Rapport Cyclope : des marchés plus volatils que jamais
La dernière version vient de paraître et offre « une analyse complète des tensions géopolitiques, économiques et climatiques dont les marchés sont les révélateurs ».
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Le 38e rapport Cyclope sur les marchés mondiaux, sorti durant la semaine du 13 mai 2024, a pour sous-titre « Attendre et espérer ». On y retrouve notamment le bilan de toutes les impasses géopolitiques actuelles : Ukraine, Israël et le Hamas, la montée des populismes… et de cassures de plus en plus marquées avec « une croissance mondiale relativement molle » mais aussi des marchés plus volatils que jamais.
« La conjoncture est peut-être plus difficile à lire aujourd’hui », admet, Philippe Chalmin, professeur émérite à Paris-Dauphine et codirecteur du rapport Cyclope avec Yves Jégourel, professeur titulaire de la chaire d’économie des matières premières du Conservatoire national des arts et métiers.
Importante dimension géopolitique
« Il n’y a pas de lignes totalement directrices tant nous avons d’interrogations. Rarement parmi les derniers rapports Cyclopes parus, la dimension géopolitique aura été aussi importante. Elle est au cœur de tous les marchés. Le monde est à la recherche d’un nouvel ordre à la fois géopolitique et économique international », a indiqué Philippe Chalmain, le mardi 14 mai 2024 à la conférence de presse présentant cette nouvelle édition.
« Depuis maintenant trois ans, nous vivons une rupture profonde, celle qui a été marquée symboliquement par le Covid, puis par la guerre en Ukraine et de manière plus générale par cette fragmentation du monde que nous voyons aujourd’hui » , a-t-il ainsi appuyé. Et d’ajouter : « Nous sommes dans une période de choc qui marquera l’histoire. Les années 2020 sont une période de rupture. Et la Chine pèse d’un poids considérable sur les marchés. »
Les prix s’envolent à nouveau
« L’année a été marquée par plus qu’une baisse : un effondrement ! a entre autres stipulé François Luguenot, analyste de marchés de matières premières agricoles, chez FL Consultant. Ces marchés-là ont complètement abandonné. En effet, avec le déclenchement de la guerre en Ukraine, ça s’était emballé et il y a eu une « apocalypse », pour atteindre des niveaux records mondiaux. Mais l’été qui a suivi, les cours ont commencé à refluer et ça n’a plus cessé. »
« C’est comme si désormais les situations de tensions très fortes — que sont la guerre en Ukraine, les risques à Taïwan, les détroits qui posent problème (Panama ou Bab-el-Mandeb), etc. — ça ne comptait plus. Les prix se sont mis à refluer dans la mesure où l’offre était abondante, en particulier en Mer Noire », ajoute le spécialiste.
« Les prix s’envolent à nouveau depuis à peine 15 jours sous l’effet des fondamentaux, constate toutefois l’analyste. En cause : les phénomènes météorologiques dans l’hémisphère Nord, une sécheresse et des épisodes de gels en Russie, des surfaces en baisse à cause de la pluviométrie à l’automne et des cultures pas vraiment en bon état. Ainsi, l’hémisphère Nord va probablement produire moins de céréales à paille et le Sud, plus. Le dernier rapport de l’USDA dit qu’on produira plus de blé mais continuera à en consommer davantage, donc les stocks vont s’éroder. Les cours remontent ainsi à des prix pas vu depuis un an, ou plus. »
Il complète : « Sur le soja, c’est un peu différent car la production pourrait être abondante. Mais il y a quand même un bémol sur la région du Rio Grande do Sul avec de très fortes précipitations, qui pourraient sérieusement abîmer les choses. »
Nouveau chapitre sur les biocarburants
En outre, un nouveau chapitre sur les biocarburants rédigé par Jean-Benoit Deloron (consulting manager chez S&P Global Agribusiness Biocarburants Consulting) est venu compléter cette dernière édition du rapport Cyclope. « Le marché du biodiesel n’est pas nouveau mais ceux sur les biocarburants à base de lipides ou d’huiles végétales se réinventent complètement à travers deux produits », stipule ce dernier.
« Le premier, le diesel renouvelable, se développe surtout en Europe, aux États-Unis et au Canada grâce à des réglementations qui mettent en place des mandats d’incorporation et qui développent des systèmes de subvention pour que ce carburant soit consommé et produit dans ces pays. Le deuxième marché en expansion : c’est le carburant d’aviation durable, avec presque tous les pays développés qui se mettent sur ces marchés », fait-il part.
« Ce qui est intéressant avec ces marchés, c’est qu’ils mettent aussi en valeur des produits comme des déchets et des résidus alors que pendant une longue période, les huiles végétales étaient la matière principale pour les biocarburants, met en avant Jean-Benoit Deloron. Ce commerce mondial en pleine expansion valorise la faible émission de carbone. Mais aussi, il combat le fameux débat entre « food versus fioul » avec aujourd’hui de nouvelles politiques qui permettent d’en sortir en favorisant les déchets et résidus. »
Le spécialiste précise ainsi qu’il y a une explosion du commerce mondial des huiles de cuissons usagées avec moins de 1 million de tonnes il y a trois ans et aujourd’hui près de 3 ou 4 millions de tonnes. Pareil pour les graisses animales avec le Brésil et la Nouvelle-Zélande qui en exportent beaucoup. »
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