Marché des céréales La météo dans le monde mène la danse
Tallage, cabinet d’études spécialisé dans les marchés des grains et des oléagineux, nous livre son analyse hebdomadaire.
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Après le statu quo de la semaine dernière en blé et l’affaissement des prix des céréales fourragères, le vent a tourné cette semaine et les prix sont repartis à la hausse pour toutes les céréales.
L’euro et des inquiétudes climatiques mondiales font monter le blé
Le niveau de l’euro est l’un des principaux facteurs qui a joué cette semaine et permis aux prix de se redresser. En effet, l’euro a perdu 1,5 % de sa valeur face au dollar, contribuant ainsi à l’amélioration de la compétitivité européenne et française. La chute de l’euro avait déjà commencé la semaine dernière et s’est poursuivie cette semaine faisant suite à la publication de plusieurs chiffres suggérant que la croissance économique dans la zone euro risque de ne pas atteindre les prévisions antérieures.
Toutefois, cet accès de faiblesse de la monnaie européenne n’est pas le seul facteur à avoir soutenu les prix cette semaine. A cette période cruciale de la campagne, la moindre alerte climatique revêt une importance de taille. Or, plusieurs inquiétudes ont occupé le devant de la scène cette semaine. Tout d’abord, le « crop tour » mené par les professionnels US dans le Kansas a confirmé des dégâts importants sur les blés d’hiver dans cette région en raison de la sécheresse de l’hiver et du début du printemps. Les pluies sont en train d’arriver et devraient améliorer la situation mais il sera impossible de faire remonter les rendements du sud des USA à un niveau normal. Ainsi, les blés meuniers de bonne qualité (HRW) ont-ils gagné 12 $/t cette semaine, à 244 $/t Fob Gulf.
De l’autre côté de l’Atlantique, la situation est sèche depuis le début d’avril en Europe centrale et de l’Est, autour de la mer Noire également. Rien n’est perdu s’il pleut bientôt, mais la permanence de cette situation commence à inquiéter et à faire grimper les prix. Les prix russes ont ainsi gagné 2 $/t cette semaine à 216 $/t Fob.
Encore plus loin, en Australie, la situation est sèche aussi : cela alerte le marché même s’il est nettement trop tôt pour crier gare. Les semis ne sont pas encore commencés et la situation peut s’améliorer.
L’ensemble de ces éléments a donc poussé le blé français vers le haut, à 163 €/t rendu Rouen (en base juillet), une hausse de presque 6 €/t sur la semaine.
Sur le front des exportations, les ventes de l’UE restent très inférieures à celles de l’an dernier à la même date (16,6 millions de tonnes contre 20,9) mais le rythme soutenu des chargements français vers l’Arabie Saoudite (grâce à la bonne qualité des blés français cette année) a plutôt constitué un facteur de soutien ces derniers jours.
L’Arabie vient d’ailleurs de relancer un appel d’offres pour un peu plus de 500 000 tonnes de blé pour livraison en juillet-août. La qualité requise est du 12,5 % de protéine.
Attention toutefois sur le front de la météo au changement radical qui vient de s’opérer en Argentine : les pluies sont enfin revenues et vont améliorer les conditions de semis pour le blé dans ce pays qui pourrait cultiver plus que prévu il y a quelques semaines.
Rebond de l’orge à la suite du blé
Le prix de l’orge fourragère a été influencé par la hausse du blé et gagne presque 5 €/t cette semaine à Rouen, à 166,5 €/t. L’orge est particulièrement sensible à la situation de l’Ukraine où les retards de semis conduisent à revoir en baisse la surface au profit des autres cultures de printemps. Cela conduit à une hausse de 4 $/t sur le marché mondial, à 215 $/t pour les orges françaises, un niveau égal à celui des orges russes et légèrement plus élevé que celui des orges ukrainiennes (212,5 $/t).
L’imposition de la forte taxe sur le sorgho US par la Chine est observée de près par les opérateurs : au moins trois bateaux de sorgho US qui étaient en route ont été détournés vers l’Arabie Saoudite. Plusieurs bateaux sont aussi en route vers l’Espagne. Cela est donc plutôt un élément baissier pour la demande en orge (le sorgho pouvant en partie remplacer l’orge). Mais ce facteur reste contrecarré par le fait que la Chine risque de devoir importer un peu plus d’orge pour remplacer le sorgho manquant.
Difficile de voir aujourd’hui quel facteur l’emportera sur le bilan européen. Quoi qu’il en soit, les stocks mondiaux d’orge seront bas en fin de campagne et dans cette situation, l’orge ne peut se permettre de rester stable si les prix du blé ou du maïs montent.
Sur le créneau brassicole, contrairement à la semaine dernière, les orges se sont renchéries en nouvelle campagne à 170 €/t Fob Creil pour les orges d’hiver et 193 €/t pour les orges de printemps en lien avec l’évolution du blé et de l’orge fourragère, le retard des semis dans le nord et des craintes de sécheresse dans l’est de l’UE.
Revirement en maïs aussi
Les prix du maïs français ont gagné 2 €/t en position Fob Rhin (à 167 €/t en base juillet) et entre 4 et 6 €/t sur la façade atlantique (à 155 €/t rendu la Pallice).
Comme pour le blé, cette hausse s’explique en partie par la baisse de l’euro. Néanmoins, elle s’explique aussi par la grimpée des prix sud et nord-américains. Ainsi la sécheresse au Brésil vient d’entraîner des révisions en baisse de la seconde récolte de maïs dans ce pays. En Argentine, en revanche, après de forts dégâts dus à la sécheresse, c’est maintenant l’excès de pluie qui fait monter les prix car cela suscite un retard des opérations de récolte ! Enfin, aux USA, les semis restent très en retard à cause du temps pluvieux et froid dans le Midwest.
Dans l’UE, les semis de maïs grains ont progressé très rapidement ces dernières semaines et devraient s’achever rapidement sur la moitié sud de l’UE. Des inquiétudes s’élèvent toutefois concernant un assèchement rapide des sols en Europe du Sud-Est.
L’optimisme revient sur le marché US du soja
Le prix du soja sur le marché de Chicago était plutôt en perte de vitesse depuis le début de la semaine, plombé par le manque de demande liée à la crainte des opérateurs chinois de se voir subitement affecter une taxe à l’importation prohibitive sur les sojas en provenance des US. Finalement, jeudi soir, les discussions en cours entre la délégation chinoise venue à Washington pour discuter avec l’administration Trump de leurs différends commerciaux semblaient prendre un tour positif.
L’optimisme alors de mise a fait décoller les prix du soja en une petite quinzaine de minutes, avant la clôture du marché à terme le jeudi 3 mai au soir. Finalement, par rapport à la semaine dernière (26 avril), le cours du soja US a repris presque 6 $/t que ce soit sur l’échéance de mai 2018 ou l’échéance de novembre 2018 de la nouvelle campagne.
Le colza grimpe encore à cause des pertes possibles dans les champs européens
Les prix du colza en France ont ainsi bénéficié d’une note positive en provenance du marché mondial. Mais des éléments fondamentaux propres à l’UE ont également contribué à faire grimper les prix, que ce soit en rendu Rouen (+11 €/t cette semaine) ou Fob Moselle (+9 €/t).
En effet, dans l’est de la France, dans certaines régions septentrionales en Allemagne ou en Pologne, des champs de colzas souffrent de soucis de floraison, liés aux conditions très humides de l’hiver, aux températures en montagnes russes de ce printemps (alternance de temps très froid et très chaud), et à la pression parasitaire. La baisse de l’euro face à la monnaie états-unienne a aussi participé à la remontée des cours.
Le tournesol bénéficie aussi de ce changement de rapport entre monnaies et voit son prix monter de 5 €/t à Saint-Nazaire (alors que son prix exprimé en dollars US est stable par rapport à la semaine dernière).
Le climat argentin tire encore le prix du tourteau de soja à la hausse
Cette semaine, la moisson de soja en Argentine est désormais compliquée par des pluies diluviennes, qui perturbent l’entrée des machines dans les champs. Ces pluies interviennent bien trop tard pour améliorer l’état des cultures de soja, et compliquent un peu plus l’approvisionnement en graine des triturateurs argentins.
Cela fait grimper encore un peu plus le prix des tourteaux de soja, que ce soit sur le marché de Chicago (+20 $/t cette semaine) ou à Montoir, où le prix sur le rapproché grimpe de 16 €/t, à 417 €/t.
Le recul de la monnaie européenne a aussi participé à cette hausse.
Le pois fourrager continue de se traiter régulièrement notamment en départ Eure-et-Loir à 178 €/t, en petite hausse de 1 €/t entre le 26 avril et le 3 mai.
A SUIVRE : climat aux USA, dans le centre-est de l’UE et en mer Noire, semis de blé en Argentine, état des cultures du colza en Europe et mer Noire, avancée des semis de canola au Canada, et de soja aux USA, volumes récoltés en soja en Argentine, parité euro/dollar, déroulement des discussions commerciales entre la Chine et les États-Unis.
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