Céréales/Oléagineux Les marchés se consolident
Tallage, cabinet d’études spécialisé dans les marchés des grains et des oléagineux, nous livre son analyse hebdomadaire.
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Après les fortes montées récentes, c’est plutôt une stabilisation qui caractérise le marché du blé tendre cette semaine avec un pic le 8 août, puis une légère descente. Les prix perdent ainsi 1 €/t à Rouen à 214,75 €/t, 4 €/t à la Pallice, à 210,5 €/t, alors qu’ils gagnent 1 €/t en Moselle à 210,5 €/t également.
Un euro en baisse
Le nouvel affaissement de l’euro face au dollar a contribué à cette stabilisation tout comme les prises de bénéfices déclenchées par de nombreux opérateurs sur les marchés à terme juste avant la publication du rapport du ministère américain de l’Agriculture (USDA) ce soir, le vendredi 10 août 2018.
Sur le marché mondial, les variations sont restées modestes également par rapport à celles des semaines passées. Les blés russes à 12,5 % de protéine perdent 1 $/t à 233 $/t, et les blés ukrainiens 5 $/t à 205 $/t. En revanche, les blés américains voient plutôt leur prix s’accroître de 2 à 4 $/t. Pourquoi ? Parce qu’il apparaît de plus en plus clairement nécessaire que les États-Unis assurent une plus grosse part que l’an dernier des exportations mondiales, à cause de la chute des disponibilités en mer Noire et en Europe et de la situation australienne. Cela signifie que le bilan américain, malgré les bons rendements de printemps attendus, finira la campagne avec des stocks bas lui aussi.
Une situation mondiale du blé tendre toujours très tendue
Un facteur géopolitique à mentionner cette semaine qui a sans doute influencé les prix américains à la hausse, est l’annonce brutale de l’Arabie saoudite de stopper ses achats de blé en provenance du Canada. Il s’agit de rétorsions à des prises de position canadiennes concernant le respect des droits de l’homme en Arabie.
Il n’était pas prévu que le Canada exporte d’énormes volumes vers l’Arabie mais le peu que nous attendions, environ 600 000 tonnes, devra être assuré par d’autres exportateurs et vu la qualité requise, ce ne pourra être que par l’Australie et les États-Unis.
Du point de vue fondamental, la situation mondiale demeure tendue et cela a poussé au marché la Jordanie qui vient de boucler l’achat de 60 000 tonnes de blé (origine roumaine possible). Cela pousse aussi la Turquie à libérer une partie de ses réserves dans un souci de stabilisation de son marché intérieur, alors que l’extrême faiblesse de la lire turque handicape les achats du pays.
Nette réaction des prix des orges brassicoles
Les prix des orges fourragères, malgré un affaissement en fin de semaine, se retrouvent encore plus haut que la semaine dernière. Les prix en Moselle et à Rouen ont gagné entre 1 et 2,5 €/t à 210,5 et 215 €/t respectivement. Sur le marché mondial, les orges françaises valent maintenant 254 $/t (+ 2 $/t), toujours plus que les orges de la mer Noire (232 à 234 $/t).
Le prix de ces orges au départ des deux grandes régions qui fournissent le monde en orge fourragère, l’Union européenne et la mer Noire, restent ainsi orientés à la hausse en raison de la faiblesse de l’offre mondiale face à la demande alors que plusieurs importateurs se fournissent actuellement sur le marché mondial (Tunisie, Jordanie, Arabie).
Comme en blé, l’Arabie a annoncé vouloir stopper ses importations d’orge canadienne. Toutefois, le Canada n’a pas exporté d’orge vers cette destination depuis la campagne 2016-2017, où seulement 130 000 tonnes avaient été acheminées. Nous ne prévoyions pas d’origine canadienne dans les achats saoudiens pour la campagne en cours.
Les flux canadiens devraient surtout se concentrer vers la Chine cette année encore, d’autant plus que la récolte australienne s’annonce très incertaine (sécheresse dans l’Est). L’annonce saoudienne ne devrait donc pas impacter le marché de l’orge.
Sur le segment brassicole, les prix grimpent de manière marquée : de 13 €/t pour les orges brassicoles de printemps à 250 €/t Fob Creil et de 18 €/t pour celles d’hiver à 224 €/t. Il s’agit de rattraper le retard pris au cours de la semaine dernière sur les prix fourragers. La prime entre les orges de brasserie et les fourragères était descendue très bas au point que, pour l’orge d’hiver surtout, l’intérêt du travail de calibrage nécessaire pour une utilisation en brasserie pouvait être remis en cause. La hausse marquée des prix brassicoles cette semaine vient remédier à cette situation.
Dégradation des cultures en France
Pas de tendance très nette sur les prix des maïs hexagonaux cette semaine. En nouvelle récolte, on note une très légère hausse en Alsace, + 1 €/t à 189 €/t Fob Rhin, alors que les prix descendent légèrement de 5 €/t sur la façade atlantique à 191 €/t Fob Bordeaux.
Alors que les prix américains s’affaissent légèrement (bonnes conditions des plantes), les maïs brésiliens voient leur prix augmenter légèrement (+ 5 $/t) avec la confirmation d’une seconde récolte très basse dans le pays. En Ukraine aussi, les prix grimpent un peu, de 3 $/t, car les mauvaises récoltes de blé dans le nord de l’Union européenne et les dégâts sur le maïs dans l’Ouest, en France et en Allemagne notamment, viennent renforcer les achats de maïs ukrainien par les opérateurs européens.
En France, FranceAgriMer vient de revoir en baisse l’état des cultures à seulement 62 % en état bon à excellent contre 66 % la semaine dernière. La situation en Europe s’annonce très contrastée avec de bonnes récoltes dans le sud-est grâce aux pluies de l’été, mais des récoltes basses dans l’Ouest. Toutefois, sans mauvaises surprises sur les futures récoltes ukrainiennes, nord et sud-américaines, l’offre mondiale restera large et pourra compenser les manques de l’Union européenne où les importations sont parties pour être records en 2018-2019.
Timide progression du soja attendue
Les cotations du soja enregistrent des variations relativement faibles, par comparaison aux fortes hausses hebdomadaires observées depuis mi-juillet : + 2 $/t en ancienne comme en nouvelle campagne à Chicago sur la semaine. Et pour cause, des forces contraires sont venues faire pression sur les cotations alors que le marché reste dans l’attente de la publication de l’USDA à venir.
D’un côté, un nouvel épisode de tensions sino-américaines et des publications chinoises laissant présager un recul important des importations, ont maintenu les cours sous pression. De l’autre, une légère dégradation de l’état des cultures aux États-Unis, des exportations américaines élevées hors de la Chine et l’espoir, quand même, d’un retour des achats de soja américain par la Chine à l’automne soutiennent les cotations.
Le bilan semble au final très légèrement haussier, les opérateurs n’osant pas se mouiller avant la publication mensuelle du département américain de l’agriculture, qui pourrait donner une direction plus claire aux prix du soja nord-américain. Les révisions portant sur les rendements et les exportations américaines de soja, ainsi que sur les importations de soja de la Chine y seront particulièrement surveillées.
Confirmation des bas niveaux de récolte en colza
En colza, nous attendons pour le moment un recul de pratiquement 10 % de la récolte de l’Union européenne à 28. Celle-ci atteindrait son plus bas niveau depuis 2012. La moisson est maintenant terminée en France et en Allemagne, et approche de la fin au Royaume-Uni. Il n’est pas exclu que les retours de collecte puissent encore bousculer les estimations.
En Allemagne, par exemple, l’association des coopératives a annoncé jeudi une estimation de récolte à 3,5 Mt contre 4,3 Mt en 2017. C’est en dessous du consensus actuel plus proche de 3,8 Mt. En France, le ministère estime la récolte à 4,6 Mt contre 5,4 Mt en 2017. Au Royaume-Uni, nous attendons pour le moment une récolte en repli de 10 %.
Malgré le recul des volumes collectés, les producteurs semblent pouvoir compter sur une qualité satisfaisante dans ces trois pays. Notons par ailleurs que le potentiel des cultures semble aussi se dégrader au Canada et en Australie en raison du manque de précipitations et des températures élevées. La cotation du canola gagne d’ailleurs 10 $/t sur la semaine à Winnipeg (Canada).
Pourtant, dans ce contexte, le soutien apporté aux prix du colza européen par le recul annoncé de la production dans l’Union européenne semble faiblir cette semaine. Le prix du colza progresse de seulement 4 €/t en Fob Moselle et 2 €/t sur Euronext. La publication clé de l’USDA à venir ce 10 août n’est encore une fois sûrement pas étrangère à ces timides évolutions. La hausse est néanmoins légèrement plus marquée pour le colza rendu Rouen, qui gagne 7 €/t sur la semaine.
En tournesol, le prix ne suit pas la progression de ceux du colza cette semaine. Il se maintient à 335 €/t à Saint-Nazaire. Les conditions climatiques plutôt correctes dans les principaux pays producteurs empêchent la montée des cours. En France, les pluies prévues avant la récolte devraient atténuer l’impact du dernier épisode caniculaire sur le tournesol. En mer Noire, les conditions des cultures semblent aussi s’améliorer à l’approche de la récolte.
Hausse du pois
La cotation du tourteau de soja n’évolue pas beaucoup non plus à Chicago, où elle gagne 1 $/t dans le sillage de la graine. De même, à Montoir, la cotation du tourteau de soja est pratiquement inchangée : - 1 €/t depuis la semaine dernière.
L’absence d’affaire limite les disponibilités de prix pour le pois fourrager rendu Rouen cette semaine. On notera cependant que le pois départ Marne a gagné 15 €/t (215 €/t) au cours des deux dernières semaines suite à une révision à la baisse de la récolte française par le ministère, à une prévision d’exportations aussi révisée en baisse au départ de l’Ukraine, et surtout à la forte hausse des prix du blé.
TallageÀ suivre : climat en Australie, estimation de la récolte russe de blé, évolution des prix américain du blé, conditions de cultures aux États-Unis (soja, maïs), dans l’Union européenne et la mer Noire (maïs), discussions entre la Chine et les États-Unis, rapport USDA ce soir 10 août.
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