances aujourd’hui homologuée, l’est pour une durée limitée », met en garde Anne-Monique Bodilis.
(1) En présence de dicotylédones, l’impact de la date de semis est plus aléatoire, voire insuffisant.
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